Test de Valkyria Chronicles (Switch) - Redécouvrir un classique façon nomade

Sorti en 2008 sur la PlayStation 3, Valkyria Chronicles a eu un succès initialement timide. Le bouche-à-oreilles, une adaptation en anime, une baisse de prix, un succès inattendu de la version PC et une version remasterisée plus tard, le jeu s'est lentement, mais sûrement, forgé ses lettres de noblesse et la franchise a vu naître deux nouveaux opus sur la PlayStation Portable en 2010 et 2011, ainsi que le tout dernier, Valkyria Chronicles 4, sorti en 2018 sur plusieurs plate-formes, dont la Switch en septembre au Japon. Afin de ne pas laisser son petit frère s'immiscer tout seul sur la dernière console de Nintendo, Valkyria Chronicles premier du nom sort ainsi presque en même temps que le benjamin de la famille sur Switch, pour le plus grand plaisir des joueurs. Cette sortie célèbre ainsi l'arrivée de la franchise chez Nintendo, mais également, assez ironiquement, la première version du jeu sur console portable.

 

Reste à voir ce que cette nouvelle itération nous propose et si elle mérite qu'on s'y attarde. Si cette version incorpore gratuitement tous les contenus téléchargeables (DLC) sortis, celle-ci ne tourne malheureusement qu'à 30 images par secondes (FPS), là où sa version remastérisée sur PC tournent à 60. Autre bémol, le jeu ne propose que la langue anglaise, n'ayant jamais été traduit en français (un patch non officiel existe pour la version PC). Qu'à cela ne tienne, qu'on le dise d'emblée : la sauce prend, même si certaines imperfections qui seront abordées en fin de test viennent tâcher le tableau.

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War... War never changes

Valkyria Chronicles nous plonge dans le continent d'Europa, en l'année 1935, où un conflit opposant les deux grandes puissances que sont la Fédération à l'Empire a dégénéré en une guerre ouverte, avec comme théâtre principal la petite nation de Gallia, riche en ragnite, le minerai magique de cet univers servant de source principale d'énergie aux différentes machines. Le jeu débute en suivant les mésaventures de Welkin Gunther, jeune aspirant biologiste en voyage qui était tranquillement en train de parler à ses amis les poissons dans sa bourgade natale de Bruhl quand la milice locale, dirigée par une éclaireuse un peu paranoïaque répondant au nom d'Alicia, le met en état d'arrestation du bout de son fusil, le suspectant d'être un espion de l'Empire. Si ce petit malentendu est vite résolu quand la sœur adoptive du pauvre hère qui passait inopinément par là révèle aux forces de l'ordre l'identité de Welkin, qui est en réalité le fils d'un général de la précédente guerre, les événements prennent rapidement une tournure tragique quand le village frontalier est envahi par l'Empire, avide des ressources en ragnite de Gallia, et qui, pour le coup, ne fait pas de discrimination en abattant sans broncher des civils. Welkin et Alicia se retrouvent ainsi forcés de prendre les armes pour défendre leur patrie et rejoignent par la force des choses l'escouade 7, avec Welkin comme chef.

 

C'est sur cette toile de fond que le joueur découvre le jeu, dont la trame scénaristique ne cache pas s'inspirer librement de la seconde guerre mondiale, avec notamment la présence d'une population malmenée et faisant l'objet des pires traitements par l'Empire. L'univers possède également sa dose de fantaisie, avec la civilisation disparue des Valkyrur, n'ayant laissé derrière elle que des vestiges et des reliques d'un lointain passée ainsi que de rares descendants dont les prouesses au combat sont légendaires. La trame scénaristique possède quelques moments notables et l'on s'attache aux membres un peu loufoques de son escouade, bien que l'on puisse déplorer que tous ne soient pas développés, le gros de l'attention étant réservé à quelques unités « leaders » bien précises en dehors des DLC.

