Test de Scarlet Nexus - Les Autres voient rouge
Retour tardif sur le premier jeu de la toute nouvelle licence Action-RPG de Bandai Namco : Scarlet Nexus. Jeu futuriste misant énormément sur son système de combat original, voyons ce que vaut ce premier jet développé conjointement par une partie de l'équipe à l’œuvre sur la série des Tales of et par le studio vétéran Tose.
Développé par Bandai Namco et Tose sous la supervision de Kenji Anabuki et Keita Iizuka, tous deux issus des équipes à l’œuvre sur la série des Tales of, Scarlet Nexus est un Action-RPG se déroulant dans un monde futuriste, proche du cyberpunk - les auteurs lui préfèrent le terme brain punk -, où les humains sont majoritairement dotés de pouvoirs extra-sensoriels suite à la découverte d’une nouvelle hormone. C’est au même moment que des créatures tombées d’un nouveau phénomène apparu dans le ciel se mettent à attaquer les humains pour se nourrir de leurs cerveaux. Nommées les Autres, elles restent un mystère et afin de s’en défendre et de les exterminer, l’humanité a créé une nouvelle brigade militarisée dotée des meilleurs équipements, mais aussi d'individus ayant développé de puissants pouvoirs. Le nom de cette brigade ? La BEA pour Brigade d’Extermination des Autres.
C’est l’histoire d’une marche ratée de peu
Avant de commencer une partie, Scarlet Nexus vous propose le choix entre deux personnages : Yuito Sumeragi, fils du président de New-Himuka - une des villes fortifiées où se sont retranchés les humains -, et nouvellement engagé au sein de la BEA, ou Kasane Randall, fille adoptive de l’influente famille Randall et recrutée par la BEA pour la puissance et la maîtrise de son pouvoir. Contrairement à la majorité des jeux proposant d’incarner deux personnages différents, Scarlet Nexus ne se limite pas à un choix esthétique. Non, il va plus loin en offrant deux regards parallèles d’une même histoire avec pour chacun son lot de personnages et d’intrigues. Pour ceux qui se posent la question, on est très loin d’un Nier où la rejouabilité n’est pas simplement une option offerte, mais une nécessité, puisque l’histoire est construite autour de ce principe. Scarlet Nexus laisse le choix et le fait avec plus d’efforts scénaristiques que la très grande majorité des jeux, mais cela reste un choix et il n’est en aucun cas nécessaire de faire une seconde partie. Au mieux, cela rehausse l’intérêt de relancer le jeu après quelques temps afin de découvrir une nouvelle facette de l’histoire.
D’ailleurs, cette histoire, que vaut-elle ? Eh bien, elle s’en sort plutôt pas mal. Ce n’est pas de la grande écriture, mais l’univers a le mérite d’être original, même si on peut lui trouver une forte ressemblance à celle de Astral Chain, l’Action-RPG de PlatinumGames. Comme à l’accoutumé avec les jeux japonais, les personnages sont des archétypes ultra codifiés, donc vous ne serez pas dépaysés et retrouverez le classique balaise au grand cœur, la grande sœur protectrice, le frustré qui en veut au monde entier, le garçon manqué, la sociopathe, le rigolo de service, la timide et j’en passe. Et comme toujours, ils ont physiquement l’air trop jeune pour avoir perdu toutes leurs dents de lait sauf qu’ici, le jeu s’amuse avec les codes en expliquant que pour conserver ses meilleurs éléments au pic de leurs capacités le plus longtemps possible, la BEA arrête médicalement leur croissance. De ce fait, les plus jeunes physiquement sont parfois les plus âgés, même si ça ne les rend que rarement plus matures qu’une ado de 16 ans pour autant ; dommage, même s’il fallait s’en douter. Dans son ensemble, l’intrigue est intéressante et se laisse facilement suivre, cependant le rythme est parfois bancal avec un équilibre entre les phases de jeu et les phases de dialogues pas toujours très bien ajusté. De même, les dialogues ne sont pas cinématographiques avec des changements de caméra comme dans la plupart des jeux. Ici, les développeurs ont fait le choix de les présenter sous forme d’images fixes avec une partie texte surplombée de portraits animés. Par chance, ces dialogues sont entrecoupés de courtes cinématiques, mais ce choix d’interactions entre les personnages a tendance à casser le rythme et l’enjeu narratif. Par exemple, lorsque deux groupes ennemis se rencontrent et sont sur le point de s’affronter, vous avez effectivement une cinématique nerveuse pour introduire la situation, mais elle est suivie par une séance de dialogues en images fixes. Dans le meilleur des mondes, ils auraient utilisé un système de cases dynamiques dans la veine des mangas et autres comics, afin de retranscrire au mieux l’intensité de la situation. À la place, on a droit à des confrontations statiques sans vie et quand le jeu se met à devenir verbeux, toute la tension s’écroule. Si on ne peut pas jeter la pierre aux développeurs pour avoir tenté quelque chose d’original, il reste tout aussi difficile de ne pas être déçu par le résultat, qui dessert la narration alors que l’histoire n’est pas inintéressante, bien au contraire malgré les rebondissements visibles de loin.
