Test - Gears of War: Reloaded - Le retour du roi sur PlayStation ?

Presque vingt ans après sa sortie, Marcus Fenix débarque enfin sur PlayStation 5. Ce remaster technique ravive-t-il la magie de 2006 ou trahit-il simplement l'âge du classique ?

Avant-propos : Ce test a été réalisé par Myrhdin et Dunta. Sa rédaction n'est le fruit d'aucune transaction financière entre le rédacteur ou JeuxOnLine et le développeur, l'éditeur ou les entreprises les représentant. Il est cependant porté à l'attention du lecteur que le délai dans la publcation de ce test est dû au refus des parties prenantes de mettre à notre disposition une seconde clé qui nous aurait permis de tester le mode coopératif en ligne, une partie intégrante et importante du jeu à notre sens, nous forçant à attendre la sortie officielle du jeu pour le tester complètement.

Gears of War: Reloaded marque un tournant historique pour l'une des licences les plus emblématiques de Microsoft. Développé par The Coalition sous l'égide d'Xbox Game Studios, ce remaster du chef-d'œuvre de 2006 d'Epic Games arrive enfin sur PlayStation 5, accompagné des versions Xbox Series X|S et PC. Pour la première fois de son histoire, la saga quitte l'exclusivité Microsoft pour s'offrir une seconde jeunesse multiplateforme.

L'intérêt de cette sortie dépasse la simple nostalgie. Gears of War a révolutionné le genre du third-person shooter en popularisant le système de couverture moderne, inspirant une génération entière de développeurs. Pour les joueurs PlayStation qui n'ont jamais eu l'occasion de découvrir les aventures de Marcus Fenix sur la planète Sera, c'est l'opportunité de comprendre pourquoi ce titre a marqué l'histoire du jeu vidéo. Propulsé par l'Unreal Engine 5, ce remaster promet de faire découvrir ou redécouvrir ce classique dans de bonnes conditions techniques.

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Ce qu'on a aimé

Un système de combat toujours aussi unique et maîtrisé

Près de vingt ans après sa sortie originale, le système de couverture de Gears of War reste sans équivalent dans l'industrie du jeu vidéo à nos yeux (et pourtant, on en a mangé des TPS). Contrairement aux nombreux titres qui ont tenté de copier sa formule "stop-and-pop", l'original conserve un équilibre intéressant entre fluidité des mouvements et poids des personnages qui lui confère une identité propre. Marcus Fenix et ses compagnons d'armes évoluent avec une certaine aisance entre les abris de fortune, permettant des transitions naturelles entre les phases de protection et d'offensive.

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Le système d'Active Reload, qui récompense la précision du timing par des bonus de dégâts et une réduction du temps de rechargement, ajoute une dimension stratégique constante aux affrontements. Cette mécanique, apparemment simple, transforme chaque rechargement en petit défi personnel et maintient l'attention du joueur même dans les moments les plus calmes. La diversité des armes, de l'iconique Lancer avec sa tronçonneuse au Rayon de l'Aube, offre une variété suffisante pour adapter sa stratégie selon les situations, même si l'arsenal reste volontairement limité comparé aux standards actuels.

Une prouesse technique solide sur toutes les plateformes

L'Unreal Engine 5 améliore notablement l'expérience visuelle de ce classique sans en trahir l'essence. Les améliorations apportées au système d'éclairage sont particulièrement visibles, notamment durant les séquences nocturnes où la lumière devient un enjeu de survie face aux redoutables Kryll (au point que l'un d'entre nous se retrouvait dans l'ombre parfois bien malgré lui, tellement l'environnement est plus clair que dans le jeu original).

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La campagne tourne en 4K natif à 60 images par seconde sur PlayStation 5 et Xbox Series X, avec un support HDR qui révèle des détails jusqu'alors invisibles dans les environnements dévastés de Sera. Plus impressionnant encore, le multijoueur atteint les 120 images par seconde sur consoles, offrant une fluidité qui surpasse même certaines productions actuelles.

Sur PC, les performances s'avèrent correctes avec une optimisation qui permet au jeu de tourner parfaitement même sur des configurations modestes.

La certification ROG Ally témoigne de l'attention portée à la compatibilité avec les appareils de jeu portables, élargissant considérablement l'accessibilité du titre.

Une intégration DualSense qui améliore l'immersion

On a auss eu l'occasion de tester le jeu sur PlayStation 5 sur le compte d'un ami : Dunta comme moi restons des fanboys Xbox, ou de sales pauvres qui n'ont plus la place ou le temps d'avoir un espace gaming PC.

L'implémentation des fonctionnalités de la manette DualSense constitue l'une des bonnes surprises de cette version PlayStation 5. Les gâchettes adaptatives reproduisent fidèlement la résistance de chaque arme : la gâchette L2 ne nécessite qu'une pression légère pour viser avant de rencontrer une résistance naturelle, tandis que R2 utilise toute sa course pour simuler le recul des différentes armes à feu. Le retour haptique se montre particulièrement réussi lors des exécutions à la tronçonneuse, où les vibrations reproduisent avec un certain réalisme le déchiquetage des ennemis.

