Test de F1 2021 - Changement d'écurie, même philosophie

Après trois décennies d'indépendance, le couperet tombait il y a quelques mois : Codemasters est désormais entre les mains d'Electronic Arts. Omniprésent dans le sport, EA manquait certainement de l'expertise d'un spécialiste du sport automobile, faisant de Codemasters une cible idéale au moment où Take-Two tentait déjà de racheter le studio britannique. 1,2 milliards de dollars plus tard, voilà que Codemasters sort son premier jeu estampillé EA, et non des moindres puisque c'est sa licence star : F1 2021. EA n'est toutefois pas en terrain inconnu, puisque l'éditeur a fait un court passage dans l'histoire de la licence entre 1999 et 2002. 

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La patte EA

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L'arrivée du géant américain à la tête de Codemasters interrogeait évidemment, notamment sur l'orientation d'un jeu qui s'est amélioré petit à petit ces dernières années sans jamais vraiment connaître de révolution. Et EA marque le titre de son empreinte dès le lancement : un certain mode intitulé "Braking Point" (ou Point de rupture en français) est mis en avant. Curieux mode histoire qui s'inspire allègrement de "L'Aventure" des FIFA, on y joue le destin d'un jeune prodige britannique destiné à devenir l'un des plus grands, promis à un baquet chez Mercedes (toute ressemblance avec George Russell serait évidemment purement fortuite), qui se retrouve aux prises avec son coéquipier et rival, un vieux briscard de la F1 à l'attitude peu accueillante (Raikkönen ?). Pendant quelques heures, ce mode nous fait parcourir quelques courses de F2 et de F1, entières ou par séquences, afin de retracer trois saisons (2019, 2020 et 2021) où notre prodige et son rival se mettent joyeusement sur la tête. Assez efficace, ce mode apporte un bonus sympathique pour les gens qui découvrent la F1 et notamment les nombreuses personnes qui y recherchent le drama tel qu'il est mis en scène par Netflix dans sa série-documentaire. On peut tout de même regretter que celui-ci soit écrit avec les pieds, mettant en scène des caricatures de personnages sans jamais profiter du casting du paddock. Cela coûtait sûrement trop cher de faire participer les pilotes, même si EA l'a déjà fait en incluant des joueurs pro dans son mode histoire sur FIFA.

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De manière plus générale, le contenu de F1 2021 fait un bon en avant. Au-delà de son mode histoire, le jeu profite du retour du mode carrière en coopération qui nous manquait terriblement, même si celui-ci semble équilibré assez bizarrement avec une IA, à difficulté égale, plus difficile à suivre qu'en carrière solo. Néanmoins, on apprécie la possibilité de jouer en crossplay entre deux consoles d'un même constructeur (PS4/PS5 dans notre cas), ainsi que la solidité du mode qui reprend tous les éléments de la carrière en solo sans rien en supprimer. De quoi pouvoir s'associer au sein d'une même écurie avec un ami et la faire grandir ou même se la jouer rivaux dans deux écuries d'un niveau similaire. On aurait quand même bien aimé que ce changement d'horizon pour Codemasters, sous l'égide d'EA, ne marque pas d'autres choses moins ragoûtantes : les voitures de légende ont disparues et les contenus cosmétiques payants n'ont jamais été aussi nombreux. Heureusement, ceux-ci n'influent en rien sur le jeu en lui-même puisque tout le contenu utile est disponible d'entrée. À l'exception toutefois de quelques circuits puisque le Grand Prix d'Emilie-Romagne (Imola), du Portugal (Portimao) et d'Arabie Saoudite (Jeddah) ne seront disponibles que dans une mise à jour (gratuite) ultérieure. Difficile à avaler pour des circuits qui ont été annoncés au calendrier 2021 il y a bien longtemps, pour un jeu qui, lui, sort en milieu de saison. À noter d'ailleurs que le virage 10 du circuit de Barcelone n'a pas été modifié contrairement à la réalité et le Grand Prix de Turquie (Istanbul Park) qui remplace finalement le Canada au calendrier ne sera purement et simplement pas proposé dans F1 2021...

IA assassine

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Une chose est particulièrement réussie sur F1 2021, les améliorations apportées à son IA. Longtemps un point faible de la série, les pilotes contrôlés par le jeu qui ne prenaient jamais aucun risque et se suivaient en petit train, permettant souvent par exemple de dépasser la moitié du peloton au premier virage sans aucun risque. De nombreuses critiques portées contre le jeu qui ont eu pour conséquence une revisite de l'IA, puisqu'elle apparaît cette fois-ci bien plus agressive. Au départ, on voit les pilotes essayer de se faufiler à gauche et à droite. Lorsqu'ils sont en poursuite, les pilotes de l'IA tentent des choses au point de freinage avec plus ou moins de réussite, de la même manière qu'ils tentent de défendre lorsqu'ils sont devant. Cela fait un bien fou à un jeu qui prend de l'intérêt en solo, puisque les courses sont soudainement plus vivantes avec des pilotes qui tentent tout pour garder leur place ou pour dépasser. Alors, il y a un mauvais côté puisque certaines fois l'IA prend des risques inconsidérés et cela finit comme Bottas en Hongrie cette année, mais au moins il y a du piment. On se plaît vraiment à tenter de trouver des ouvertures face à des voitures qui défendent chèrement leur place, le plus souvent dans les règles. Il y a inévitablement un besoin d'équilibrer, mais la série n'a jamais été aussi agréable à jouer sur ce point-là.

