Test de The Medium - un portage qui manque un soupçon de velouté

Près de neuf mois ont passé depuis la sortie du jeu sur consoles Xbox et sur PC (via Steam et le MS Store) et la période d'exclusivité a touché à sa fin avec ce portage vers la dernière-née de Sony. L'occasion pour les retardataires qui n'y auraient pas encore goûté (dont je fais partie) de pénétrer dans des ténèbres pleines de vers et micelles.

Creeping Death

Vdm (Vie de medium)
Vdm (Vie de medium)
On peut dire que la Bloober Team a le jeu d'horreur dans le sang depuis quelques années, depuis le succès de Layers of Fear qui avait été décliné sur toute une panoplie de supports (dont très récemment sur le PlayStation VR, en retard par rapport à la version PC, déjà). Malgré la réception mitigée de l'adaptation en ludiciel de Blair Witch, leur annonce du jeu The Medium était scrutée de toutes parts après la présentation du système de jeu basé sur un double univers à l'écran, le réel et celui des "esprits" (si on peut le qualifier ainsi...), les illustrations et la direction artistique qui fleuraient bon l'angoisse psychologique et la participation d'Akira Yamaoka aux compositions musicales en renfort d'Arkadiusz Reikowski. Évidemment l'inspiration principale, Silent Hill, suintait par tous les pores de la communication du studio et en l'absence d'un nouvel épisode de la licence Konami, The Medium portait d'autant plus les espoirs de son public cible.

C'est à Cracovie qu'on fait connaissance avec Marianne, medium de son état, qui travaille dans une morgue (quelle drôle d'idée). L'occasion pour elle sans doute de faire de belles rencontres éphémères, j'imagine. Elle ne fait pas que voir les esprits : il lui arrive malgré elle de carrément se dédoubler pour avoir accès à leur monde loin d'être un joli sentier de montagne un matin ensoleillé de printemps. Après une nouvelle expérience éthérée, elle reçoit un mystérieux coup de fil l'enjoignant à visiter la station touristique de Niwa, toujours en Pologne, pour en découvrir plus sur ses pouvoirs. Mais là encore, point de bonne surprise, de plage de sable fin ou d'activités de plein air avec un groupe de touristes qui s'enjaillent en Europe de l'Est, non : Niwa est célèbre pour être désaffectée suite à un massacre horrible qui y a eu lieu des décennies plus tôt. Mais bien sûr, quel meilleur endroit pour faire du trek quand on est medium ?

The Thing That Should Not Be

La projection astrale permet d'explorer sans bouger son corps réel
La projection astrale permet d'explorer sans bouger son corps réel
Arrive ce qui devait arriver, Marianne a plus d'une fois besoin de paracétamol, à encaisser tous ces maux de tête occasionnés par ses pérégrinations dans l'autre monde via sa projection astrale. Cela lui sera d'ailleurs bien utile pour s'engouffrer dans Niwa, où elle trouvera souvent portes verrouillées et chemins bloqués, qu'elle ne peut franchir qu'après une expérience totalement hors corps : Marianne peut en effet concentrer toute son attention sur son corps astral qui bouge alors librement de son côté tandis que son corps reste inerte, pour pouvoir libérer des passages, interagir avec des fragments du passé ou... réalimenter des circuits électriques. Sous sa forme de l'autre monde, elle peut utiliser deux pouvoirs, le premier étant un bouclier d'énergie permettant de traverser des nuées de papillons de nuit ma foi bien agressifs et le second une décharge d'énergie pouvant agir sur la matière de ce côté. Ce pouvoir est bien pratique pour redémarrer des générateurs, mais aussi, accessoirement, pour échapper au grand méchant loup Maw, créature de cauchemar qui hante les couloirs désaffectés du complexe de Niwa.

Il faudra pourtant être très prudent, car il ne sera principalement question que de se défendre, Maw étant intransigeant sur le fait de croquer la medium si tant est qu'elle ne court pas assez vite et quant à l'énergie, celle-ci se décharge très facilement donc il ne faut pas vraiment espérer lui lancer un kameha au détour d'un couloir. Maw fait office de croque-mitaine à la façon de Nemesis dans Resident Evil 3, mais ce ne sera pas la seule créature que l'on croisera dans les terres de Niwa : entre esprits restés ancrés et perdus en attente d'une rédemption et manifestations cyclopéennes d'émotions négatives, les lieux seront plus encombrés que du côté du réel.

Les environnements sont très soignés
Les environnements sont très soignés
Le monde des esprits est particulièrement réussi
Le monde des esprits est particulièrement réussi

Marianne doit donc naviguer à vue entre les mondes pour tenter de retrouver la personne qui l'a appelée au début du jeu, mais aussi ce qu'il est advenu de la jeune fille de sa vision, et (vous le voyez venir ?) sur elle-même. Au passage, elle découvrira l'histoire du massacre de Niwa et les charmants protagonistes de celui-ci dans une histoire à ne clairement  pas mettre entre toutes les mains, pas mal de thématiques traumatisantes pouvant être abordées avec beaucoup de brio : suggérer plutôt que d'être flagrant, raconter et ne pas en faire des caisses...  Un très bon point à mettre au crédit du jeu.

