Test de Battlefield 1 : une Grande expérience ou une petite Guerre ?
Pour le cinquième opus principal de sa série, DICE a décidé de s’offrir un retour en arrière. En effet, Battlefield 1 offre comme cadre la Première Guerre mondiale. C’est un choix qui a le mérite d’être original : si la Deuxième Guerre mondiale a longtemps été le terrain de jeu privilégié des FPS, ces derniers préfèrent depuis quelques années un environnement contemporain ou futuriste. En retournant vers le passé – et en évoquant, de plus, une guerre peu abordée dans le jeu vidéo –, DICE adopte une démarche différente. Si le réalisme est loin d’être au rendez-vous, c’est surtout l’occasion pour le développeur suédois de proposer un titre particulièrement rigide.
Il faut sauver le soldat Ryan
Dans la scène inaugurale de sa campagne, Battlefield 1 parvient à égaler la réussite majeure du film de Spielberg. Dans celle-ci, le joueur change de personnage lorsqu’il meurt, rendant beaucoup plus concrète la tuerie de masse que représente la Grande Guerre.
La campagne de Battlefield 1 aurait pu être géniale. Le joueur aurait eu à sa disposition un groupe de soldats, les incarnant tour à tour à mesure que l’un d’eux décède. Cela aurait constitué une petite révolution dans le monde des campagnes des FPS. Malheureusement, comme dans le film de Spielberg, la qualité de l’œuvre chute fortement une fois l’introduction passée. Au lieu d’innover, Battlefield 1 reprend maladroitement les codes mis en place par les Call of Duty, à savoir une campagne ultra scénarisée dans laquelle le joueur tue plusieurs centaines de personnes à lui seul.
La campagne est divisée en cinq chapitres, chacun prenant entre une et deux heures pour être terminé. Le joueur incarne à chaque fois un personnage spécifique ; lorsqu’il meurt, le jeu charge un point de contrôle et fait comme si rien ne s’était passé. Le titre alterne entre les phases en véhicule (avion, chars de combat) et les mauvaises phases d’infiltration. Si certains passages sont agréables, l’ensemble demeure assez indigeste : la mise en scène est catastrophique, les personnages suivis inintéressants et le gameplay peu convaincant en-dehors des combats. L’infiltration, qui revient régulièrement, rappelle les plus mauvais exemples du genre, en raison d’une IA exécrable et de possibilités d’action très limitées pour le joueur. Enfin, toutes les missions font incarner les Alliés, alors que le jeu aurait pu montrer la guerre des deux côtés, comme c’est le cas en multijoueur.
Il y a neuf ans, Medal of Honor : Airborne offrait une excellente campagne solo. En dépit des années qui le séparent de son aîné, Battlefield 1 est très loin du compte, sa campagne étant aussi courte qu’inintéressante. Il existe divers objets à collecter et quelques défis pour chaque niveau, mais ce n’est pas ce qui incitera des joueurs à recommencer l’expérience. En effet, outre la qualité très moyenne de cette dernière, les cinématiques ne peuvent être passées. Devoir réécouter un discours long et ennuyeux achèvera tous ceux que le 100% motivait.
Des trois gros FPS de cette fin d’année – Battlefield 1, TitanFall 2 et Call of Duty: Infinite Warfare –, le premier cité est donc de loin le moins convaincant sur le plan de sa campagne solo. Si cet aspect est important pour vous, passez votre chemin. Néanmoins, cette partie du jeu sert avant tout d’initiation au joueur. C’est un bon moyen d’apprendre à utiliser les différentes armes et véhicules avant l’essentiel : le multijoueur.
T’as vu tu vas mourir, t’as vu tu vas mourir
Battlefield 1 propose des sensations très spécifiques, qui plairont beaucoup à certaines personnes et en dégoûteront d’autres. C’est un jeu au gameplay très clivant, qui peut autant être adoré que détesté. En effet, la mort n’a probablement jamais été aussi rapide ; quelques tirs suffisent à tuer, même s’ils sont effectués au torse. De plus, la vie remonte extrêmement lentement, sauf en cas d’intervention d’un médecin. Conséquence de cela, Battlefield 1 est avant tout un jeu de placement : être pris par surprise, c’est mourir. Le rechargement étant lui aussi très lent, chaque balle compte. Il est important de tirer à la bonne distance, sous peine de gâcher des munitions importantes – et probablement de mourir.