Pour revenir aux personnages, sachez qu’ils sont centraux à l’histoire et il vous faudra souvent leur parler pour augmenter votre affinité et ainsi débloquer des améliorations utilisables en combat. Après chaque mission, vous avez l’occasion de revenir à votre base pour vous reposer, acheter des objets et surtout parler à vos compagnons, que ce soit en face à face ou via une interface de messagerie instantanée. Là encore, l’idée avait du potentiel, mais les développeurs ont de nouveau manqué le coche de peu, car s’il est toujours intéressant d’en savoir davantage sur les personnages que l’on côtoie et de faciliter l’attachement en tissant des liens avec eux, il faut que cela reste cohérent avec l’histoire et son univers ou il devient compliqué d’y croire - ce que l’on appelle communément la suspension consentie de l’incrédulité. Vous pouvez proposer l’histoire la plus loufoque possible, si vous restez cohérent avec votre univers, personne ne viendra vous chercher des poux, même si rien n’est réaliste. Dans le cas présent, on se retrouve très vite confronté à une situation où l’on ne peut plus croire ce qui nous est présenté parce que ça ne fonctionne pas, c’est bien trop illogique pour être recevable. Boire un café en parlant jardinage en compagnie d’un personnage devenu ennemi avec qui on s’est mis violemment sur la tronche durant la mission précédente, ce n’est pas normal, même s’il n’y a pas véritablement d’inimité entre eux.
Pour résumer l’aspect narratif de Scarlet Nexus : on est face à un joli travail sur un univers original et l’intégration des deux personnages principaux au sein d’une unique histoire captivante mérite que l’on s’y attarde. Toutefois, l’exécution manque de sérieux et de finition avec des sorties de piste qui gâchent en partie les efforts apportés pour offrir un jeu plus ambitieux que la moyenne chez l’éditeur nippon.
Balance ton poteau
Si Scarlet Nexus ne brille malheureusement pas totalement par son histoire, il en va autrement de ses combats. Nerveux, riches et complexes sans pour autant devenir ingérables et illisibles, ils sont la grande réussite de ce jeu. Profitant à fond de l’intégration des pouvoirs extra-sensoriels, vous pouvez vous en donner à cœur joie dans des combos en tout genre aussi bien au sol que dans les airs.
Première chose à savoir avant de commencer une partie : si chacun des deux personnages que vous pouvez incarner possède le même pouvoir de psychokinésie, ils se battent différemment ; Yuito préférant le corps à corps quand Kasane excelle à distance. Donc choisissez bien votre personnage en fonction de vos préférences. Dans l’utilisation de l’arme, le jeu est très basique et fonctionne sur des combos extrêmement simples à base de répétition de bouton ou d’appui long. Rien de bien compliqué, mais c’est là qu’intervient toute la richesse de la psychokinésie. Ce pouvoir qui s’utilise avec la gâchette droite vous permet d’utiliser les objets du décor pour les propulser sur les ennemis et ainsi créer des combinaisons avec votre arme pour rapidement les affaiblir ou briser leurs défenses. Ainsi, vous allez vous amusez à leur balancer des bancs, des caisses ou même des voitures et si vous vous y prenez au bon moment tout en leur assénant des coups de katana ou de couteaux en fonction de votre personnage, vous pouvez créer de nouveaux combos plus puissants. Attention toutefois, vous ne pouvez pas utiliser votre pouvoir comme bon vous semble. Vous avez une jauge, comparable à des points de magie, qui vous limite dans son utilisation, même si elle est facile à remonter via les attaques à l’arme. Vous constaterez aussi très vite qu’il vous est parfois possible d’utiliser la gâchette gauche sur certains objets. Se faisant, vous enclenchez une très courte QTE qui, si réussie, lance une puissante attaque ou un affaiblissement élémentaire. Car oui, vous pouvez utiliser des attaques élémentaires grâce à vos compagnons.
