Test de Signalis – Komm, süsser Tod

Halloween approche, date propice aux jeux qui mettent mal à l'aise et qui font peur. C’est en cette période qu’arrive Signalis, premier jeu du studio rose-engine qui était apparu sur nos radars lors du festival Tribeca en 2021, attente confirmée par sa démo de juin dernier. Voyons voir ce que vaut la version complète.

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Nous dirigeons une Replika, une androïde dotée d’une copie de conscience humaine (thème récemment abordé par Citizen Sleeper, d’ailleurs). Notre personnage se réveille de son réveil cryogénique à bord d’un vaisseau du programme Penrose. Mais l’engin semble s’être écrasé sur une planète glacée et il faut retrouver notre coéquipière qui semble avoir disparu entre temps. À moins que ce soit une Replika qui recherche une sœur d’arme au sein de la station Sierpinski. Ou alors une Gestalt qui a perdu de vue son amie ?

Quoi qu’il en soit, notre personnage est en quête de quelqu’un. C'est au joueur de l’aider et surtout d’essayer de comprendre ce qu’il se passe ici. Car il s’avère vite que les choses ne tournent plus vraiment rond dans ce complexe high-tech.

Achtung baby

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Signalis se présente comme un hommage aux jeux de la fin des années 90 (Metal Gear Solid, par exemple) : personnages en gros polygones, textures sommaires, décors fixes (mais toujours le même angle de caméra, à part pour quelques séquences en vue à la première personne)… Pour ceux qui veulent pousser un peu plus loin le vice, le jeu propose l’option de l’infâme maniabilité “tank”. Heureusement, les gens de rose-engine ne veulent pas non plus nous torturer (pas comme ça, du moins) : une maniabilité bien plus actuelle est également disponible. 

Puisqu’on est dans l’aspect technique, il faut souligner le beau travail sur le design sonore. La plupart du jeu se fait en bruit environnemental ; la musique ne se déclenche qu’en cas de danger ou sur certains moments de la narration. Et cette dernière se partage entre le sage classique et l’anxiogène électronique.

Manette en main, la référence qui transparaît le plus reste quand même le premier Resident Evil. Au delà de l’exploration de lieux ravagés par des sortes de zombis, on y retrouve les ressources extrêmement limitées, la progression ponctuée de puzzles, la possibilité de combiner des objets (dont les produits de soin), l’obligation d’aller jusqu’à un endroit précis pour sauvegarder (mais ici sans limitation) ainsi que d'accéder au coffre pour y ranger les objets en trop (et accessible depuis divers lieux).

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Fidèles au genre, les ennemis se dirigent vers votre personnage en traînant lentement la patte. Il faut donc les mettre en joue, attendre suffisamment que la visée se stabilise et faire feu. Mais comme dit, les munitions peuvent se faire rare. Surtout qu’un monstre à terre peut très bien se relever un peu plus tard. Il faut donc user de ses outils avec parcimonie et parfois préférer une approche discrète ou simplement la bonne vieille méthode de la fuite, les jambes à son cou. Nous sommes vraiment revenus aux prémices du genre : les adversaires ne passeront pas les portes pour continuer la poursuite. Ça se corse peut-être un peu sur le dernier tiers avec des salles exiguës surpeuplées d’affreux, surtout que la visée devient un peu capricieuse quand il y a du monde en face. Au pire, on peut changer entre les trois niveaux de difficulté : normal, relax et survie.

Le côté vieillot se retrouve également dans la progression. Arrivé dans une zone, il vous faut l’explorer et ainsi croiser moultes portes verrouillées et mécanismes à activer. Vous finissez alors par trouver un objet qui débloque le placard qui donne accès à une clé afin d’ouvrir la porte derrière laquelle est l’outil qui vous permet d’attraper le truc qui vous donne accès au machin. Vous êtes alors partis pour des aller-retours incessants dans le secteur, à louvoyer entre les androïdes belliqueux et avec quelques détours afin de sauvegarder ou simplement de récupérer dans le coffre une babiole nécessaire à la suite. Car oui, un inventaire de seulement six petites cases, dont la moitié occupée par les soins, une arme et quelques munitions, s’avère être horriblement limité. Le tout donne parfois l’impression de rallonger artificiellement l’expérience. Et le fait que les couloirs de la base ont tendance à se ressembler n’aide pas à adoucir ces pérégrinations.