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Command and Conquer

À la tête de son escouade, le joueur est amené à mener des batailles où son sens tactique sera sollicité afin de venir à bout des troupes ennemis et des situations parfois assez retorses du jeu.

Axé stratégie, le jeu adopte un système de tour par tour, où au sein de chaque phase le joueur doit utiliser ses unités afin de remplir les différents objectifs qui lui sont confiés. Chaque unité est contrôlée individuellement à la troisième personne par le joueur, dans la limite des points de commandements (CP) alloués à chaque tour (et pouvant être accumulés dans une certaine limite) et des points d'actions (AP) dont disposent l'unité, nécessaires pour se déplacer. Chaque unité contrôlée ne peut réaliser qu'une seule action par consommation de point de commandement et s'il est possible de réutiliser une unité plusieurs fois lors d'un même tour, celle-ci se verra graduellement amputée de ses points d'action, l'empêchant de se déplacer au bout de la quatrième utilisation consécutive. De plus, certaines unités ne disposent que d'un nombre limité de munitions (telles que les grenades et les balles pour fusil de sniper), empêchant d'abuser d'elles à moins de les ravitailler le même tour à l'aide d'un ingénieur. Il est également offert au joueur la possibilité de donner des Ordres, dont les effets varient du simple bonus en attaque au tir de sniper, voire de mortier sur une zone de la carte. Seul hic, ces ordres consomment les mêmes points de commandement que vous utilisez pour déplacer vos troupes. Il sera ainsi essentiel d'employer à bon escient vos ressources, afin de vaincre les forces adverses et ne pas laisser vos unités à découvert entre chaque phase, sans quoi celles-ci se verront très vite descendues.

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Vous aurez à jongler entre les différentes classes à votre disposition pour mener à bien vos objectifs :

  • Les Scouts (éclaireurs), pouvant se déplacer très loin à chaque tour, essentiels afin de repérer la position des troupes adverses et abattre les plus pénibles à coup de tir en pleine tête avant de rebrousser chemin pour se mettre à l'abri. Leur version élite gagne un lance-grenade essentiel pour déloger de loin les ennemis retranchés.
  • Les Shocktroopers (troupes de choc), spécialisés dans la puissance de feu à l'aide de leur mitraillette et de leur lance-flammes une fois promus.
  • Les Lancers, munis de lance-roquettes et adeptes de l'explosion des troupes blindées.
  • Les Ingénieurs, assez semblables à des Scouts en moins performants, mais seules unités capables de ravitailler les autres, de désarmer les mines et de réparer les tanks.
  • Les Snipers, dont l'utilité parle d'elle-même.

 

À ces différentes troupes se rajoutent votre tank : l'Edelweiss. Clef de voûte de votre escouade, celui-ci est imperméable aux tirs adverses, ne craignant véritablement que les unités spécialisées dans la destruction du blindage, et dispose d'un puissant canon capable de ravager les tanks adverses ou des groupes entiers d'ennemis à l'aide de son mortier, sans oublier la bonne mitraillette pour dégommer les petits curieux qui s'approcheraient de trop près. La résistance de celui-ci en fait un rempart parfait pour protéger vos unités des tirs adverses, un vrai mur mobile bien pratique.

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Néanmoins, cette super-unité dispose d'un talon d’Achille de taille : le radiateur à ragnite situé à l'arrière de celui-ci. Si vous laissez celui-ci à découvert et à portée de tir d'un Lancer adverse, vous pouvez dire adieu à votre tank et subir un Game Over. De plus, votre tank consomme le double de points de commandements comparé à vos unités à pied. Vous apprendrez ainsi rapidement à employer celui-ci à bon escient.

 

Le jeu propose des missions aux objectifs variés, introduisant régulièrement des nouvelles mécaniques de gameplay. Préparez-vous à mener à bien des missions de décimation, d’infiltration, de capture, de fuite et bien plus encore ainsi qu'à choisir les hommes et les femmes les plus à même de s'en sortir au regard des conditions du terrain.