Chacune des quatre classes dispose de son intérêt propre. L’éclaireur dispose par défaut d’un sniper, lui permettant d’éliminer les ennemis à une longue distance. Le médecin peut soigner et ressusciter ses alliés. La mort étant très rapide, la résurrection est, elle, immédiate : une petite piqûre et cela repart. Cette rapidité est compensée par le fait que le joueur peut très vite décéder à nouveau si des ennemis demeurent dans le coin. L’ingénieur peut fournir des munitions, réparer des véhicules ou utiliser un mortier. Enfin, l’assaut est très efficace à courte distance, ses armes ayant une dispersion importante qui les rend inutile à moyenne ou longue portée. Chacun a donc son rôle à jouer et toutes les classes peuvent être personnalisées, pour s’adapter à la volonté du joueur. Sur ce plan, DICE est proche du sans faute.
Battlefield 1 est donc un jeu assez hardcore, en cela qu’il ne laisse aucun droit à l’erreur. Il incite beaucoup à la prudence, poussant à se déplacer le moins possible pour ne pas risquer une mort immédiate. Cependant, le jeu n’intègre pour le moment aucun friendly fire, qu’il s’agisse de tirs, de grenades ou de véhicules. Cela sera modifié dans un mode de jeu qui arrivera prochainement, dans un DLC gratuit, mais pour le moment l’équilibre du titre est un peu étrange.
Kill, Kill, Kill
Battlefield 1 est véritablement un jeu de kills. Dans trois des six modes de jeu (conquête, domination et match à mort par équipes), ce sont les morts qui déterminent l’équipe gagnante. Les deux premiers permettent de capturer des zones, mais l’impact de ces prises demeure limité. Il aurait probablement été préférable de ne prendre en compte que les zones conquises dans le calcul du score, car en l’état ces trois modes se ressemblent terriblement. Conquête et domination partagent le même système, à savoir une combinaison entre capture de zones et kills, mais le premier se déroule sur de grandes cartes (en 32 contre 32) tandis que le second privilégie des espaces plus réduits ainsi qu’un nombre de joueurs limité (12 contre 12) et n’inclut pas de véhicules. Sur de grandes cartes, le nombre de points à capturer est plus important. La coopération entre les joueurs étant limitée (nous y reviendrons), il est impossible de défendre efficacement tous les points contrôlés ; ceux-ci changent donc régulièrement de main, au point qu’on finit presque par ne plus y être attentif ; après tout, ce sont les morts qui font la majorité du score. Le match à mort n’inclut pas de zones à capturer, mais les parties ne diffèrent pas vraiment entre ces trois modes de jeu.
Quatrième mode de jeu, la ruée. Les joueurs doivent défendre – ou attaquer – plusieurs télégraphes. Si ces derniers sont détruits, les défenseurs reculent et doivent en défendre d’autres, jusqu’à épuisement des attaquants ou jusqu’à ce que les derniers télégraphes de la carte soient détruits. En soi, l’idée est intéressante, mais elle se heurte à une limite qu’elle s’est elle-même imposée : le mode ruée ne peut être joué qu’en 12 contre 12. Hors, 12 joueurs, c’est insuffisant pour défendre efficacement plusieurs points. La tactique est donc très limitée et, là encore, ce sont les kills de chacun qui sont décisifs : éliminer deux ou trois adversaires de suite permet souvent de faire pencher la balance de son côté, que ce soit en détruisant un télégraphe ou en le sauvant.
Si vous n’êtes pas un amateur de la course au meilleur ratio, seuls deux modes de jeux sont faits pour vous : opération et pigeon de guerre. Le premier reprend beaucoup de principes du mode ruée, mais les combats impliquent 40 ou 64 joueurs, ce qui change tout. De plus, les opérations sont scénarisées, ajoutant un peu de cachet à ces missions. Malheureusement, les cinématiques ne fonctionnent souvent pas, gâchant cette partie de l'expérience. Sur le plan de l'équilibrage, les attaquants disposent de trois ou quatre tentatives pour conquérir plusieurs zones, réparties sur deux ou trois cartes. Initialement, les défenseurs étaient exagérément avantagés, au point que les attaquants atteignaient rarement la deuxième partie de la mission, mais la première mise à jour a corrigé cela. Sur les quelques parties que j'ai pu faire depuis celle-ci, la donne semble désormais équilibrée, voire à l'avantage des assaillants. Il n'est pas impossible que DICE aille dans le sens inverse d'ici quelques mois.
Le meilleur mode de jeu est assez inattendu : il s’agit du mode pigeon de guerre. Dans celui-ci, les joueurs doivent capturer un pigeon apparaissant aléatoirement sur la carte, écrire un message et l’envoyer à leur artillerie. La première équipe à envoyer trois messages remporte la partie. Tout l’intérêt stratégique est que le message s’écrit nettement plus vite quand le joueur ne bouge pas et qu’il est possible de tuer le pigeon avant qu’il ne transmette son message. Ainsi, même si la partie semble perdue, une balle heureuse peut réduire à néant les efforts adverses. Le nombre de joueurs – 12 contre 12 – est ici parfaitement adapté, puisqu’il n’y a qu’un seul pigeon par carte et que les messages s’écrivent vite.