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Cependant, au milieu de ces bonnes vieilles quêtes fedex, on tombe régulièrement sur des énigmes et ces dernières sont diverses et plutôt bien fichues : de la logique, de la manipulation de machines, de l’exploitation d’indices. Notre personnage est équipé d’un récepteur AM/FM et certains puzzles reposent sur ces manipulations de fréquence ; l’idée est plutôt sympa, mais malheureusement pas assez exploitée.

Sur votre trajet sont disséminés un peu partout dans le décor de nombreux textes qui permettent de découvrir un peu plus ce monde dans lequel on évolue. Quelques cinématiques ponctuent également la progression. D’ailleurs, pour ceux qui avaient tenté la démo, sachez que le début de l’aventure est légèrement différent : l’action n’arrive qu’un peu plus tard, amenée plus progressivement.

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Yakusoku da yo

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Signalis a vraiment un charme à part.

Nous n’avons pas ici de l’horreur tape à l'œil ou à base de quelques hectolitres d’hémoglobine. Nous sommes plus dans l’horreur psychologique, dans l’ambiance pesante et inquiétante. Quelques ennemis peuvent provoquer des jump scares, du moins lors des premières rencontres, mais ce n’est vraiment pas une habitude de cette narration.

Les diverses illustrations sont dans un style manga, mais plus dans un style occidental comme pouvait l’être Oni en son temps. Le résultat est agréable ; mais, même si c’est cliché à dire, les visages des différents protagonistes se ressemblent quand même beaucoup, au final.

Néanmoins, si les références aux classiques de l’animation se remarquent au fil de l’aventure, c’est quand même Evangelion qui se démarque le plus avec ses séquences entrecoupées d’images perturbantes et de gros kanjis, le tout sur de la musique classique bien trop douce pour ce qu’on nous raconte. Et encore une fois, le mélange est maîtrisé et fonctionne parfaitement.

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À tout cela s’ajoute l’allemand. Les auteurs sont de Hambourg et ils le font savoir. Les affiches, les panneaux, les indications sur les murs : la plupart sont en langue teutonne. Cela change agréablement des habituelles inscriptions en anglais qu’on rencontre généralement dans ce genre d'œuvre. La langue se retrouve également dans certaines invectives lancées au joueur. N’ayez crainte, l’essentiel est quand même traduit en français via les sous-titres ou autres fenêtres de dialogue. Inutile de faire appel à vos souvenirs de LV2. Et au final, cette particularité ajoute du caractère à ce titre qui en avait déjà tellement.

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Oh, wie schön ist Signalis

Signalis est disponible sur PC, Switch, PlayStation 4 et Xbox One. Il a été testé ici sur la console de Nintendo sur laquelle il tourne parfaitement. En mode nomade, le tactile n’est pas exploité et l’image est alors un peu trop sombre (sur la non-OLED, en tout cas). On appréciera en particulier le mode veille des consoles qui permet d’arrêter de jouer sans devoir courir vers le point de sauvegarde le plus proche. Une partie dure une douzaine d’heures et plusieurs fins sont possibles. La traduction française est très propre ; quelques visuels en anglais ou allemand ne sont pas traduits, mais c’est alors limite de la décoration, donc rien de gênant pour la progression.

On a ici un bel hommage aux années PS1, mais adapté aux goûts du jour. Le studio montre une belle maîtrise dans la narration avec une ambiance inquiétante et des visuels marquants. Son grand défaut serait finalement ces aller-retours un peu trop présents ; mais vous pourriez pardonner cet écueil si jamais vous vous faites happer par son intrigante histoire. Danke schön, rose-engine !

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Test réalisé sur Nintendo Switch par NeoGrifteR à partir d’une version fournie par l’éditeur.

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