Gamescom 2017 - Crowfall - Entretien avec les fondateurs d'ArtCraft et compte-rendu de l'état du jeu

Le MMORPG n’étant pas ma spécialité, ou plutôt ne l’étant plus, je fais partie de ces joueurs catégorisés « c’était mieux avant » : je n’ai pas suivi l’actualité de façon active, ces dernières années. Mais on n’était pas nombreux à la Gamescom et il serait dommage pour le public jolien de ne pas parler de l’essence même de notre communauté, le MMO.

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Quand je suis arrivé à l’enclos de Travian, qui édite Crowfall et héberge ArtCraft durant la Gamescom, je ne savais pas trop à quoi m’attendre.

Toutefois, depuis quelques mois, une étincelle de curiosité existe au plus profond de mon être, avec des projets qui souhaitent enfin briser la cristallisation du genre MMO, le faire évoluer et, comme c’était le cas sur chaque titre qui sortait au début de cet âge d’or, innover. C’est le cas par exemple de Camelot Unchained, Albion Online et… Crowfall. Et si mon vieux cœur de gamer souhaite un miracle avec le premier, mon intérêt logique se porte sur le dernier, car il est peut-être celui qui prend le plus de risque dans ses idées. Du coup, je me documente et me renseigne, sans toutefois prendre des risques et m’investir dedans, la déception EverQuest Next étant toujours marquée au fer rouge dans mon cœur ^^. Oui, Crowfall prend des risques. Et c’est nécessaire, le genre a besoin de se renouveler pour emboîter le pas à World of Warcraft et Final Fantasy XIV.

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Rencontre en haut lieu

 

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J’ai eu l’honneur de rencontrer Gordon Walton, fondateur et Président de Artcraft, accompagné de J. Todd Coleman, cofondateur et directeur créatif du studio, et de David Azria, directeur marketing de Travian, qui sont venus pour nous présenter en exclusivité les nouveautés du jeu, à ce stade de développement.

Après les présentations, Gordon commence doucement à poser les bases de son argumentation sur les raisons qui l’ont poussé à lancer un projet comme Crowfall. Leur ambition est vraiment de briser le moule dans lequel est figé l’univers de MMO, mais pour y arriver, ils préfèrent être plus rusés. De nombreux studios ont essayé de faire chuter le géant World of Warcraft, en essayant de produire un jeu à la hauteur du titre de Blizzard, mais pour cela, il a fallu investir des sommes faramineuses dans leurs projets et aucun n’a réussi à faire tomber, ni même faire trébucher le géant. Certains ont même signé leur arrêt de mort en tentant d’y arriver… Même Blizzard a annulé son projet de MMO en interne. Du coup, on se retrouve à la croisée des chemins, dans une période à la fois fascinante et excitante pour l’avenir des MMO et très enthousiasmante pour un Game Designer ; on retrouve les fondamentaux. C’est comme à nouveau entendre du Blues ou du Jazz après 10/15 ans ou seul le Rock’n Roll existait. On peut se permettre de prendre des risques, car il y a un public, tant au niveau des consommateurs que des éditeurs.

Crowfall, lui, a pris son risque majeur en lançant sa communication et son gameplay sur « un MMO où on peut gagner ».  Pas nous, l’individu, mais nous, la faction ou la guilde. L’idée est ici d’instaurer des objectifs et des scénarii différents d’une campagne à l’autre. Parfois, une guilde gagnera, parfois une faction, parfois une race, allez savoir. Dans ce monde de campagne, tout est censé être PvP et destructible. Du coup, en parallèle à ces serveurs de campagnes, des serveurs nommés « Kingdoms » existeront et seront propres à un individu.

Un serveur rien qu'à moi!

 

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Il pourra y créer sa propre ville, établir son propre craft pour le faire transvaser après vers les serveurs « campagne ». Les raisons de ce choix sont simples, en fait. Comme dans les serveurs campagne, tout est destructible, il est parfois frustrant de voir tout le travail qu’on a réalisé pendant des semaines détruit par des joueurs qui jouent dans d’autres fuseaux horaires que soi. C’est une cause de découragement pour un joueur et les développeurs en sont bien conscients. Donc pour éviter ce problème, ils ont préféré dissocier les deux. Néanmoins, sur les serveurs campagne, il faudra tout de même établir des forteresses et autres points d’intérêt. C’est juste une « protection » pour le joueur qui souhaite axer sa progression sur les métiers et non sur le PVP.  Et l’un n’ira pas sans l’autre.