Chacun pour sa gueule
Ce qui peut ternir l’expérience de cet excellent mode de jeu, ce sont les limites du jeu en équipe. Un groupe ne peut compter que cinq joueurs et Battlefield 1 ne propose par défaut aucun moyen de communication ; c’est au joueur de compenser ces problèmes en recourant à des logiciels tiers. Un affrontement en pigeon de guerre entre deux équipes communiquant entre elles ou, mieux, une opération entre deux groupes soudés de 32 joueurs aurait un intérêt certain. Malheureusement, ce n’est pas ainsi que le jeu est pensé. Chacun joue de manière très indépendante, les escouades ayant comme attrait principal de proposer des points de réapparition. Pis, les interactions entre les escouades sont pratiquement inexistantes.
Un jeu EA ?
Sur le plan technique, le jeu a encore d’importants progrès à faire. Les temps de chargement sont très longs et plusieurs bugs persistent. Outre les cinématiques, citées plus tôt, il arrive par exemple d’entrer dans un véhicule et de ne pouvoir le déplacer. Plusieurs petits bugs sont présents en jeu et l’ensemble souffre d’Origin, une plateforme très en retard sur la concurrence pour ce type d’expériences.
Vous l'aurez compris : l'expérience est encore loin d'être parfaite pour le moment. Pour ce test, nous avons choisi d'attendre la première mise à jour majeure afin de voir si les principaux soucis étaient corrigés à cette occasion. Le verdict est mitigé.
Comme évoqué plus tôt, cette mise à jour rend les opérations plus équilibrées. Elle ajoute aussi la possibilité de quitter la partie à n'importe quel moment, modifie certaines armes et corrige quelques bugs. Néanmoins, le bilan est loin d'être parfait. Ainsi, quitter la partie est désormais possible de manière plus fréquente... mais cela se termine désormais parfois par un écran noir, contraignant à quitter le jeu puis à le relancer. De même, certains choix de game design semblent étranges, notamment concernant le gaz.
Le gaz est assurément l'une des armes emblématiques de la Première Guerre mondiale. Cependant, l'intégration en jeu est étrange. Il s'agit d'une grenade, que les joueurs peuvent librement utiliser. Toutefois, cette arme ne provoque aucun dégât si les joueurs équipent leur masque en appuyant sur la touche T. L'intérêt n'est donc pas létal, mais de contraindre l'adversaire à un geste qui le ralentit et le pénalise, puisqu'il est impossible de zoomer avec une arme si le masque à gaz est équipé. La mécanique peut avoir un intérêt. Le problème, c'est que le gaz est tellement répandu au sein des parties qu'il perd son intérêt tactique ; les joueurs prennent l'habitude de spammer T, tout simplement.
La réponse de DICE face à ce problème ? Pour compenser l'absence de dégât de ce type des grenade, les joueurs en ont désormais deux au lieu d'une seule. Résultat, le terrain est encore plus envahi qu'il ne l'était déjà.
Battlefield 1 a encore un long chemin devant lui avant d'être parfaitement équilibré et irréprochable sur le plan technique. De nombreuses mises à jour et DLC seront nécessaires pour cela. Cette première mise à jour ne rassurera pas les fans : DICE semble avancer à tâtons, comme ce fut parfois le cas pour Star Wars Battlefront. De long mois seront probablement nécessaire avant que le jeu ne soit débarrassé de la majorité de ces problèmes.
Battlefield 1 : parfait pour certains, moyen pour d’autres
Difficile de donner un avis définitif sur Battlefield 1, tant la perception différera d’un joueur à l’autre. Pour ceux cherchant un jeu centré sur le joueur et sur les kills, le titre constituera une excellente expérience. Pour ceux préférant la campagne solo, les objectifs d’équipe ou la coopération collective – à plus de 5, il s’entend –, le titre a des qualités, mais est loin d’être le meilleur FPS existant dans ces domaines.
Test réalisé par Alandring à partir d'une version fournie par l'éditeur.
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Plateformes | PlayStation 4, Windows, Xbox One |
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Genres | Tir, tir à la première personne (fps), historique |
Bêta ouverte |
31 août 2016 |
Sortie |
21 octobre 2016 (Windows) 21 octobre 2016 (Xbox One) 21 octobre 2016 (PlayStation 4) |
7 joliens y jouent, 11 y ont joué.
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