Test d'A Total War Saga : Thrones of Britannia

Premier opus d'une nouvelle franchise, Thrones of Britannia se concentre sur l'unification de l'Angleterre par un unique roi durant le neuvième siècle avant Jésus-Christ. Cet opus mérite-t-il de fonder une dynastie ?

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Commençons par un peu de contexte. The Creative Assembly essaie depuis longtemps de diversifier son catalogue. Néanmoins, les tentatives en ce sens n'ont jamais pleinement convaincu, qu'il s'agisse de la franchise Total Warrior, d'Alien Isolation (succès critique, mais échec commercial) ou encore de l'excellent, mais trop méconnu, Halo Wars 2. Conséquence de cela, le studio britannique a décidé de se recentrer sur sa licence la plus forte : Total WAR. Pour accompagner ses opus principaux, la compagnie a décidé de décliner la franchise en deux variantes : en MOBA, avec Total War : Arena, et en une série de jeux basés sur un cadre plus restreint : A Total War Saga. Plongée dans le premier opus.

Fives Tribes

Premier constat une fois en jeu : la formule change beaucoup des Total War classiques, pour plusieurs raisons. Tout d'abord, l'aspect gestion est plus développé que jamais, en particulier concernant la famille royale et les nobles qui y sont liés. Ainsi, l'arbre généalogique est de retour et les options d'intrigue sont plus nombreuses que jamais ; ce sont au total dix options différentes qui sont proposées, allant de l'assassinat à l'adoption en passant par la recherche d'une épouse. Néanmoins, tout ceci n'est rien en comparaison d'une autre décision cruciale : l'attribution des fiefs. Certains territoires possèdent un fief, qu'il faudra décider de garder pour soi ou d'attribuer à ses sujets. Chaque domaine offre un bonus d'influence pour le seigneur ou un bonus de loyauté pour ses nobles, qu'il s'agisse de généraux ou de gouverneurs.

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En effet, il est désormais possible de nommer des gouverneurs pour chaque province dont la capitale est possédée. Ces gouverneurs permettent de mieux administrer la province, en augmentant l'ordre public ou montant le revenu issu des taxes, par exemple. Il n'est cependant pas possible d'avoir plus de dix gouverneurs, ce qui contraint à faire des choix en fin de partie.

La loyauté des gouverneurs et des généraux est un enjeu décisif du début et du milieu de partie, avant que différents bonus ne fassent disparaître cette difficulté. Il est assez agréable de réellement devoir réfléchir aux avantages que l'on souhaite donner à l'un et à l'autre afin de satisfaire tout le monde. C'est d'autant plus vrai qu'une bonne partie des nobles n'étant pas des généraux, il n'est pas possible de simplement les envoyer à la mort lorsqu'ils deviennent trop gênants ; si assassinat il y a, ce devra être par le biais des intrigues et le résultat peut ne pas être à la hauteur des attentes.

Outre les nobles, il faudra évidemment gérer également les provinces possédées. Là aussi, d'importantes modifications se sont produites depuis les précédents Total War. En effet, si les capitales provinciales fonctionnent de manière ordinaire, les autres régions ont connu un changement majeur : leurs bâtiments sont déjà pré-construits et ne peuvent qu'être améliorés. De même, si ces régions sont attaquées, elles ne se défendront pas ; le seul moyen de les protéger et d'y disposer une armée.

C'est une diminution nette des possibilités offertes au joueur, mais qui est compensée par les nombreux bâtiments différents qui sont proposés pour la capitale provinciale. De plus, la majorité des bâtiments proposent certes des bonus, mais aussi un malus, généralement d'ordre public ou d'argent, contraignant à faire des choix. En début de partie, il est souvent préférable de ne pas monter au maximum certains bâtiments, sous peine de créer de l'agitation. Tout doit être fait avec équilibre et les bâtiments de la capitale peuvent compenser ceux des autres régions, ce qui est agréable.

Ce système est également présent pour les technologies. Tout d'abord, précisons que celles-ci ne sont pas accessibles par défaut, mais ont toutes une condition spécifique, en général lié au fait de recruter un certain nombre d'unités d'un type ou d'améliorer un bâtiment à son maximum. Pour la première fois dans un Total War, j'ai décidé de ne pas monter un arbre jusqu'à son maximum, car le malus final me semblait trop lourd pour compenser le bonus octroyé. Chaque avancée mérite donc réflexion, ce que je trouve appréciable.

Diplomacy

Néanmoins, il est hautement regrettable que cette dimension stratégique s'arrête aux frontières de son Royaume. Les options diplomatiques sont pauvres et mal intégrées. Ainsi, un adversaire préférera toujours mourir que de devenir votre vassal. De même, les agents ont disparu, ce qui empêche notamment d'utiliser un assassin pour essayer d'écrémer une dynastie rivale ou pour favoriser ses propres prétentions. Il est également impossible de menacer une autre faction pour l'inciter à collaborer.