Complémentaire, c'est le mot central du sujet

Au début, la communication était surtout basée sur le premier volet, mais cette partie, nous assurent les patrons d’ArtCraft, sera aussi importante et volumineuse en termes de gameplay que la première partie.

Les 2 seront complémentaires. Les joueurs favorisant le PVP seront évidemment concentrés sur les serveurs de campagne, tandis que ceux qui préfèrent le craft seront sur les serveurs de royaume. Mais, prenons par exemple les joueurs PVP, si ceux-ci veulent le meilleur matériel pour leurs personnages, ils ne pourront l’obtenir que des crafteurs basés dans les serveurs de royaume. Par contre, pour que les crafteurs puissent créer ces items, il leur faudra des ressources rares que l’on ne peut obtenir que dans les régions reculées des serveurs de campagne. Donc l’entraide entre joueurs sera primordiale dans ce jeu et c’est bien ce qu’on recherche dans un MMO. Les 2 serveurs forment l’entièreté du jeu, mais on peut choisir de se focaliser sur l’un des deux si l’on souhaite. Le fait d’avoir un serveur personnel permanent permet aussi d’éviter la déception de voir son « œuvre » disparaître au bout de quelques mois, lorsqu’une campagne s’achève et s’enchaîne avec la suivante.

L’autre grosse feature du jeu présentée était la construction, et la destruction, des bâtiments avec une physique mise à l’épreuve durant la démonstration. Il y aura tout un système de siège, qui n’a pas encore totalement fusionné avec les serveurs, mais ça ne saurait tarder. Les serveurs, qui actuellement ne sont ouverts que le week-end pour la campagne, seront bientôt ouverts 24/24 et 7/7 pour mettre à l’épreuve les campagnes. Les premières ne seront évidemment pas des campagnes de 3 mois ; on parle probablement d’une semaine pour la première, 2 pour la seconde, etc., mais on s’approche vraiment du jeu complet.

Quelle finalité ? 

 

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J’ai ensuite posé une question pour savoir quelle était la finalité du succès d’une campagne. Cela dépend de la campagne en cours. Parfois, les vainqueurs pourront « importer » certains objets pour la campagne suivante. Mais ce système pourra facilement être adaptable, pour éviter de voir toujours les mêmes l’emporter. Parfois, les perdants pourraient peut-être garder du matériel ou voir des parties de cartes de la nouvelle campagne dévoilées en avance. De quoi éventuellement équilibrer la donne.

Au niveau de la carte, justement, il est aussi très intéressant de savoir qu’on peut très bien être un explorateur, découvrir des nouvelles zones et éventuellement vendre ses découvertes à d’autres. C’est une profession louable et lucrative. Ils essayent vraiment de rendre toutes leurs features réelles et de ne pas promettre un aspect du jeu qui au final ne sera que de la poudre aux yeux. Prenons, par exemple, le fait de vouloir être un assassin. On ne parle pas ici d’une classe quelconque de DPS. Dans Crowfall, on peut se faufiler dans le château en face en furtif et tenter d’assassiner le commandant (PNJ ou joueur). C’est réellement un assassinat, donnant l’impression de mériter le nom d’assassin.

Dans la démonstration, on pouvait voir un exemple de campagne avec une campagne orientée trifaction : l’ordre, le chaos et les balances au milieu. La campagne ayant une deadline, les différentes factions doivent faire pencher l'équilibre en leur faveur, d’un côté le bien, de l’autre… le mal. Et les neutres, au milieu, doivent s’arranger pour que la barre reste dans le centre. Du coup, alliance, retournement de situation, trahisons… tout cela risque d’être de la partie ! D’autres exemples, qui seront mis à l’essai lors des prochaines campagnes : des campagnes avec 12 factions, une autre guilde contre guilde ou encore un combat entre plusieurs dizaines de factions avec annihilation de celles-ci possible durant la campagne ou un système de « punition » avec seulement 1 vie par jour, par joueur, ou 1 vie par semaine… Une infinité de possibilités est envisageable ; parfois ce sont des idées nouvelles, mais parfois aussi d’anciennes envies d’innovation ressortie des placards, maintenant que le public est en demande de neuf !  

Et on recommence à zéro à chaque campagne ? 