En effet, les combats se jouent à trois personnages, même si vous n’en contrôlez qu’un ; les deux autres sont gérés par l’IA à partir de modèles que vous pouvez définir entre attaquer le même ennemi, jouer défensif, offensif ou encore éviter l’affrontement. Chacun de ces compagnons possède son propre pouvoir parmi l’attaque élémentaire, le dédoublement, la téléportation, etc. Ces pouvoirs, vous pouvez en sélectionner jusqu’à quatre sur votre propre personnage pour les utiliser en combat et ainsi ajouter l’élément de foudre à vos attaques physiques par exemple, ou bien vous téléporter à l’ennemi le plus proche. Là encore, leur utilisation n’est pas illimitée, chaque pouvoir ne pouvant être activé qu’un certain temps.
En fonction de votre affinité avec vos différents compagnons, leurs actions possibles en combat s’améliorent. Ils pourront ainsi intervenir pour bloquer certains des coups qui vous sont portés, pourront être appelés via une combinaison de deux boutons pour lancer une attaque spéciale très efficace, etc.
Deux dernières aptitudes s’ajoutent à la liste, mais n’ayez crainte, elles ne complexifient pas le gameplay pour autant. La première est la poussée cérébrale, qui s’enclenche automatiquement lorsqu’une jauge dédiée se remplit après avoir porté ou pris suffisamment de coups. Cette aptitude rend votre personnage plus puissant pendant un certain laps de temps en vous octroyant divers bonus d’attaque, de déplacement ou encore d’amélioration de la psychokinésie. Ensuite, vous avez le champ cérébral, qui lui est contrôlé par le joueur et qui, une fois enclenché, propose une séquence de jeu un peu différente où votre pouvoir de psychokinésie est à son paroxysme, vous permettant de briser vos ennemis en un rien de temps.
Tout ça, c’est très bien, mais dans les faits, comment se déroulent les combats ? Il faut savoir que chaque créature a ses forces et faiblesses et vous apprendrez vite à les identifier et à profiter de vos pouvoirs pour n’en faire qu’une bouchée. Car il y a une chose en particulier sur laquelle vous allez vous concentrer : la jauge de pression. Se trouvant sous la barre de vie de l'ennemi, si celle-ci se vide, ce dernier se retrouve étourdi, ce qui vous donne accès à une attaque spéciale joliment mise en scène, qui l’élimine directement. Pour la vider, il faut attaquer les points faibles, donc des attaques élémentaires, des jets d’objets à des moments précis ou encore des attaques aériennes. Et cela vaut aussi pour les boss, à la seule différence que l’attaque spéciale ne les tue pas, mais grignote une bonne partie de leur vie.
Si la quantité d’actions disponibles peut faire peur, il s’avère qu’en jeu le système de combat reste intuitif et très agréable à prendre en main. La difficulté peut sembler légèrement ardue en début de jeu, même en mode normal, mais l’apprentissage des différentes aptitudes de votre personnage et du groupe renverse la tendance et vous donne véritablement le sentiment de progresser. Notons que malgré leur nervosité et dynamisme, les batailles restent fluides et lisibles, ce qui est rarement le cas dans ce type de jeux. Ne passons pas à la suite sans pointer du doigt le défaut le plus visible : les mécaniques du système de combat étant nombreuses, les tutoriels pour les expliquer le sont tout autant et vous risquez d’avoir le sentiment de jouer une intro pendant des heures et d’être submergés par de nouvelles informations. Par chance, elles sont relativement bien étalées et le jeu vous laisse le temps d’apprendre à maitriser chaque mécanique avant de vous en présenter une nouvelle.
Se battre avec style
S’il y a bien un autre point sur lequel les développeurs n’ont pas fait les choses à moitié, c’est la personnalisation, aussi bien dans la progression de votre personnage que dans son aspect visuel.
Pour faire progresser votre personnage, le jeu vous met à disposition la carte cérébrale, un arbre de talents très classique, mais suffisamment ouvert pour adapter votre avancée selon vos besoins. Débloquer des combos au sol, des combos aériens, étendre la jauge de pouvoir, augmenter les dégâts de la psychokinésie sur la jauge de pression de l’ennemi, augmenter le nombre de pouvoirs actifs provenant de vos compagnons et j’en passe, chaque augmentation fait progresser votre personnage de manière perceptible jusqu’à en faire une machine à éliminer les Autres. Il n’y a certes rien d’original dans cet arbre, mais il est très bien équilibré tout en vous laissant libre de faire vos choix selon votre manière de jouer. Toutefois, si je devais retenir un défaut à cette carte cérébrale, ce serait le fait qu’elle comprend des actions à débloquer que l’on aurait aimé pouvoir utiliser dès le début. Par exemple, se relever rapidement après un coup est une compétence à débloquer, ce qui est aberrant et peut rendre fou sur les premières heures de jeu.
