Test de Time Master : un petit bijou d’horlogerie
Time master est un jeu de puzzle et de stratégie du studio indépendant MorpheusZ Games. On incarne Zéno, un magicien craquant avec sa petite bouille de Bibi Ornitier, qui doit résoudre des énigmes au cours d'une soixantaine de tableaux pour sauver sa sœur accidentellement bannie. Ne vous laissez pas tromper par ses graphismes mignons, Time Master est un véritable piège dans lequel aimeront tomber tous ceux qui apprécient passer un bon moment en se triturant les méninges.
Nom de Zeus!
Pour retrouver sa sœur, Zeno se voit donc contraint de récupérer des fragments de cristaux. Si l'histoire sert de prétexte, elle a toutefois le mérite de ne pas s'imposer dans la progression et s'avère même utile sur la fin du titre. Les fragments du temps sont répartis au cours de 60 tableaux qui sont autant de puzzles d'adresse et de logique à résoudre. La spécificité ici, c'est qu'il est possible de remonter le temps. Si sur le papier on fait rapidement un parallèle avec l'excellent Braid qui nous permettait de rembobiner le monde, l'idée du contrôle temporel est cette fois traitée à l'inverse - ce n'est pas le monde qui avance ou recule, mais c'est le joueur qui crée deux timelines de son personnage qui se déroulent en parallèle.
Dans la pratique, dans un premier temps on construit et enregistre un parcours, celui de notre fantôme qui se déroule ensuite tout seul pendant que le joueur réalise en direct un autre cheminement complémentaire. On peut - et on doit - donc synchroniser les actions notre avatar et de son double pour qu'ils puissent ensemble réaliser ces tâches qu'ils ne pourraient faire seuls.
Illustrons avec un exemple un tout petit peu avancé : le cristal se trouve derrière une porte qui se trouve après un pont - le joueur doit donc traverser le pont puis ouvrir la porte pour atteindre le précieux. Seul problème, les deux sont commandés par un même interrupteur, donc si j'ouvre la porte, j'effondre le pont. Il faut du coup enregistrer un parcours dans lequel le fantôme appuie sur le bouton et jouer en parallèle pour traverser le pont avant qu'il ne s'effondre. Autant vous dire que passé un certain point, il faut sérieusement se triturer les méninges, car les solutions sont loin d'être évidentes.
J'ai mentionné un exemple un peu avancé parce que le jeu se montre très didactique dans les premiers tableaux qui sont plus simples que l'exemple ci-dessus, mais permettent de bien appréhender les possibilités de base. Toutefois, on est assez vite lâché dans la nature ce qui est un peu désarçonnant, mais également probablement voulu. Les deux premiers tiers du jeu se dévorent assez spontanément, on comprend généralement bien ce qu'il faut faire et on tombe une ou deux fois dans les pièges tendus en se disant "Ah c'est malin!". Le level design est bien agencé et si les mécaniques des niveaux ne sont pas très nombreuses elles renouvellent et se complètent bien pour éviter toute lassitude sans tomber dans le gimmick.
Au temps pour moi
C'est toutefois dans le dernier tiers que le jeu devient nettement plus difficile. De l'aveu des développeurs, Time Master cherche à nous faire résoudre des paradoxes et au-delà de la synchronisation de nos deux personnages, il faut surtout se poser des questions comme "comment envoyer le fantôme à un endroit qu'il ne peut pas atteindre" ou "quand traverser un pont effondré". On joue ainsi avec le "comment" ainsi que le "quand" et on se voit reconsidérer certaines impossibilités évidentes comme des évidences totales qui nous laissent bouche bée devant l'ingéniosité du niveau.
Certaines résolutions peuvent demander des efforts de réflexion ou de mise en situation intenses et nécessitent de se montrer créatif en trouvant des mécaniques dont on ne nous a jamais parlé avant. Face à un blocage que je n'arrivais pas à comprendre, je me suis spoilé un tableau - ce que j'ai ensuite immédiatement regretté - même si la solution était un peu traitresse. Si j'ai un conseil à donner, c'est de savoir ne pas s'obstiner, mais plutôt de faire une pause et de revenir quelques heures plus tard, en listant calmement ses possibilités, ses outils, ses objectifs pour trouver le bon angle d'approche.
