Test de CARRION – Un bon humain est un humain mort
Après Butcher, Phobia Game Studio revient avec un titre donnant à nouveau dans le pixel et le gore. Mais cette fois, nous œuvrons à terroriser les humains sous les traits d’une créature qui n’est pas souillée par la conscience, le remord ou les illusions de la moralité.
Sauver la veuve, l’orphelin et accessoirement le Monde, ça va un temps. Donc on finit par taper sur nos semblables. Mais le monstre, dans tout ça ? Où se situe la créature sanguinaire ? Comme cible, la plupart du temps. On peut aussi contrôler une abomination dans certains jeux multijoueurs au gameplay asymétrique ; mais dans ce cas, l’humain en face a tous les outils nécessaires pour tenir tête et résister au carnage. Non, ce n’est pas suffisant. Il est injuste que le monstre perde tout le temps, dirait Garoh. On doit pouvoir incarner une implacable horreur qui se repaît des cris de ses victimes. Il y a eu des jeux qui faisaient ça avec maestria : les Aliens vs Predator ou en tout cas les versions de 1999 (par Rebellion) et de 2001 (par Monolith). Mais le genre reste marginal. Heureusement, des représentants apparaissent parfois au détour d’un couloir sombre et c’est le cas de CARRION.
You are one ugly motherfucker !
Expérience qui a mal tournée ou créature captive, peu importe. Vous commencez enfermé dans un fût radioactif avec une seule et unique envie : sortir d’ici, fuir ces lieux. Masse informe de tissus vivants, vous devez ramper dans les conduits et crevasses pour progresser au sein d’un gigantesque complexe scientifique. Néanmoins, pour être plus efficace et plus résistant, il faut collecter de la biomasse. Et la meilleure source, c’est encore les employés qui vadrouillent ici ou là. Étrangement, ils ne sont pas vraiment d’accords.
En chemin, vous trouvez aussi d’autres fûts qui contiennent de l’ADN. Cette étrange ressource vous permet d’acquérir de nouvelles capacités, de progresser toujours plus loin et de tuer avec toujours plus de panache.
La structure du jeu a des allures de metroidvania : niveaux très tortueux et accès qui sont impossibles à franchir tant qu’on n’a pas trouvé le pouvoir adéquat. Cependant, le déroulement est dirigé de manière presque linaire : une fois sorti d’une zone avec votre nouvelle capacité, le passage qui vous était alors impossible ne se retrouver jamais bien loin. Le game design remet toujours le joueur sur les bons rails, ce qui évite de se perdre dans ces tortueux dédales à essayer de retrouver son chemin. Finalement, la seule raison de revenir sur ses pas et d’errer dans des lieux connus est la recherche d’un des fûts bonus facultatifs qu’on a peut-être loupé à la première visite.
Pour ce qui est du background (car il y en a un, même si très auxiliaire), on le découvre par le biais de petites séquences annexes dans lesquelles on contrôle un humain dont le groupe s’aventure dans des lieux mystérieux et abandonnés.
Its structural perfection is matched only by its hostility.
Le jeu se présente en 2D vue de côté (toujours cette vibe metroidvania). La créature se dirige avec le stick gauche, la visée (ou surtout le tentacule principal) avec le droit et les différentes capacités avec les gâchettes et autres boutons. Les pouvoirs possibles sont dépendants de la taille de la bête ; dans certains cas, il est nécessaire d’abandonner un peu de masse pour pouvoir franchir un passage.
Pour ce qui est des affrontements… Ah, qu’il est bon de débouler dans une salle en faisant valser le mobilier et de massacrer tous les employés qui y travaillaient sans qu’ils aient la moindre chance, même si certains tentent le coup avec leur ridicule petit pistolet. Il existe cependant des lieux qui bénéficient d’une meilleure protection : des gardes avec de puissantes armes et protections ou la présence de défenses automatiques, par exemple. Oh, il est toujours possible d’attaquer avec la force brute, mais il est souvent préférable de prendre ses adversaires en embuscade ou de leur tendre un piège. Les niveaux ont souvent des passages auxiliaires pour permettre d’autres approches et les outils offerts au monstre s’avèrent particulièrement variés. Et prendre ses ennemis au dépourvu peut être tout aussi jouissif que de traverser la pièce en un tourbillon de mort et de fureur.
Le déroulement peut pourtant paraître routinier : arriver dans une nouvelle zone, activer un certain nombre de points de contrôle pour ouvrir un nouvel accès et s’y rendre. Toutefois, la diversité des situations et l’ajout régulier de nouvelles possibilités entretiennent l’intérêt et le plaisir de jouer tout le long.
It's weird and pissed off, whatever it is.
La créature se dirige parfaitement et elle se déplace avec fluidité dans l’environnement, tout en laissant derrière elle des traces de matières putrides. C’est un délice de voir cet improbable amas de crocs et de tentacules grouillants progresser en s’étirant vers les parois comme un immonde mille-pattes. Côté animation, c’est une franche réussite. Le tout se déroule dans des décors bien détaillés et avec de jolis effets de lumière.
L’ambiance sonore est également parfaitement maîtrisée. Le monstre se déplace en un terrifiant frou-frou de matière organique, les victimes hurlent à notre apparition (et parfois un peu sans raison, mais bon), les corps se déchirent et tombent en un horrible bruit de chair. Les musiques ne sont pas en reste. Composées par Cris Velasco, elles participent à cette ambiance de film d’horreur.
Quand le monstre est un peu trop gros au cœur d’un passage étroit, il est parfois peu clair de voir quelle extrémité on contrôle, mais c’est assez anecdotique. La seule véritable tâche au gameplay se trouve dans les phases pendant lesquelles on contrôle un humain et en particulier au moment d’emprunter les échelles. Vouloir quitter l’échelle pour continuer sur la plate-forme est une horreur de maniabilité, le personnage ayant tendance à rester agrippé aux barreaux. Mais si c’est là le seul problème qu’on puisse trouver, ce n’est pas bien grave.
Bon, il y a bien un autre défaut. Une partie dure dans les quatre heures, un peu plus pour avoir le 100 %. C’est déjà un peu juste en temps normal, mais c’est douloureusement court quand on prend tant de plaisir qu’on dévore tous les niveaux avec avidité. C’est dans ces moments qu’on aimerait en avoir tellement plus.
CARRION nous place avec brio dans le rôle du prédateur ultime, celui de la créature qui décime tous ces pauvres humains sur son passage. Si vous avez toujours votre doudou xenomorphe avec vous, l’expérience est faite pour vous. On pourra bien sûr grimacer sur sa durée de vie (plus comme un junkie devant sa réserve vidée), mais l’ivresse est bien là.
Test réalisé sur PC par NeoGrifteR à partir d’une version fournie par l’éditeur.
Sur le même sujet :
Plateformes | Nintendo Switch, Windows, Xbox One |
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Genres | Action, survival-horror, futuriste / science-fiction |
Sortie |
23 juillet 2020 |
Aucun jolien ne joue à ce jeu, aucun n'y a joué.
Réactions (3)
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