Test de Need for Speed Unbound - Révolution de pacotille

Après avoir lâché la série des Need for Speed en faveur de Ghost Games, le studio britannique Criterion Games revient sur la licence avec l'espoir d'y insuffler une nouvelle dynamique. Et c'est pas un mal, car aussi volontaire qu'était le dernier titre en date, Need for Speed Heat, celui-ci montrait clairement un essoufflement de la formule. Plus surprenant, Need for Speed Unbound est sorti début décembre, à peine deux mois après son annonce officielle. Si l'éditeur et le studio veulent certainement profiter de l'effet de surprise généré par son annonce tardive, c'est un autre élément qui attire l'œil : son curieux univers visuel.

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Un air de renouveau

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Le premier contact avec Need for Speed Unbound est similaire à la surprise de son annonce : dès les premiers instants, impossible d'ignorer le virage pris par la licence sur le plan visuel avec un parti pris esthétique très intéressant. Autrefois attaché à des graphismes qui recherchaient un simili-photoréalisme, NFS Unbound nous propose un mélange entre un aspect très cartoon avec une pointe de cel-shading sur les personnages. Les véhicules, quant à eux, bénéficient de couleurs vives et contrastées qui évoquent la volonté de faire le liant entre les décors plus classiques et les personnages en cel-shading, sans forcément tomber dans ce que faisait un Auto Modellista en son époque. Le jeu y ajoute toutefois une multitude d'effets de particules remplacés par des animations sorties de planches de BD ou d'animation plus cartoon, symbolisant la fumée générée par les pneus lors de dérapages, des ailes qui se matérialisent à l'écran lorsqu'on saute grâce à une rampe ou encore le nitro qui est l'occasion de faire fleurir plus de couleurs à l'écran. Les contours des personnages et voitures sont épais, tandis que la ville avec son apparence plus classique semble bien morne, notamment la journée, tandis qu'elle éclate de reflets lumineux et de néons dans certaines zones la nuit, où le jeu révèle l'essentiel d'une direction artistique très inspirée par les couleurs du bon vieux NFS Underground. On aurait aimé, toutefois, que le jeu assume un peu plus cette patte graphique, avec peut-être des véhicules un peu plus dessinés, ou des décors plus éclatants. Il y a un manque de liant finalement entre tous les effets très cartoon autour de la voiture qui détonnent avec une ville qui ressemble en tous points à n'importe quelle ville explorée dans un Need for Speed ces dernières années.

Passé cet étonnant premier contact, le jeu nous plonge dans une histoire qui semble suggérer une narration forte et très balisée, sur fond de rivalités entre pilotes de courses illégales et de courses poursuites avec la police. Pas vraiment intéressante, cette histoire souffre d'une écriture vaine qui n'arrive pas à apporter l'intensité dramatique qui aurait été nécessaire pour donner de l'intérêt, sur le long terme, pour le destin de ses personnages. Bien qu'un ou deux personnages bénéficient d'une caractérisation correcte, ils finissent tous par donner le sentiment de n'être que des éléments du décor, des intermèdes qu'on a vite tendance à trouver rébarbatifs entre deux journées d'activité au sein de la ville. Et c'est d'autant plus compliqué de s'y intéresser que le jeu est assez long, celui-ci demandant bien un grosse vingtaine d'heures pour voir le bout de l'histoire, alors qu'il est facile de se désintéresser de l'histoire au bout de deux ou trois heures. Néanmoins, le titre tente de garder une dynamique en faveur de la narration, limitant légèrement l'utilisation de son monde ouvert et la liberté inhérente au genre, puisque le jeu offre assez peu d'activités "à la carte". En effet, toute la progression se compose selon un calendrier avec quelques dates de compétitions clés auxquelles l'on doit participer, à condition d'avoir obtenu une voiture de la bonne catégorie de puissance quand c'est nécessaire, obligeant à axer notre progression sur une poignée de courses mises à disposition chaque jour et chaque nuit. Cela change pour le coup complètement des précédents NFS qui nous donnaient une totale liberté sur la carte du jeu, avec de nombreuses activités accessibles à tout moment, permettant d'avancer au rythme que l'on souhaitait. 