Quant à l’aspect visuel, disons simplement qu’ils se sont lâchés. Tenues, et accessoires pour tout le monde et dans tous les styles. Vous voulez porter des lunettes d’aviateur tout en ayant des pattes de félin et des ailes d’ange ? Pas de problème ! Pour ce qui est de la manière de les obtenir, c’est tout simplement au marchand, qui sert aussi de point de sauvegarde. Grâce à lui, vous pouvez échanger des objets obtenus lors des missions, que ce soit au sol sur votre trajet ou sur les Autres, afin de débloquer l’utilisation d’un nombre impressionnant d’accessoires dans plusieurs couleurs différentes. On n’est peut-être pas au niveau de la Maison du Style, mais vous pouvez personnaliser votre groupe comme bon vous semble et leur donner un visuel qui vous correspond. Point important à souligner, les modifications visuelles sont affichées lors des cinématiques, des dialogues à plans fixes et même des écrans de chargement.
Agréable à regarder et à écouter
Sur le plan technique, Scarlet Nexus s’en sort avec les honneurs. Si le jeu accuse un certain retard technologique, il se rattrape par une direction artistique maîtrisée et impressionnante de créativité ; les artistes ayant clairement profité au maximum du contexte de monde régi par la réalité augmentée. Oui, les environnements ne sont pas originaux, puisque l'on parle de décors urbains, mais ils ont su mettre à profit leur imagination pour pousser plus loin, pour proposer quelque chose de propre et d'unique à cet univers. Quant à l’optimisation, elle est aux petits oignons et vous permet d’y jouer sur PC dans d’excellentes conditions, même avec une configuration modeste. Au pire, le jeu propose quelques options graphiques, même si trop peu nombreuses, comme à l’accoutumé avec la plupart des jeux japonais. Ne vous attendez pas à un jeu impressionnant techniquement, les limites d’un budget restreint étant clairement visibles, mais il a le mérite d’offrir de forts jolis décors, des ennemis originaux et des personnages très bien animés. Il semblerait que la version PlayStation 4 accuse des temps de chargement plus longs, mais sur PC avec le jeu installé sur un SSD, ils ne durent que rarement plus de 5 secondes, de même sur consoles next gen sur lesquelles le jeu affiche un 60 images par seconde quasi constant même sur Xbox One S ; la version la plus stable en dehors du PC étant sur PlayStation 5.
Parlons un peu musique pour finir. Là encore, Scarlet Nexus a été gâté avec de très jolies compositions de Hironori Anazawa, assez peu connu dans le monde du jeu vidéo, mais qui a œuvré sur des arrangements comme sur Pokémon Sword / Épée, Daemon X Machina ou Balan Wonderworld (oui, le fameux). Mélangeant habilement les styles et les genres (hip hop, trip hop, IDM, breakbeat, rock, instrumental et d’autres encore), le résultat est globalement réussi. Nul doute que Hironori Anazawa fera de nouveau parler de lui sur de futurs jeux.
Rappelons aussi que les doublages, de qualité, sont disponibles en japonais et en anglais ; les textes étant entièrement traduits en français.
Conclusion
Alors peut-on conseiller Scarlet Nexus ? À mes yeux, la réponse est oui, sans hésitation. Cependant, il ne plaira pas à tous, c’est une certitude. La direction artistique japonaise très marquée, la richesse du système de combat, la mise en scène des dialogues ou encore l’univers cyberpunk peuvent rebuter bon nombre de joueurs. Pour les autres, Scarlet Nexus est un jeu généreux sur ses 25 à 30h de durée de vie par personnage, qui ne manque pas de qualités malgré des erreurs de conception indéniables. L’histoire aurait mérité un meilleur traitement et un rythme plus équilibré, le relationnel entre les personnages tourne parfois le dos à la cohérence et il faut bien trois à quatre heures de jeux pour commencer à débloquer des aptitudes que l’on aurait aimé pouvoir utiliser dès le début, ce qui rend les premiers combats inutilement laborieux. Toutefois, au-delà de ces défauts, Scarlet Nexus offre un univers captivant, des personnages certes clichés, mais attachants, des décors réussis, une bande originale de qualité et surtout des combats jouissifs pour peu que vous acceptiez de trainer légèrement des pieds au début.
Scarlet Nexus n’est peut-être pas un grand jeu, mais c’est un bon jeu qui vaut le détour. D’autant plus sur PC où il est vendu 49,99€ contre 69,99€ sur consoles.
Test réalisé par Lianai à partir d’une version Steam fournie par l’éditeur.
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Plateformes | Xbox One, Xbox One X |
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Genres | Action-RPG, fantasy |
Sortie |
25 juin 2021 |
1 jolien y joue, 1 y a joué.
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