 

Chaque unité possède des traits personnels positifs, mais également négatifs qui leur sont propres et qui reflètent leur personnalité, pouvant sérieusement impacter leurs performances, ainsi que des traits de combat se débloquant avec le niveau de leur classe. Tous les traits personnels ne sont pas disponibles d'entrée de jeu et se débloquent en utilisant vos unités, pouvant aussi bien les transformer en machine de guerre tout comme les rendre absolument bonnes à jeter. Avoir au sein de la même escouade une sadique assumée, un éclaireur qui ne se sent bien que retranché dans le camp de base, une pipelette perturbant les tirs de ses camarades, un fanatique des légumes et une jeune fleur refusant de tirer sur autrui peut donner lieu à des situations assez cocasses, le tout avec le casting de Skies of Arcadia qui s'est invité à la fête en tant que guests. Le niveau des unités n'étant pas individuel, mais commun à la classe à laquelle ils appartiennent, il est facile de changer complètement d'équipe pour vous adapter à toutes les situations et une section Recherche et Développement vous permettra d'améliorer leur équipement.

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Qu'on se le dise : au-delà de la période d'apprentissage des mécaniques qui mènera immanquablement de nombreux joueurs à envoyer leurs unités par mégarde au casse-pipe, le jeu peut se révéler difficile, avec certaines missions particulièrement ardues qui peuvent vous prendre de court, sans compter que vos unités peuvent être définitivement perdues si jamais elles sont abattues et capturées par l'ennemi (vos leaders resteront juste indisponibles le temps de la mission en court si ça leur arrive, à l'exception de Welkin dont la mort signifiera toujours un Game Over). Heureusement, le jeu possède de nombreux emplacements de sauvegarde et il vous est possible de sauvegarder n'importe quand et relativement rapidement en pleine mission. Si cela peut encourager certains à abuser des sauvegardes, il s'agit là d'une véritable providence au regard de la durée des missions qui peuvent facilement atteindre la demi-heure, si ce n'est plus selon votre style de jeu. Avis aux joueurs habitués à une sauvegarde automatique : le jeu n'en dispose pas et votre serviteur vous recommande très vivement de sauvegarder entre chaque mission.

À chaque apparition de Selvaria lors de vos missions, attendez-vous à un bottage de cul en règles.

À noter que le jeu ne vous permet pas de refaire indéfiniment les missions principales, cette possibilité ne s'ouvrant qu'à compter d'une Nouvelle Partie+. Des missions escarmouches sont néanmoins disponibles et peuvent être réalisées autant de fois qu'on le souhaite. Quand bien même, les récompenses en expérience et en argent à la fin de chaque chapitre sont suffisamment généreuses pour que vous n'ayez pas de réel besoin de farmer, mais si le cœur vous en dit les escarmouches et les missions DLC sont là pour combler vos besoins.

 

Restez un instant et écoutez-moi

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Les événements du jeu sont narrés par le biais d'un livre d'histoire, permettant de visionner les scènes du jeu et de lancer les missions. L'intégralité des dialogues est doublée, avec le choix entre l'anglais et le japonais. À cela se rajoute la gazette nationale, qui relate les événements de la guerre et dont la journaliste de terrain sollicite auprès de vous régulièrement des interviews que vous devez payer afin de débloquer de nouvelles scènes et, parfois, des missions inédites. C'est aussi elle qui débloque les talents personnels cachés de vos unités.

 

Côté graphismes, le jeu fait la part belle au cel-shading, avec un effet crayonné réussi qui, sans rendre le jeu mignon, véhicule une impression de douceur très agréable et des effets sonores retranscrits en jeu comme on pourrait le voir dans des comics américains, donnant un cachet assez unique au titre. Les musiques sont quant à elles composées par Hitoshi Sakimoto, à qui l'on doit la bande originale de Tactics Ogre, Vagrant Story ou encore Final Fantasy XII et se révèlent être assez mélodieuses et mélancoliques dans l'ensemble, avec quelques compositions assez angoissantes, soulignant la pression et l'hostilité des combats menés.