Ensuite, on a enchaîné sur le système de progression. À l’instar d’Eve Online, l’apprentissage se fera sur le temps réel et non pas sur le temps passé en jeu. Débloquer, acquérir une compétence demandera un certain temps, proportionnel au niveau de celui-ci, bien sûr. Cela permet à tous les joueurs de rester sur un pied d’égalité au niveau de la progression. Interloqué par ce choix, que personnellement j’approuve, EVE Online étant dans mon top 3 des MMO préférés, j’ai tout de même soulevé une question qui me semble importante pour l’avenir de Crowfall : n’ont-ils pas peur que le jeu rencontre un problème, à l’avenir, entre les nouveaux venus et les anciens joueurs, qui auront un niveau d’expérience que les nouveaux ne pourront jamais égaler ? Sur cette question, les responsables d’ArtCraft ont souri, car apparemment j’étais le premier à la leur poser. Ils y travaillent, mais dévoileront leurs idées ultérieurement.

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De toute façon, les joueurs devront se spécialiser : on ne pourra pas être bon en tout. Car apprendre toutes les compétences « à fond » demandera 34 ou 35 ans de temps réel pour pouvoir le faire. Au final, cette méthode d’apprentissage évitera la frustration des joueurs ayant un temps de jeu plus restreint de voir leurs amis atteindre des sphères de jeu qu’ils n’auraient pu atteindre par une progression « classique », surtout avec un système de campagne qui se reset régulièrement. Le nombre de possibilités rendra votre personnage unique et sera façonné par votre façon de jouer. Et cette obligation de spécialisation forcera aussi les joueurs à interagir entre eux. Quel est l’intérêt d’un MMO si, en tant qu’individu, on est le meilleur dans tous les domaines ? Pourquoi interagir avec les autres, si on est autosuffisant ?

Retour au Royaume

 

Après avoir montré ces quelques assets du système de campagne et de progression, on a basculé sur le serveur « Kingdoms ». Celui-ci peut donc être privé (seulement votre personnage et ses amis peuvent y entrer) ou public (on aura néanmoins une liste noire pour virer les indésirables) et choisir s’il y a du PVP ou non sur votre serveur. Dans le cas du non, d’éventuelles fortifications n’auraient qu’une utilité purement cosmétique.

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Le système de construction est évidemment le même que dans la partie campagne, mais on y trouve par contre tout le système de « terraformation ». Quand on active ce système, on voit qu’on peut modifier la carte avec un système de carrés qui s’emboîtent (un peu comme Tetris, si vous préférez) et qui sont, chacune d’entre elles, des éléments de décors. Tantôt une forêt, tantôt un temple ou une chute d’eau, une colline, etc. Du coup, quand vous changez cela sur la carte et que votre personnage regarde dans cette direction, le changement se fait instantanément. Pas besoin de recharger votre royaume. Pour créer ces « parcelles », il y a aussi tout un arbre de compétences, avec des recettes qui demandent des compétences et/ou des ingrédients nécessaires pour leur création. Tout revient toujours au craft. À tous les niveaux. Pour en revenir aux basiques, par exemple, on en aura besoin dès le début, pour crafter notre première épée, en allant d’abord se créer une pioche, une hachette, etc. pour récolter les premières ressources nécessaires pour la création de ladite épée. Les développeurs sont terriblement enthousiastes sur le craft dans le jeu. Ils disent qu’ils n’ont plus vu un craft aussi poussé depuis… 2005/2006 (sans mentionner la référence).

Un jeu ambitieux... mais à quel point ? 

 

En ce qui concerne le public du jeu, je leur ai posé la question de ce qu’ils attendaient, comme retour, au niveau du nombre de joueurs à la sortie ; quelles étaient leurs ambitions.