Le highlight de l'expérience ?Le haut-parleur intégré diffuse les communications d'Anya et les notifications sonores, créant une spatialisation audio vraiment cool qui renforce l'immersion sans jamais devenir intrusive. Cette attention aux détails prouve que The Coalition a véritablement pensé cette version PlayStation comme une expérience native plutôt qu'un simple portage technique.

Un multijoueur classique préservé dans son intégrité

Le mode Versus de Gears of War: Reloaded conserve intégralement l'esprit compétitif qui a fait la réputation de la série. Les dix-neuf cartes multijoueur originales sont incluses avec tous les contenus téléchargeables précédemment payants, offrant une valeur ajoutée appréciable. Le cross-play entre toutes les plateformes garantit une base de joueurs étendue et des temps d'attente réduits, élément crucial pour la longévité du titre.

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L'équilibrage original, avec la domination du Gnasher shotgun et l'importance cruciale des mouvements tactiques, reste intact et continue de récompenser la maîtrise technique plutôt que la chance. Les modes de jeu classiques comme Team Deathmatch et King of the Hill côtoient des variants plus spécialisés comme le 2v2 Gnasher Execution ou le One Shot One Kill, offrant suffisamment de variété pour satisfaire tous les profils de joueurs. Cette fidélité aux mécaniques originales fait de Reloaded un véritable projet de préservation du multijoueur de 2006, dans toute sa pureté brutale.

Ce qu'on n'est pas sûrs d'avoir aimé

Une stratégie commerciale questionnable pour une licence incomplète

La décision de Microsoft de ne porter que le premier épisode sur PlayStation soulève de légitimes interrogations quant à la cohérence de cette démarche multiplateforme. Gears of War: Reloaded fonctionne davantage comme une introduction frustrante que comme une expérience complète et satisfaisante pour les nouveaux venus.

Les joueurs PlayStation se retrouvent dans une impasse narrative, avec des mystères entamés (l'histoire d'Adam Fenix, la quête de Dom pour retrouver Maria, les événements d'Aspho Fields) qui ne pourront jamais être résolus sur leur plateforme. Cette approche "teaser" risque de décevoir ceux qui découvrent la richesse de cet univers sans possibilité de poursuivre leur exploration.

On peut logiquement se demander pourquoi ne pas avoir porté une "The CoG Ultimate Collection" à l'image de la Master Chief Collection d'Halo, vendue plein pot, mais fournissant tous les jeux de la saga principale. Après, si on met notre chapeau d'analyste, on connaît la réponse : c'est dans l'espoir de vendre individuellement tous les jeux aux utilisateurs de Sony, ou de les tenter de prendre un abonnement Game Pass le temps de les faire sur un autre support. Stratégie payante ou non ? On le verra bien. C'est pas illogique, ça n'en reste pas mois bassement mercantile.

Le prix de 40 euros peut sembler élevé pour un jeu de 2006, même "reremasterisé", surtout quand on sait que les possesseurs de l'Ultimate Edition le reçoivent gratuitement et qu'il est disponible jour un sur Game Pass pour les abonnés Xbox. Cette politique tarifaire différenciée interroge sur les véritables intentions derrière ce portage.

Au rayon des trucs un peu dégueulasses liés à la sortie, a priori (selon Reddit), le couch coop promis par Microsoft sur la version PC non liée au Game Pass ne fonctionne pas et la feature a été purement et simplement effacé de tout le matériel de promotion lié à cette version spécifique.

Un multijoueur potentiellement déséquilibré pour les néophytes

L'arrivée de nouveaux joueurs PlayStation dans un écosystème multijoueur vieux de vingt ans pose des questions d'équilibrage et d'accessibilité. Les vétérans de la série possèdent deux décennies d'expérience dans la maîtrise des subtilités du système de mouvement et des combats au Gnasher, créant un fossé de compétences potentiellement décourageant.

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L'absence de modes d'entraînement étoffés ou de matchmaking équilibré selon le niveau de maîtrise risque de frustrer rapidement les novices.

Le cross-play, bien qu'avantageux pour la population de joueurs, amplifie ce problème en mélangeant des joueurs aux niveaux d'expérience radicalement différents, mais aussi les joueurs consoles aux joueurs PC (même si GoW est clairement une licence où l'avantage PC est relativement moins important que sur des jeux de tirs purs).

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Cette situation pourrait nuire à la rétention des nouveaux joueurs et limiter l'impact de cette sortie multiplateforme sur le long terme.

Ce qu'on a moins aimé

Une direction artistique qui accuse lourdement son âge

La palette de couleurs de Gears of War: Reloaded reste prisonnière des codes esthétiques de 2006, malgré les améliorations techniques apportées. Les teintes brunes, grises et ternes dominent encore largement les environnements dévastés de Sera, reflétant une époque où cette approche monochrome définissait le "réalisme" dans les jeux de guerre.