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Pour accompagner cette IA revue et corrigée, le gameplay s'agrémente aussi de quelques détails qui permettent d'accentuer le plaisir de jeu. L'arrière de la voiture gagne enfin en souplesse et n'est plus une sorte de train incapable de dérailler, puisqu'il n'est plus rare de perdre l'arrière avec une F1 qui dérape plus facilement, alors que le danger dans les précédents opus venait le plus souvent de l'avant. Le jeu indique en outre que le fond plat peut être endommagé, tout comme l'aileron arrière. Si cela ne provoque que de la joie pour les habitués des modes en ligne où l'aileron arrière est tristement célèbre pour son invincibilité (incitant à des comportements anti-sportifs assez terribles), la réalité est bien moins séduisante dans la mesure où l'on s'aperçoit vite que si l'aileron arrière et le fond plat peuvent être endommagés, il faut y aller comme des bourrins pour que cela arrive. Et bien souvent, un autre élément indispensable de la voiture (suspensions et roues par exemple) est détruit avant que la détérioration du fond plat ou de l'aileron arrière ait le moindre impact. Si l'on peut comprendre l'hésitation sur l'aileron arrière tant il est rare de voir une F1 être endommagée à ce niveau (même si Vettel se souvient d'une rencontre avec Leclerc en Autriche), la question est plus difficile sur le fond plat qui est un élément extrêmement important des F1 modernes, et qui pose souci à beaucoup de pilotes qui ont tendance à rouler un peu trop joyeusement sur certains vibreurs.

Une affaire de détails

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Enfin, le mode Mon Écurie bénéfice de quelques améliorations de contenu et d'équilibrages. Il y a tout d'abord les coûts, qui sont un peu plus rationnels, notamment dans la gestion des contrats des pilotes, ainsi que des motoristes plus réalistes puisque les moteurs Honda et Renault ne sont plus considérés comme loin derrière Ferrari et Mercedes. Le moteur n'est ainsi plus "tout puissant" au moment de construire son écurie, avec une recherche et développement (R&D) infiniment décisive pour valoriser les qualités de chaque moteur. La progression en R&D est d'ailleurs bien plus compréhensive, puisque Codemasters s'est enfin séparé de son arbre de compétences imbitable pour laisser place à une interface plus lisible, plus claire, avec une progression logique de chaque élément de la voiture. Gagner des points d'amélioration pour lancer les développements n'est toutefois pas une mince affaire puisqu'il faut participer aux essais libres de chaque Grand Prix pour en amasser plus vite et c'est là-dessus que les développeurs ont insisté en rendant les essais libres bien plus intéressants. Les programmes d'entraînement un peu bateaux sont toujours là, mais ils sont enrobés d'objectifs secondaires pour gagner des bonus de développement, incitant à tous les faire à chaque week-end de course. Pour les personnes peu patientes, il est aussi possible de simuler ces programmes, avec un pourcentage de chances de réussite qui n'est, honnêtement, pas souvent à notre avantage. Cependant, on sent une vraie volonté de rendre les week-ends de courses plus attrayants, avec un vrai intérêt apporté aux essais libres au-delà de la reconnaissance et l'entraînement sur le circuit.

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Le titre ne progresse toutefois pas sur le plan technique : conforme à ses prédécesseurs, le jeu n'évolue pas sur l'ancienne génération de consoles. Quant à la nouvelle génération, elle se contente de se mettre au niveau de la version PC dans ses détails les plus élevés, tournant à un impeccable 60 images par secondes jamais pris à défaut. Ni joli ni vilain, le jeu reste fidèle à lui-même. Néanmoins, c'est du côté de la jouabilité que l'on souhaitait jeter un œil, puisque Codemasters promettait une prise en charge de la DualSense sur PlayStation 5. Cette fameuse manette qui possède des gâchettes adaptatives, capables de se bloquer ou d'augmenter leur résistance selon les séquences de jeu. L'effet n'est pas aussi impressionnant que sur d'autres jeux, néanmoins on sent les gâchettes s'agiter lorsque l'on commence à perdre l'adhérence en piste, tandis que la gâchette de frein est un peu plus dure que l'accélération. Cela permet de mieux doser le freinage, tandis que l'accélération est plus précise grâce à la course plus longue des gâchettes PS5 (en comparaison de la PS4). Les vibrations quant à elles sont bien plus précises et nombreuses, permettant d'identifier assez vite si la voiture se trouve sur la piste, sur un vibreur ou si elle mord l'herbe.

Conclusion

Partant toujours sur de bonnes bases, F1 2021 se dote de quelques améliorations qui font un bien fou à la licence. Plus agréable à jouer, plus disputé, quitte à être parfois plus frustrant, le jeu est plus vivant et provoque plus de combats sur la piste. Son IA est plus fine avec un comportement diversifié qui rend les courses imprévisibles, tandis que le modèle de conduite s'offre quelques subtilités pour aller toujours un peu plus loin dans le challenge offert. De quoi explorer le mode histoire, Braking Point, ainsi que son mode coopération qui fait un joli retour, tandis que le mode Mon Écurie gagne en intérêt. Toutefois, il est difficile de fermer les yeux sur un contenu parfois raboté (aucune voiture de légende) ou d'autres fois en attente d'une mise à jour ultérieure qui n'a toujours pas de date précise pour ajouter les nouveaux circuits de la saison. On regrette aussi que les circuits déjà établis, Barcelone et Melbourne, n'aient pas bénéficié des modifications qui ont eu lieu sur quelques uns de leurs virages. Alors, c'est un constat un peu amer pour le contenu du jeu, tandis que le reste est particulièrement réjouissant.

Test réalisé par Hachim0n sur PlayStation 4 et PlayStation 5 à partir d'une version fournie par l'éditeur.

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