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Évidemment, autant que faire se peut ! Mais ils seraient déjà très heureux si tous les backers actuels continuaient l’aventure avec eux (43 000 backers, pour info). Au niveau des enregistrements sur le site, pour la bêta ouverte, cela oscille environ autour des 270 000 personnes. En gros, ils seraient heureux avec un public qui varierait entre 50 000 et 100 000 joueurs. Mais leur plus grosse envie, c’est que les backers, qui leur ont fait confiance, continuent l’aventure avec eux sur le long terme. Ils veulent que ceux-ci soient heureux et c’est surtout pour eux qu’ils veulent que le jeu soit une réussite, car ils ont cru en eux. Et puis, avoir un public « mondial ", en grosse quantité, n’est pas la priorité. Car ceux-ci vont sûrement venir pour des raisons qu’ils ne trouveront pas dans un MMO aussi « différent » que ce qu’ils ont connu ces 10 dernières années. Ceux-ci n’ont pas connu l’époque pré-WoW, donc cela sera trop différent, et ils pourraient déserter aussitôt, donnant une mauvaise réputation, faussée, au jeu. Mieux vaut la qualité que la quantité. D’ailleurs, c’est pour cela qu’ils ont mis le niveau aussi haut pour les backers, pour avoir accès au jeu : donner l’accès à trop de monde pour un jeu en conception, ce n’est pas spécialement l’idéal, pour les critiques. Les joueurs sont très volages et très durs, parfois. Mais savoir qu’il y a beaucoup de joueurs qui sont en stand by et en attente d’un messie éventuel les motive encore plus à garder leur ligne de conduite et à produire un jeu complet et de qualité. La fin du développement voit d’ailleurs de plus en plus de joueurs potentiels s’intéresser au jeu, comme en démontre le nombre de personnes qui s’inscrivent sur le site.

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Pour la taille du monde, elle évoluera d’une campagne à l’autre, selon les besoins. Actuellement, la carte de royaume fait 20x20 carré, chaque carré faisant 128m donc 2.56km x 2.56km => 6.5km² ; le serveur de campagne actuel est de 40x40, donc 5.12km x 5.12km => 26.2km².

Ce genre de données pourra varier d’une campagne à l’autre, l’avantage de faire des cartes avec des carrés de cette façon facilite évidemment les modifications ultérieures.

Les serveurs accueilleront à terme entre 2000 et 10 000 joueurs, mais ils n’y sont évidemment pas encore. Bien que cela ne les inquiète pas actuellement, cela fera partie des sessions de tests à venir. Les serveurs ne seront pas localisés donc les joueurs américains peuvent jouer avec les européens, s’ils le désirent.

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What's next ? 

Enfin, j'ai demandé quel était le programme pour les prochains mois.

Dans les prochaines semaines, on aura l'arrivée de la première campagne. Elle est déjà prête, mais ils règlent encore quelques bugs. Ensuite, ils veulent travailler sur les races et sur les classes, pour qu’elles soient toutes disponibles avant la sortie du jeu, car cela serait trop compliqué pour un jeu PVP de rajouter des nouveautés ultérieurement, avec tout ce que cela engendre comme modifications pour la meta du jeu. Plus de possibilités de customisations sont aussi prévues dans les prochaines semaines.

Une update majeure arrive également dans les prochaines semaines, qui expliquera en détail les systèmes d’apprentissage, permettra de savoir combien de compétences on pourra développer en simultané, etc. 

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Après tout cela, il ne restera que des petites features à ajouter, qui sont moins difficiles et risquées à intégrer dans le jeu, mais qui amélioreront l’expérience du joueur. Par exemple, les caravanes. Si vous voulez construire un château, il vous faudra des pierres. Ceux-ci prennent beaucoup de place dans un inventaire. Il vous faudra donc organiser une caravane entre la carrière de pierre et le chantier de construction. Cette caravane pouvant être attaquée par des joueurs, il faudra la protéger.

Ou encore : si je veux vendre des objets dans un magasin, pour le moment il faut être présent pour les vendre. Intégrer des marchands PNJ à qui on peut confier son matériel à vendre doit aussi encore arriver. Ou améliorer l’interface, faire un tutoriel pour les nouveaux joueurs… c’est ce genre d’améliorations qui doit encore arriver, une fois les campagnes lancées.

My 2 cent

 

La présentation s’est à peu près terminée la, et on a discuté encore un peu du jeu.

Plus tard, en dehors de la Gamescom, j’ai pu jouer à Crowfall pour essayer moi-même le jeu et ce que j’en ai vu m’a convaincu du potentiel du jeu et que ce qu’ils racontaient n’était pas que de vaines promesses. Ils sont vraiment occupés a rendre le jeu intéressant et innovant, le souci du détail se ressent vraiment. Il y a encore du travail, mais le gros œuvre est presque achevé et on peut imaginer ce que cela donnera une fois le produit fini. Pour ma part, je serai de l’aventure. J’espère que l’étincelle de curiosité que j’avais avant l’entretien, qui s’est vraiment attisée durant celui-ci, va développer l’espoir en concret. Wait and see… moi, j’attends les Nains :p

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