Test de EA Sports WRC - Attention au dérapage

Pour la première fois depuis 2002 et son Colin McRae Rally 3, Codemasters profite du retour de la licence WRC dans son giron pour proposer un titre reprenant l'essentiel des bolides et tracés du championnat du monde de rallye. Intitulé EA Sports WRC (l'éditeur souhaitant visiblement unifier ses marques), le jeu reprend la physique du jeu de rallye précédent de Codemasters, DiRT Rally 2.0, en tentant d'y insuffler une nouvelle jeunesse avec un moteur graphique différent et un contenu plus généreux.

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Dans l'esprit de DiRT

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On sentait à l'époque de DiRT Rally 2.0 que Codemasters rongeait son frein, faute de licence officielle WRC. Ça ne les empêchait pas de proposer un jeu à la physique dantesque et aux sensations convaincantes, mais avec des tracés fantaisistes et l'absence des voitures les plus actuelles de la catégorie majeure du rallye. En récupérant la licence après de nombreuses années durant lesquelles elle a été gérée par les français de Kylotonn, EA permet à Codemasters d'aller au bout de son idée initiale en reprenant la physique qui a fait le succès de son jeu, avec l'enrobage du championnat du monde de rallye. On est ainsi en terrain connu, face à un jeu qui se prend vite en main et dont les sensations évoquent de tendres souvenirs des heures passées à tenter d'améliorer nos chronos sur DiRT Rally, puis son second épisode. L'arrivée de la licence traduit aussi la possibilité pour le studio d'offrir un contenu pléthorique, en ne se limitant pas aux bolides du WRC actuel, mais aussi en allant picorer du côté des catégories moins puissantes - mais pas moins passionnantes - comme le WRC2, Junior, Rally2 ou Rally4. Mais aussi avec des voitures emblématiques du Groupe B, des WRC des décennies précédentes (de 1997 à 2021) ou encore des kit cars qui s'avèrent assez géniales. Le tout en parcourant les rallyes officiels du calendrier, de Monte-Carlo à la Suède, en passant par le Kenya et le Japon. Pour autant, le jeu n'abandonne pas l'héritage de ses prédécesseurs, puisqu'on y trouve aussi des tracés inventés de toute pièce, comme le rallye "Mediterraneo" qui reprend la topographie et les spécificités des environnements méditerranéens pour en imaginer quelques épreuves, mais aussi le "Pacifico" qui en fait de même avec l'Asie de l'Est ou encore le "Scandia" avec les pays du Nord et "l'Oceania" avec les pays d'Océanie. Cette multitude de rallyes qui s'ajoutent à ceux du calendrier WRC renforcent un peu plus un contenu qui requiert un sacré nombre d'heures pour être parcouru et potentiellement un nombre infini pour être parfaitement masterisé. 

Et c'est d'autant plus intéressant que, à la différence de DiRT Rally 2.0, ce EA Sports WRC offre des spéciales beaucoup plus longues avec des tracés qui vont jusqu'à une trentaine de kilomètres, qui prennent plus de vingt minutes à être parcourus avec certaines voitures. Des tracés exigeants qui collent un peu plus à la réalité, mais qui nécessitent aussi une concentration extrêmement importante. Difficile d'arriver au bout avec un bon chrono sans trop endommager la voiture, mais quand on y parvient, il y a un sentiment d'accomplissement assez extraordinaire que je n'avais, personnellement, pas ressenti depuis longtemps dans un jeu de rallye. Et ce parce qu'au-delà de cette petite révolution pour la licence DiRT Rally, devenue EA Sports WRC, on y retrouve les mêmes sensations que ses aînés, avec des voitures qui réagissent plutôt bien aux différents revêtements, obligeant à toujours adapter sa conduite selon les différentes portions des tracés. Aucune similarité par exemple entre les graviers et l'asphalte, dans un titre qui soigne très bien cette dimension importante du rallye. C'est bien parce que les sols sont nombreux et divers que la discipline est aussi exigeante, parce qu'il faut être capable d'anticiper le comportement changeant de la voiture chaque fois qu'elle se trouve sur un nouveau revêtement, duquel les pneus s'échappent parfois. Comme dans les tracés sur neige, où la vitesse vient avant tout de la capacité à anticiper les virages pour positionner la voiture, qui ne cesse de glisser, au mieux en vue du prochain virage. Le jeu ne laisse aucun droit à l'erreur, même s'il y a suffisamment d'aides à la conduite et de modes de difficulté pour que les néophytes puissent y trouver leur compte, tandis que les spécialistes peuvent foncer à toute vitesse et joyeusement sur des routes toujours trop étroites, au risque de s'envoyer valdinguer dans un fossé.

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On aurait aimé néanmoins que Codemasters puisse s'inspirer du boulot plutôt intéressant de son prédécesseur Kylotonn du côté du mode carrière, puisque celui offert par EA Sports WRC est plutôt basique et peu captivant, avec assez peu d'impact sur le développement de l'écurie. Pourtant, le studio tente quelque chose d'intéressant dans ce mode en permettant de créer sa propre écurie et sa propre voiture, selon plusieurs modèles prédéfinis d'éléments à appliquer sur le châssis comme le moteur, les phares, les pare-chocs avant et arrière, la jupe latérale ou encore la customisation de la livrée. Mais une fois tous ces paramètres définis, on retombe vite sur un enchaînement de courses sans grand impact sur le budget, sur les membres de l'écurie et le développement de la voiture. Le studio britannique aurait pourtant même pu s'inspirer du mode "Mon écurie" de son jeu de F1, qui fait bien mieux que ça. Alors certes, c'est sûrement un coup d'essai avant de mieux affiner les intentions dans la prochaine édition, mais Codemasters a une telle expérience sur le domaine qu'il est dommage que le studio ne puisse pas proposer mieux cette fois-ci. Heureusement, on profite de leur expertise sur la conduite, puisqu'elle reste similaire à DiRT Rally 2.0, avec un modèle légèrement affiné mais toujours efficace. Pareil pour les notes du copilote qui sont toujours aussi claires et précises, avec des annonces faites à l'oral que l'on peut suivre sans aucun problème.