L'expérience sera beaucoup plus satisfaisante de cette façon, d'autant que le jeu est également très généreux : on peut zapper plusieurs tableaux et continuer à en faire d'autres, pour ensuite y revenir plus tard et on peut finir l'histoire principale sans finir tous les tableaux. Toutes les mécaniques autour du gameplay sont faites pour qu'essayer ne soit jamais ni pénalisant ni frustrant: on peut recommencer à tout moment un niveau et conserver ou non le parcours déjà enregistré avec le fantôme. On peut également mettre ce dernier en pause pour se donner le temps d'explorer ou simplement pour ne pas avoir à compter le délai entre plusieurs actions. Notons au passage que les musiques sont très calmes, très apaisantes sans pour autant s'inscrire dans notre cerveau, ce qui prouve qu'elles sont bien adaptées pour le jeu. Les visuels sont également simples, mais mignons et fonctionnels - on reprochera tout au plus une ergonomie un peu bancale lors de la sélection des niveaux.
Remonté comme un coucou
C'est après environ 5H de jeu et l'affrontement contre un boss de fin qui demande de bien mettre en pratique tout ce qu'on a appris pendant note progression que l'histoire touche enfin au but : nous donner envie de refaire le jeu en mode "Time Attack". En effet, à la fin de chaque tableau, un score nous est attribué en fonction du temps passé pour résoudre le puzzle. Et bien, figurez-vous que pour voir la vraie fin, il faut avoir le meilleur temps sur chaque niveau et qu'en mode contre-la-montre le jeu prend une nouvelle tournure de difficulté et renouvelle sérieusement son challenge. Les solutions que vous aviez péniblement trouvées doivent maintenant être optimisées et exécutées avec maestria, voire être complètement repensées. C'est un hard mode brillant dont on aurait tort de se priver - même si les passages de rush seront hélas l'occasion de noter que les contrôles auraient gagné à être plus précis.
Le principal reproche - loin d'être rédhibitoire - à faire à Time Master est qu'il manque un mode observation accessible avant de déplacer notre personnage - ou une fois qu'il est décédé. Nous sommes faces à des puzzles et il y a deux composantes à leur résolution : l'observation et l'expérimentation. Or, certains niveaux sont trop grands pour tenir dans l'écran et donc être observés. Il y a bien un mode dezoom, mais il fait perdre en détails et il aurait été judicieux de pouvoir utiliser le stick droit pour permettre d'explorer le niveau sans devoir déplacer le personnage - déplacement qui peut s'avérer fastidieux s'il faut d'abord enregistrer un fantôme pour débloquer un ou plusieurs accès.
Dans la même veine, la possibilité de basculer la caméra de 3/4 vers une vue de dessus pour analyser les zones est aux abonnés absents. Ce mode carte aurait permis de rendre certains passages à base de glissades mortelles beaucoup plus lisibles sans pour autant les rendre moins complexes et nous aurait ainsi permis de réfléchir à une solution plutôt que de devoir mémoriser fastidieusement des tentatives de parcours jusqu'à trouver la bonne voie - avant de l'oublier dans la seconde. Bon allez, un papier, un crayon et c'est réglé et même sympa à faire !
Time Master est un excellent jeu de puzzle en 3D, qui mise sur les paradoxes à résoudre en déplaçant notre personnage en parallèle sur deux timelines différentes. Si résumé aussi abruptement, ça peut paraître aussi simpliste que complexe, le titre s'avère très progressif dans sa montée en difficulté, ce qui permettra à tous les joueurs de se l'approprier... avant de s'arracher les cheveux sur des niveaux de plus en plus machiavéliques jusqu'au moment de se lever de sa chaise en clamant un triomphal Eureka!
Le level design, au cœur de l'expérience est très bien pensé, les mécaniques se renouvellent et se complètent pour éviter la lassitude sans tomber dans le gimmick ou la profusion et le joueur peut se permettre de laisser de côté les niveaux qui lui résistent trop. Le reste du jeu est globalement bien pensé, l'ambiance est heureusement calme ainsi que très apaisante et c'est donc un plaisir d'accompagner Zeno, le magicien du temps, au travers des 5H de cette aventure - qui prend ensuite une autre dimension si vous vous attaquez au mode contre la montre.
Test réalisé par Oulanbator sur PC à partir d'une version fournie par l'éditeur.
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Aucun jolien ne joue à ce jeu, aucun n'y a joué.
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