 

For Whom The Bell Tolls

Quelques angles de caméra confus
Quelques angles de caméra confus
La Bloober Team n'a pas renié ses inspirations et a pioché allègrement dans les jeux d'horreur des décennies précédentes en apportant leur propre touche bienvenue. Des angles des caméras fixes au monde miroir torturé en passant bien évidemment par les musiques avec l'ajout d'Akira Yamaoka au casting du studio, le jeu transpire tout l'amour que porte le studio au jeu d'horreur. La direction artistique est une franche réussite, les environnements sont incroyables et certaines scènes dans le monde des esprits sont particulièrement bien pensées et réussies graphiquement parlant, avec une inspiration du travail de Zdzisław Beksiński (que je ne connaissais pas, mais que je suis à présent ravi de connaître). La photographie et la mise en scène font partie des atouts indéniables du jeu.

Mais tout n'est pas rose pour autant et de l'autre côté du miroir, le jeu a sa part de petits défauts qui assombrissent le tableau global. À commencer par le rythme du jeu qui met des plombes à décoller et même quand celui-ci parvient enfin à être haletant, taper un sprint à foulées d'escargot si on n'a rien à fuir ou devoir faire une pause sur un décor à fouiller en point&click façon Myst du pauvre n'a rien de très angoissant. Les énigmes sont d'un niveau hélas très basique tout au long du jeu et on se surprend à espérer garder un objet important dans son inventaire pour une utilisation qui ne soit pas à découvrir une minute plus tôt ou plus tard ("tiens, un emplacement pour un pot de fleurs" suivi de "tiens, un pot de fleurs" dans la salle suivante). Cela manque de challenge intellectuel et au final les moments véritablement flippants ne couvrent que très peu de temps de jeu qui sera surtout dédié à l'exploration et la découverte de l'histoire cachée derrière les pouvoirs de Marianne, et cette mystérieuse jeune fille assassinée sur un quai dans sa vision. Aussi, la maniabilité est par moments un peu lourde et l'on peut se retrouver game over pour un pixel trop compliqué à évaluer en raison de caméras parfois mal fichues dans une aventure qu'on regrette d'être un peu trop linéaire.

The End of The Line

Welcome to Demon's Souls !
Welcome to Demon's Souls !
Au début de l'écriture de ce test, j'avais pour idée de titre "le clairvoyant est au vert" et j'hésitais avec celui que j'ai finalement mis, mais comme me l'ont fait remarquer mes chers collègues staffeux, les deux titres ne renvoyaient pas la même tonalité. J'ai opté pour celui qui était le plus mitigé des deux, car c'est exactement mon avis sur le jeu : il est "bien, mais". Si l'histoire et une bonne partie de la réalisation sont aux petits oignons, on reste sur sa faim en raison des accrocs sur la maniabilité, la linéarité et la simplicité du jeu. J'y ajouterai, avis personnel là encore, une fin un peu abrupte... Cela n'empêche pas cependant The Medium d'être suffisamment efficace pour faire le travail et si vous êtes en manque de jeu d'horreur, il remplira sa part du contrat et vous auriez tort de vous en priver.

Pour la partie technique, je ne saurais me prononcer sur les autres versions ; pour ma part j'ai relevé quelques rares chutes de framerate sur PlayStation 5 mais rien de rédhibitoire ; les apports de la Dualsense sont (pour ma part) du domaine de l'accessoire et je n'ai rien relevé qui nécessitait d'avoir cette manette plutôt qu'une autre. Les plus exigeants sur les spécifications pourront se tourner vers les analyses de Digital Foundry, qui donnent (évidemment) la version PC comme étant la plus léchée. Sur Xbox Series comme sur PlayStation 5, la résolution est en 4K dynamique avec un très léger avantage pour la PS5, mais tout en sachant que contrairement à sa rivale, la version PS5 n'a pas de ray tracing. Chacun saura voir midi à sa porte en tout cas ; ce portage n'a pas trop à rougir et saura trouver son public sans gros bug.

Test réalisé sur PlayStation 5 par Bardiel Wyld à partir d'une version fournie par l'éditeur.

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Plateformes PlayStation 5, Windows, Xbox Series X|S
Genres Survival-horror, fantasy

Sortie 28 janvier 2021 (Monde) (Windows)
28 janvier 2021 (Monde) (Xbox Series X|S)
3 septembre 2021 (Monde) (PlayStation 5)

Aucun jolien ne joue à ce jeu, aucun n'y a joué.