Des performances qui entachent l'expérience

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Pour la première fois en une quinzaine d'années, Codemasters a fait un choix radical en abandonnant son moteur maison, l'EGO Engine (qui a connu de nombreuses itérations depuis 2007) pour passer à l'Unreal Engine 4. Un choix fait notamment, selon leurs dires, pour profiter d'un moteur plus adapté à la création de spéciales de rallye qui s'étendent sur de plus larges zones. On a accueilli ce choix avec une vraie curiosité, car si le studio maîtrisait sur le bout des doigts son moteur maison qui était intouchable sur son optimisation et ses performances techniques, celui-ci était vraiment vieillissant et ne tient plus vraiment la comparaison visuelle avec les standards d'aujourd'hui. Et sur l'envergure du jeu, c'est une réussite, car on se retrouve effectivement face à des spéciales beaucoup plus longues, des textures et paysages bien plus diversifiés au sein d'un même tracé et une physique héritée de DiRT Rally 2.0 qui a plutôt bien survécu au changement de moteur. Mais c'est sur ses performances techniques que l'expérience est dégradée et c'est ce qui empêche le jeu de pouvoir fêter dignement le retour de la licence WRC entre les mains de EA Sports. Joué sur PlayStation 5, le jeu nous est vite apparu difficile à parcourir, pas pour la difficulté inhérente au rallye, mais pour l'impact considérable de ses performances techniques sur les sensations et le plaisir de pilotage. En effet, d'un point de vue strictement orienté vers le framerate, le jeu souffrait à sa sortie de considérables baisses qui l'empêchaient de tenir les 60 images par seconde et d'un tearing omniprésent à l'écran. Si l'on pourrait éventuellement s'en accommoder dans d'autres jeux (même si cela est pénible à la longue), c'est difficilement pardonnable dans un jeu de rallye dans lequel le moindre ralentissement peut avoir un impact sur le rythme et sur la prise de décision manette ou volant en main, nous propulsant immédiatement en sortie de route. S'il y a bien un type de simulation de course sur lequel le framerate doit être impeccable, c'est le rallye. Le patch 1.03 a en partie corrigé le phénomène de screen tearing, mais le framerate reste quant à lui très hasardeux.

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Et c'est d'autant moins appréciable que visuellement, le jeu n'impressionne jamais. Il y a bien quelques bonnes choses dans les effets de lumière, malgré une sous-exposition dans les spéciales au crépuscule qui peut les rendre encore plus complexes qu'elles ne doivent l'être. Mais aussi sur la diversité et la qualité de la mise en scène tout autour des spéciales, avec les bruits de véhicules qui sont fidèles à la réalité, ses lieux plutôt bien reproduits et des textures variées qui empêchent le sentiment de croiser le même arbre à l'infini. Mais à côté, les effets climatiques ne sont pas à la hauteur, la distance d'affichage est bien trop réduite et les textures s'affichent souvent tardivement. On sent que de gros sacrifices ont été faits pour que le jeu puisse tourner malgré la longueur de ses tracés. Il serait facile de se contenter de ces sacrifices si les performances étaient à la hauteur, mais force est d'avouer que sa technique qui tient pas tout à fait la route. À tel point que les sensations si agréables offertes par une physique absolument maîtrisée depuis DiRT Rally 2.0 se heurte à un mur de petites choses qui rendent la conduite soudainement pénible. À quoi bon anticiper un virage si l'on risque d'avoir une fâcheuse baisse de framerate à l'entrée de celui-ci, nous faisant immédiatement sortir du rythme ? Un rythme si important dans un jeu de rallye où l'enchaînement, à haute vitesse, de virage serrés sur des terrains aux adhérences relatives ressemble souvent à une partition qu'il convient d'exécuter à la perfection pour ne pas perdre de précieuses secondes sur ses concurrents. 

Conclusion

La base est bonne, c'est certain. Héritier naturel des DiRT Rally, EA Sports WRC a tout ce que l'on a aimé à l'époque. La finesse du modèle de conduite, les qualités d'une physique où le challenge est permanent, mais aussi le sound design solide où les bolides ronronnent comme dans la réalité. Néanmoins, on ne peut pas décemment passer à côté d'errements techniques qui ont une influence considérable sur un gameplay qui mérite bien mieux. Aborder chaque virage avec la crainte d'une baisse de framerate inopportune est pénible, encore plus quand le screen tearing s'en mêle, provoquant une perte de repères sur des décors qui défilent très vite. Pour que l'on y retourne, il faudra attendre des mises à jour qui corrigeront - on l'espère - ces problèmes techniques, mais en attendant, il est difficile de s'investir dans le jeu et d'avoir envie de pousser les chronos autant que possible. Heureusement, quelques astuces et bidouillages partagés par la communauté permettent d'obtenir une expérience plus correcte sur PC, mais sur consoles, ce passage de l'EGO Engine (réputé pour sa stabilité) à l'Unreal Engine 4 n'est pas des plus glorieux.

Test réalisé par Hachim0n sur PlayStation 5 à partir d'une version fournie par l'éditeur.

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