Pire, la diplomatie paraît profondément inutile. En effet, pour les objectifs de victoire, seuls sont pris en compte les territoires contrôlés directement par le joueur ou par ses vassaux ; les alliés ne sont pas intégrés au calcul, alors que c'est traditionnellement le cas dans les Total War. Comble de l'ironie, "libérer un territoire" en fait un allié militaire et non un vassal, alors que c'était l'inverse dans les précédents Total War.

Conséquence de ces points, la diplomatie ne sert absolument à rien. Certes, il existe une victoire basée sur le renom, qui ne demande donc pas un politique militaire agressive. Néanmoins, une fois en guerre, il n'y a aucune raison d'essayer de se faire des alliés ou de libérer des villes, puisque cela ne sera pas pris en compte dans les conditions de victoire. De même, le seul moyen de transformer un adversaire en vassal est de lui prendre son ultime ville : il ne l'acceptera jamais de manière diplomatique.

Game of thrones

La conquête militaire est du reste assez ennuyeuse. Les combats sont très classiques et ne perturberont pas les habitués de la franchise. En revanche, la carte de campagne a subi plusieurs modifications, qui ne sont guère agréables.

Premier point, la disparition du mode marche forcée. En soi, c'est plutôt un changement positif, tant il était frustrant de poursuivre une armée en marche forcée sans jamais avoir le moindre espoir de l'atteindre. Néanmoins, les déplacements paraissent inutilement longs, notamment en raison d'obstacles infranchissables. L'ensemble donne une impression de lenteur désagréable.

De même, le level design est peu inspiré. Il est logique qu'il y ait beaucoup de régions, car le jeu se concentre sur les îles britanniques. Néanmoins, Shogun 2 avait nettement mieux géré cette problématique, alors que la superficie couverte par les deux jeux est assez comparable. Dans Thrones of Britannia, la carte semble inutilement dense ; éradiquer un adversaire prend du temps et est peu agréable.

Cette sensation est renforcée par ce que j'évoquais plus tôt : l'absence de garnison dans les régions mineures. Cela signifie que dans la majorité des cas, il suffit de se déplacer, puis de cliquer sur "occuper". Certes, combattre des garnisons en nombre réduit ne changeait pas beaucoup cette impression, mais c'était déjà plus agréable que cette sensation de carte remplie d'endroits vides.

Le pire est cependant la défense. Comme il est impossible de fortifier les régions périphériques, celles-ci sont souvent conquises par l'ennemi. Le combat se transforme donc rapidement en une partie de cache-cache, dans laquelle chaque joueur prend le contrôle de territoires non défendus. C'est dommage, car le concept est intéressant et aurait été parfait avec une seule modification de game design : faire en sorte que contrôler la capitale octroie automatiquement le contrôle des autres régions de la province, mais qu'il soit possible pour un adversaire de les piller. Ainsi, il aurait quand même fallu être attentif à la défense de ces régions, mais le rythme de la conquête aurait été plus rapide.

Time Story

Heureusement, ces problèmes de rythme sont partiellement compensés par une narration plus présente, que ce soit par le biais de missions scénarisées ou de cinématiques entièrement doublées en français. L'influence des Total War : Warhammer est manifeste et le résultat assez probant.

De même, la victoire se décompose en trois parties : courte, longue et ultime. Ce qui est intéressant, c'est qu'il s'agit vraiment d'étapes : en réussir une débloque certains bonus, mais aussi quelques effets appréciables. Ainsi, mon Royaume de Wessex a été rebaptisé Anglo-saxons puis Angleterre à mesure que je progressais. Une différence faible, mais très agréable.

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Néanmoins, là encore, la réalisation pèche un peu. Pour atteindre la victoire ultime, il est nécessaire de survivre à l'invasion Viking. Celle-ci est précédée de nombreux avertissements, faisant monter la tension chez le joueur. Néanmoins, je n'ai finalement même pas remarqué leur apparition, car ils étaient occupés à combattre une faction mineure. J'ai fini par m'en occuper pour débloquer la victoire ultime, mais en comparaison des hordes du Chaos de Total War : Warhammer I et II, les Scandinaves paraissent ridiculement faibles. C'est vraiment dommage, car cet affrontement aurait pu donner un ultime pic de difficulté à la campagne ; il en est loin.

Final Touch

Pour conclure, A Total War Saga : Thrones of Britannia laisse une impression mitigée. Le jeu déborde de bonnes idées et est une réelle prise de risque, ce qui est appréciable pour un spin-off. Néanmoins, à chaque fois, la réalisation n'est pas à la hauteur. L'aspect gestion est bien pensé, mais la diplomatie est inutile, ce qui pénalise cet aspect. La conquête est soutenue par une narration intéressante, mais elle est très molle, en particulier sur la fin.

Difficile donc de recommander chaudement cet opus, surtout en comparaison de la qualité des Total War récents. Si vous aimez la franchise Total War et êtes intéressé par la période, le jeu peut avoir un intérêt, mais il semble mal né.

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Test réalisé par Alandring à partir d'une version fournie par l'éditeur.

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