Test de Forgiveness – le Seven du pauvre
C’est durant son travail en tant que détective d’investigation au sein de l’armée israélienne que Noam Matan Rotem a eu l’idée de créer son propre jeu vidéo d’évasion. Une fois de retour chez lui, il s’est attelé à Unity et a passé un an à développer le titre Forgiveness.
Le genre, dérivé des jeux d’aventures et autres point’n click, est devenu particulièrement populaire en 2004 avec Crimson Room, un jeu japonais de Toshimitsu Takagi. Le concept a depuis été largement mis en pratique en grandeur nature avec les fameux escape games. Le jeu d’évasion a donc bien évolué et s’est considérablement étoffé : comment va s’en sortir Forgiveness à la suite de tels illustres aînés ?
Jus de Saw 7
La partie commence avec un test de personnalité. Diverses questions me sont posées et je dois choisir entre deux réponses à chaque fois. Au bout d’un petit moment, le jeu charge l’épreuve qui me correspond le mieux : ce sera donc la paresse.
Je me réveille dans une pièce austère. Une voix se fait entendre : le docteur Benjamin Smith se présente comme étant Dieu. Il m’explique qu’il a autrefois été un pécheur ; mais, heureusement pour lui, un événement lui a permis de se racheter. Et depuis, il s’est mis en tête de donner aux autres pécheurs une nouvelle chance. C’est ainsi que je me suis retrouvé ici, et je vais devoir en sortir en moins de trente minutes pour prouver que je suis digne de continuer à vivre.
Je fouille donc la pièce, je déplace quelques objets, je manipule des outils et je récolte divers indices. J’essaye de comprendre comment utiliser ces divers éléments ensemble et j’arrive vite à en déduire le code qui me permet d’ouvrir la porte.
Sans aucune réelle transition, je me retrouve dans un grenier aménagé, sombre et sale. Un compteur a commencé à s’égrener au coin de l’écran : les choses sérieuses commencent donc. J’attrape la lanterne voisine et, à nouveau, je fouine dans les recoins de mon environnement et j’active divers mécanismes. Une petite énigme apparaît alors et il ne me faut que peu de temps avant de comprendre l’allusion. Une petite manipulation et une clé apparaît. Fébrile, je m’approche de la porte de sortie : la serrure s’active et je sors de cette seconde salle.
« Félicitations ! Temps : quinze minutes. Appuyez sur le bouton pour retourner au menu. »
Que… Pardon ?
What’s in the box ?
Le mode histoire se déroule toujours de la même façon. Il faut d’abord répondre au questionnaire pour déterminer quelle épreuve sera soumise au joueur. La partie commence systématiquement dans la même salle, avec le monologue de ce cher monsieur Smith. La véritable épreuve se trouve dans la seconde salle. Et la partie se termine avec la résolution de cette dernière. Pas de grand discours de la part de votre ravisseur, nul épilogue : le jeu se contentera d’afficher votre temps à l’écran. Il en va de même si vous échouez : n’espérez guère plus qu’un simple écran de game over.
Le jeu s’inspire des sept péchés capitaux ; ce sont donc sept épreuves différentes qui vous sont proposées. Si vous ne voulez pas tâtonner avec le questionnaire pour découvrir les autres niveaux, n’ayez crainte : il existe également un mode libre qui permet de rejouer à la salle que l’on désire.
Deux niveaux de difficultés sont proposés. Le mode normal vous laisse autant de temps que vous voulez et un petit signal sonore retentit si vous examinez un objet nécessaire aux énigmes. Mais honnêtement, leur utilité est assez évidente pour la plupart. Le mode extrême, quant à lui, ne vous laisse que trente minutes pour sortir de la seconde pièce. À noter que la nature des énigmes ne change d’aucune manière entre les deux modes : si vous la résolvez en mode normal, ce sera en un éclair que vous en verrez la fin en mode extrême.
La difficulté des diverses salles est assez inégale. Certaines se terminent très rapidement et d’autres mettront votre sens de la logique à rude épreuve. Les énigmes peuvent consister à utiliser des objets aux bons endroits, déduire des codes et mots de passe ou à activer certains mécanismes.
I want to play a game
Les contrôles sont ceux d’un jeu à la première personne : déplacement du personnage au clavier et la vue à la souris. Il est également possible de s’accroupir et de sauter. Cependant, il vous faudra découvrir tout cela par vous-même car aucune explication n’est donnée à ce propos. Par exemple, ce n’est que mué par un bête réflexe de joueur de FPS que j’ai pensé à appuyer sur la touche « C », découvrant ainsi la possibilité de se baisser. Autre souci, les touches de bases sont adaptées à un clavier QWERTY et il n’y a aucun moyen de redéfinir les touches.
