Test d'In Other Waters - Aime si Sonar : géopoétique
La planète Terre est en péril. Son monde et ses océans sont agonisants. L'humanité a envoyé dans l'espace de nombreux vaisseaux d'exploration afin de trouver un lieu d'accueil, nécessaire à notre survie collective. Toute trace de vie, même minime, serait un indice fort dans cette quête, annonciateur d'espoir...
Vous faites partie de ces explorateurs. Enfin, en quelque sorte.... En réalité, vous êtes une Intelligence Artificielle prenant corps à l'intérieur d'un vaisseau d'exploration de la société BAIKAL. Votre aventure débute sur une planète passée jusque-là inaperçue : Gliese 667Cc.
Le Dr Ellery Vas, xénobiologiste, est l'humaine que vous aidez et secondez dans cette mission. Elle a été appelée à l'aide par l'une de ses anciennes collègues scientifiques, Minae, en grande détresse d'après les dernières transmissions reçues. Depuis, Minae ne donne plus aucun signe de vie. Les fonds marins gigantesques de cette planète sont votre secteur de recherche et d'investigation.
In Other Waters (IOW) surprend d'abord par son interface graphique. Ce jeu d'exploration d'un monde extra-terrestre sous-marin prend le parti technique du minimalisme. Une carte topographique est votre principal visuel de ce monde d'obscurité. Ce choix technique et graphique se justifie parfaitement par le fait que vous êtes une intelligence artificielle, avec de fait une perception du monde différente de l'humain que vous accompagnez : vous voyez et parcourez l'inconnu à travers le cadran d'un sonar. Ce minimalisme n'est cependant pas dépourvu de charme. Le choix des couleurs, associé à des musiques bien travaillées, participe à donner vie à cet univers des profondeurs, en faisant ressentir, selon les ambiances, sérénité ou oppression.
Votre principal rôle est de scanner pour votre alter-ego humain les environs du vaisseau, à la recherche d'espèces (bactériennes, végétales, autres (?)), mais aussi de tout élément notable (rocher, grotte, ...) qui apparaissent autour de vous Ces points constituent des repères dans l'immensité de l'océan et vous permettent d'avancer dans ce labyrinthe marin. Par ailleurs, grâce aux organes visuels de votre petite humaine à bord, de très nombreuses micro-bulles d'informations textuelles complètent, pour chaque entité et pour chaque lieu croisé, la perception de votre environnement.
Durant votre périple, votre rôle se développe et il faut penser à gérer l'approvisionnement en énergie de votre moteur ainsi que celui de l'oxygène de l'habitacle. Les environnements que vous traversez seront parfois hostiles et dangereux ; par conséquent, le choix de l'itinéraire peut être déterminant pour votre survie. D'autres outils amplifient progressivement vos possibilités d’interactions avec le monde extérieur, vous permettant également d'atteindre de nouvelles zones, initialement inaccessibles.
IOW n'est pas un jeu difficile. Si vous êtes suffisamment prudent et organisé, vous ne devriez normalement pas jeter votre console/manette contre le mur. En effet, les fonds marins disposent, en fouillant un peu, d'une faune importante qui vous permet de recharger vos batteries, et, sauf exception, de survivre assez longtemps pour progresser dans votre aventure pour pouvoir retourner à votre base. Depuis ce lieu, vous pouvez vous reposer un peu avant de repartir et analyser plus en détails les données recueillies.L'ambiance visuelle et sonore, conjuguée au développement du scénario de fond, contribuent grandement à donner à cette aventure un goût bien particulier. L'envie de découvrir la vérité et de continuer l'exploration se mêle d'une certaine appréhension, d'un sentiment de solitude et de crainte face à la menace invisible, mais omniprésente, qui pourrait se cacher dans l'obscurité de ces profondeurs abyssales.
L'écriture scénaristique est remarquable. Le synopsis initial, minimaliste, pose peu de questions : « où est Minae ? ». Cependant, cette première interrogation en amène rapidement d'autres : Que faisait votre ancienne collègue sur cette planète ? Pourquoi s'y était-elle rendue sans ordre de la société BAIKAL ? Et que lui est-il arrivé ?
Dans ces fonds marins, la vie que vous trouvez rapidement n'est pas celle de Minae, mais une vie extraterrestre inconnue. Cette dernière apparaît pour l'humanité comme un miracle après toutes ces années de recherches. Pour essayer de saisir son fonctionnement, vous êtes nécessairement amené à la comparer à des modèles de notre vieille Terre. Mais c'est insuffisant : il faut continuer à observer, à faire des prélèvements et des analyses, pour tirer de maigres conclusions et tenter de comprendre au mieux le monde qui vous entoure. Cette catégorisation du vivant vous rappellera avec joie, ou avec un certain traumatisme, vos cours de biologie...
La compréhension de certaines espèces a aussi un intérêt pratique direct dans votre aventure, car elle vous permet par moments d'avancer en utilisant, par exemple, à bon escient certaines spores pour modifier les lieux et les écosystèmes que vous rencontrez.
Face à l'originalité et à toutes les qualités relevées de ce jeu, le principal bémol que l'on peut actuellement relever est la barrière de la langue. En effet, il faut beaucoup de curiosité et une très bonne maîtrise de l'anglais pour parvenir à s'immerger totalement dans cette oeuvre vidéo-ludique. Les graphismes étant très abstraits et limités, le fonctionnement de son imagerie visuelle repose essentiellement sur la capacité du joueur à se représenter ce qui lui est décrit, comme dans une oeuvre littéraire.
Les champs lexicaux principaux de ces descriptions émanent de la biologie, de la géologie, de l’océanographie... Cela peut être très préjudiciable pour accéder et pour s'immerger pleinement dans ce monde. Une fois passée la première heure de jeu avec un dictionnaire à vos côtés, vous vous résignez progressivement, et avec beaucoup de frustration, à vous concentrer sur l'essentiel... C'est bien dommage, car vous échappez à une part importante du monde qui vous entoure.
De la même manière, l'intérêt de la collecte des très nombreuses espèces et traces de vie de cet océan pourrait passer totalement en second plan. En effet, à quoi bon perdre du temps à chercher minutieusement toutes ces entités, à les attraper, à les répertorier, si vous ne comprenez ni à quoi elles ressemblent ni comment elles contribuent à leur écosystème ?Au demeurant, et très heureusement, la compréhension du scénario global et de la trame de l'aventure, toujours en anglais, est beaucoup plus accessible au commun des mortels et permet au joueur lambda (mais averti) de plonger avec plaisir dans ces profondeurs.
Ainsi, malgré ces quelques réserves franco-françaises, IOW est une aventure unique. Ce jeu a su créer et développer un univers très riche malgré ses petits moyens. Avec une réelle habilité et une grande maîtrise dans la construction de son aventure, il donne au joueur l'envie et le besoin de parvenir à la résolution de son scénario et de ses mystères.
Test réalisé sur Switch par Miaou à partir d'une version fournie par l'éditeur.
Sur le même sujet :
Plateformes | Nintendo Switch, Windows |
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Genres | Aventure, indépendant, simulation, futuriste / science-fiction, post-apocalyptique, science-fiction |
Sortie |
3 avril 2020 |
Aucun jolien ne joue à ce jeu, 1 y a joué.
Réactions (5)
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