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Même avec l'éclairage amélioré de l'Unreal Engine 5, les environnements manquent de personnalité visuelle et peinent à captiver l'œil habitué aux productions contemporaines plus colorées. Les rares moments de beauté surviennent principalement durant les séquences nocturnes, où l'obscurité masque opportunément la monotonie des textures.

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Cette esthétique datée nuit particulièrement à l'immersion des joueurs découvrant le titre pour la première fois, habitués aux standards visuels actuels plus variés et expressifs. L'impression générale d'évolution post-apocalyptique stérile finit par lasser au fil des six heures de campagne, transformant ce qui devait être épique en expérience visuellement répétitive.

Une intelligence artificielle défaillante qui brise l'immersion

Ce sera un souci particulièrement pour les nouveaux joeuurs : l'IA des compagnons de Marcus constitue l'un des aspects les plus frustrants de cette expérience remastirisée. Dom, Baird et Cole Train se comportent de manière erratique, se plaçant régulièrement dans la ligne de tir ou bloquant les passages stratégiques au pire moment. Leurs déplacements bruyants et imprévisibles trahissent souvent la position de l'équipe, annulant les efforts tactiques du joueur et générant une frustration constante.

En mode solo, ces dysfonctionnements transforment certains affrontements en épreuves d'endurance plutôt qu'en défis stratégiques équilibrés. L'absence d'améliorations sur ce point crucial démontre les limites de ce remaster, qui préserve malheureusement les défauts techniques de l'époque. Cette IA datée contraste douloureusement avec les standards actuels et rappelle constamment l'âge véritable du jeu sous son vernis technique modernisé.

Une narration superficielle qui ne résiste pas à l'épreuve du temps

L'histoire de Gears of War: Reloaded révèle toute sa maigreur narrative lorsqu'on l'examine avec un regard contemporain.

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Marcus Fenix demeure un protagoniste uni-dimensionnel, dont le passé mystérieux (emprisonnement, événements d'Aspho Fields) n'est jamais exploré de manière satisfaisante. Les personnages secondaires souffrent de stéréotypes particulièrement visibles aujourd'hui, notamment Augustus Cole dont la représentation reproduit les clichés raciaux des années 2000 sans nuance ni profondeur. Anya Stroud, seule présence féminine, se limite à un rôle de coordinatrice radiophonique sans impact narratif réel sur l'intrigue. Les fils narratifs entamés (la quête de Dom, l'héritage d'Adam Fenix) ne trouvent jamais de résolution, transformant l'ensemble en succession de mystères frustrants.

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Cette approche minimaliste fonctionnait en 2006 par sa nouveauté et la perspective d'une suite, mais révèle aujourd'hui ses limites face aux attentes narratives contemporaines plus exigeantes en termes de développement de personnages et de profondeur thématique.

L'absence regrettable du mode Horde légendaire

L'omission du mode Horde dans Gears of War: Reloaded constitue un manque important pour quiconque associe cette fonctionnalité à l'identité même de la série. Introduit avec Gears of War 2, ce mode de survie coopératif est devenu emblématique et représente pour beaucoup l'essence même de l'expérience Gears. Son absence transforme ce remaster en expérience incomplète, privant les joueurs de la rejouabilité et de la profondeur stratégique qui ont fait la réputation de la franchise.

Pour les nouveaux venus sur PlayStation, cette lacune prive de la découverte de l'une des innovations les plus influentes de la série, reproduite depuis dans d'innombrables autres productions. Cette décision limite considérablement l'intérêt à long terme du titre et renforce l'impression d'un produit délibérément tronqué pour encourager l'achat des suites… inexistantes pour l'instant sur PlayStation.

Crache ton COG, Myrhdin

Gears of War: Reloaded nous place dans une position paradoxale. Techniquement, c'est un remaster réussi qui honore l'héritage du titre tout en l'adaptant aux standards actuels. L'intégration DualSense sur PlayStation 5 se montre très convaincante, et les performances techniques impressionnent sur toutes les plateformes. Le gameplay demeure addictif et unique, rappelant pourquoi ce titre a révolutionné le genre en 2006.

Pourtant, nous ne pouvons ignorer la stratégie commerciale discutable qui sous-tend cette sortie. Proposer uniquement le premier épisode sur PlayStation ressemble davantage à un test marketing qu'à une véritable volonté de partager cette licence emblématique. Pour 40 euros, les nouveaux venus découvrent certes un classique, mais se retrouvent dans une impasse narrative frustrante.

Malgré ces réserves, nous recommandons cette expérience aux joueurs PlayStation curieux de comprendre l'influence de cette série. La campagne coopérative reste un plaisir intact, même après tant d'années, et le multijoueur conserve toute sa brutalité tactique.

Gears of War: Reloaded réussit son pari technique tout en révélant les limites d'une approche multiplateforme fragmentée. Un cash grab assumé mais techniquement honnête, qui ravira les nostalgiques tout en laissant les nouveaux venus sur leur faim.

Ce test a été réalisé par Myrhdin avec une clé fournie par le constructeur. Sa rédaction n'est le fruit d'aucune transaction financière entre le rédacteur ou JeuxOnLine et le développeur, l'éditeur ou les entreprises les représentant.

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