Les interactions avec les objets cependant sont clairement indiquées à l’écran. Le clic droit permet de lâcher un objet, la touche « E » permet de l’attraper ou de l’utiliser. Le clic gauche sert à examiner un objet ou à ouvrir les portes ou les placards. Autant dire que ce n'est pas très intuitif. Au centre de l’écran se trouve un pointeur blanc qui peut tourner au rouge quand vous ciblez un objet avec lequel interagir. Mais pas tout le temps.
Graphiquement, les environnements sont assez basiques, voire simplistes. Les salles manquent souvent de cette petite touche qui peut leur donner de l’authenticité. En l’état, on dirait plutôt un espace vide qu’on aurait simplement rempli avec quelques assets, surtout quand on retrouve des éléments identiques d’une épreuve à l’autre. Quelques bugs visuels sont parfois à noter, des objets qui disparaissent brièvement du décor selon la manière dont on se place.
Les bruitages sont fonctionnels et les musiques, sans être transcendantes, communiquent bien le sentiment d’urgence à sortir du piège dans lequel le personnage s’est fourré. La totalité du jeu est toutefois en anglais. En audio, il n’y a finalement que le monologue du bon docteur, et il ne sert pas à grand-chose à part planter le décor. Il sera toutefois nécessaire de pouvoir le lire afin de démêler certaines devinettes.
I'm your number one fan.
Une des principales déceptions avec Forgiveness est certainement que le jeu propose de raconter quelque chose, mais on se rend vite compte que le mode histoire n’est finalement qu’un vague prétexte : le postulat du dangereux maniaque qui se prend pour Dieu disparaît aussitôt la première porte franchie pour ne céder la place qu’à des salles qui contiennent quelques énigmes. De sa présence, il ne reste finalement qu’une caméra silencieuse qui suit le joueur du regard.
Il manque aussi une cohérence dans la succession des pièces : depuis la pièce de départ qui est tout à fait commune, on peut arriver dans un loft, un entrepôt ou encore la salle de sécurité d’un casino. Même le thème des sept péchés capitaux n’est finalement que légèrement exploité. Le rapport est souvent vague ou à peine premier degré : l’avarice dans le casino ou la gourmandise dans une cuisine, par exemple. Dans d’autres salles le lien est même moins évident à comprendre. L’ambiance globale est d'ailleurs plutôt sage, dans l’ensemble : il n’y a qu’une salle où il faut faire quelque chose d’un peu dégoûtant, et la scène est alors plutôt suggérée. Ailleurs, ce ne sera que quelques mots en lettres de sang ou des coins un peu crades.
Un autre souci est que le titre triche avec son joueur. Certaines interactions ne se débloquent qu’après avoir franchi quelques étapes ; ainsi, un objet qui semblait ne faire que partie du décor devient soudain un élément clé pour la suite. Par exemple, il est une salle qui se finirait assurément en deux ou trois minutes à peine si elle avait été dans un contexte grandeur nature ; mais dans la cadre d’un jeu vidéo, l’association pourtant évidente n’est possible que lorsque l’indice correspondant est enfin dévoilé. Ensuite, il y a la difficulté mal dosée. Pour être tout à fait honnête, votre dévoué testeur a échoué à venir à bout de trois d’entre elles : les indices présentés m’ont paru bien trop vagues et aucune des combinaisons qui me venaient à l’esprit ne semblait être la bonne. C’est dans ce genre de moment qu’on apprécie d’être plusieurs à être enfermés dans les jeux grandeurs natures : il y a toujours la possibilité qu’un autre esprit approche l’énigme autrement et en déduise la solution. Mais ici, nulle aide de qui que ce soit, pas de maître du jeu à veiller sur votre progression, aucun indice à débloquer comme on peut en trouver dans un Professeur Layton, par exemple.
À noter qu’une démo est disponible sur Steam. Il s’agit de la première salle, celle qui fait office de prologue. Mais si la mécanique présentée est en effet celle utilisée sur les autres salles du jeu, gardez en tête que la forme narrative disparaîtra aussitôt la première porte franchie.
Forgiveness a beaucoup à se faire pardonner : une réalisation un peu datée, mais surtout un mode histoire qui ne fait qu’effleurer sa promesse initiale. Les huit salles offrent un challenge inégal, mais aucune rejouabilité derrière. Sur ce marché très concurrentiel, il existe malheureusement beaucoup de titres de meilleure qualité, dont certains même gratuits, qu'ils soient ou non en réalité virtuelle.
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Plateformes | Windows |
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Genres | Indépendant, réflexion, contemporain |
Sortie |
28 février 2019 (Windows) |
Aucun jolien ne joue à ce jeu, aucun n'y a joué.
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