 

Le jeu souffre cependant de certains défauts qui peuvent agacer, tel que l'impossibilité de vérifier rapidement les traits de votre escouade sans passer par certains sous-menus particuliers et lors de la préparation d'une mission, des phases de gameplay parfois un peu lentes dans leur exécution, des murs invisibles empêchant la traversée de certaines zones par vos unités et votre tank et l'intelligence artificielle qui donne parfois l'impression de tricher en réussissant des tirs particulièrement improbables ou au travers du pixel du trou d'un mur mettant à nue la tête de votre éclaireur préféré (c'est du vécu). De plus, au regard de la précision parfois hasardeuse des armes (surtout au début avant d'effectuer des améliorations bien nécessaires ; l'efficacité de vos snipers en début et en fin de jeu changera radicalement) et de la tendance des ennemis à éviter les tirs, on est souvent forcé de se mettre au corps-à-corps et à viser de dos la tête des adversaires afin d'être sûr et certain de ne pas risquer de gaspiller un point de commandement. Enfin, pour un jeu qui se veut stratégique, il est assez décevant que la note en fin de mission soit uniquement affectée par le nombre de tours utilisés pour remplir l'objectif, au détriment d'autres facteurs tels que les soldats ennemis abattus ou vos unités perdues, ce qui a pour conséquence de privilégier les tactiques bourrines voire suicidaires.

Au regard de la portée misérable de vos armes et de la tendance des ennemis à vous esquiver, il vous faudra vous la jouer fourbe.

Version Switch : quelques petits soucis

S'agissant de cette version Switch, des petits points négatifs méritent d'être soulignés, et dont la correction par le biais de patchs n'est pas forcément garantie :

  • Si les premières cartes sont parfaitement fluides, les FPS ont tendance à légèrement chuter lorsque l'on déplace un personnage ou lorsqu'il y a des effets d'explosions à l'écran sur les cartes un peu grandes et remplies d'ennemis. Cela ne gêne pas vraiment l'expérience de jeu, qui ne nécessite pas de se montrer réactif, mais peut surprendre au regard de l'ancienneté du titre. À noter que ces chutes de FPS sont plus notables en mode dock qu'en mode portable, ce dernier mode restant le plus stable.
  • Des bugs sonores ont été décelés lors de la réalisation du test, avec certains sons qui soudainement ne se font plus entendre (absence de bruits des pages qui se tournent du livre, absence du jingle annonçant qu'une nouvelle scène est débloquée, absence du bruit d'une explosion suite à un tir de Lancer). Ces incidences restent rares, mais existent malheureusement.

 

Au regard de ces éléments, ne tournons pas autour du pot : le seul avantage réel de cette version Switch est la portabilité, alors que la version PC, pouvant se trouver facilement à moins de 20 euros grâce aux fréquentes soldes, propose les 60 FPS, une meilleure résolution et une traduction française (certes non-officielle, mais qui a le mérite d'exister). Et le tout avec les mêmes DLC inclus.

 

Dans l'ensemble, Valkyria Chronicles, malgré ses défauts, reste une expérience vraiment sympathique, mêlant un aspect stratégique et Action-RPG au sein de batailles qui vous tiendront en haleine. La variété de ses missions renouvelle sans cesse l'expérience, empêchant le joueur de tomber dans la monotonie. On regrettera tout de même une histoire somme toute assez convenue et un gameplay perfectible, mais le plaisir de jeu reste bien présent et c'est au final tout ce qui compte.

Test réalisé par Sargah sur la version 1.0 du jeu à sa sortie. Les captures d'écran ont été effectuées par le testeur.

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Plateformes PlayStation 4
Genres Tactical RPG, contemporain

Sortie 17 mai 2016 (PlayStation 4)

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