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Et ce n'est pas toujours évident, car les journées et les nuits offrent des activités différentes, la nuit étant réputée plus dangereuse avec une police souvent plus virulente. Plus encore, enchaîner des activités dans la même journée peut considérablement faire progresser le taux de recherche par la police, qui s'accumule jusqu'à la journée suivante où il est remis à zéro. Similaire à ce que serait par exemple le système d'étoiles d'un GTA, plus l'on progresse dans les paliers, plus les moyens mis à disposition de la police sont conséquents. À tel point qu'une fois rendu au niveau 3 ou 4 de recherche, il devient difficile de faire une course sans être harcelé et il est plus dur encore de leur échapper pour pouvoir rentrer au garage et mettre un terme à la journée. Cependant, il est pourtant nécessaire d'enchaîner, car il faut gagner pas mal d'argent en course pour pouvoir faire progresser la voiture et être prêt à temps pour les compétitions spéciales qui sont définies comme objectif, dès le début du jeu, sur le calendrier. Côté courses, on ne s'attardera pas sur le gameplay, car il est extrêmement similaire aux précédents NFS avec des voitures assez lourdes, mais facilement maniables, à l'exception que les drifts ont été rendus considérablement plus faciles à utiliser, permettant au jeu d'insister encore un peu plus sur les effets visuels qui se déclenchent à chaque drift. Le jeu incite d'ailleurs à la prise de risque en utilisant ce type de manœuvre puisqu'elles permettent à la fois de remplir la jauge de nitro, mais aussi de bénéficier d'un léger boost de vitesse. 

Attirant mais exigeant

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Plus surprenante encore que sa direction artistique, la difficulté du jeu étonne. Même pour moi qui suis un habitué de jeux de courses infiniment plus exigeants, NFS Unbound présente un challenge assez important en se montrant assez difficile dès son mode normal et franchement impitoyable dans le plus haut niveau de difficulté. Mais attention, je ne parle pas là de la difficulté de la conduite (qui, comme dit plus haut, est très accessible), mais des pilotes gérés par l'IA qui ont tendance à souffrir d'une sorte d'effet "Mario Kart", avec des courses pendant lesquelles on a du mal à jauger de la vitesse réelle et des compétences de l'IA tant certaines voitures semblent soit nous attendre (pour qu'on ait une chance de les rattraper) soit bénéficient soudainement d'une accélération considérable pour pouvoir nous rattraper alors que l'on s'est déjà échappé en tête. Très artificielle, cette difficulté était déjà observée dans de précédents jeux NFS, mais il suffisait souvent d'avoir des véhicules bien plus puissants, ce qui n'était pas toujours compliqué selon l'abondance de récompenses. Néanmoins, pour NFS Unbound, la progression est assez lente avec une rémunération assez timide en début de partie sur les courses gagnées, avec une insistance sur le pari : les courses les plus rémunératrices sont celles qui coûtent cher pour s'y inscrire, quitte à perdre de l'argent si on ne termine pas dans le top 3.

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L'équilibre est donc précaire et rend le jeu parfois frustrant, tant pour ses courses que pour une progression qui traîne la patte sans que la narration de son côté parvienne à compenser les moments de creux. Heureusement, il y a un vrai sentiment d'accomplissement quand arrive enfin le moment d'apporter des améliorations aux voitures, qu'il s'agisse de modifications visuelles avec des kits de carrosserie et des livrées à créer (ou à télécharger sur le store de la communauté) ou d'améliorations relatives à la performance avec un certain nombre de pièces à acheter pour augmenter la puissance brut de la voiture. Soit pour dominer une catégorie, soit pour faire progresser la voiture vers les catégories supérieures, ce qui est souvent une bonne idée plutôt que d'en acheter une autre. Et c'est d'autant plus grisant que l'on ressent immédiatement la puissance qui augmente à mesure que la voiture est améliorée, juste de quoi donner un vrai sentiment de progression, que le jeu peine à offrir sur ses courses très rébarbatives (avec des tracés qui se répètent souvent malgré la taille assez importante de la ville) et ses récompenses un peu radines. C'est d'autant plus dommage que le titre rate ces quelques éléments, car il y a une base franchement sympathique, qui marque une vraie volonté d'apporter un renouveau à la série et qui aurait peut-être mérité un peu plus de réflexion pour éviter de tomber dans la routine habituelle des Need for Speed.

Conclusion

On salue grandement l'effort fait par Criterion Games qui, en reprenant la licence, a apporté de belles idées, notamment visuelles en réinventant l'aspect esthétique d'une licence qui a longtemps stagné sur ce point. La révolution n'est toutefois pas complète, avec un fond finalement assez similaire à ses prédécesseurs, ratant même le coche du côté d'une difficulté parfois frustrante et d'une courbe de progression si lente que l'on a du mal à aller jusqu'au bout. On apprécie la volonté de proposer une narration forte pour donner un vrai sens à toutes ces courses de rue que l'on enchaîne, mais l'écriture pèche et ne parvient pas à tenir en haleine sur la grosse vingtaine d'heures nécessaires pour espérer en voir le bout. Alors on aime l'initiative, qui va clairement dans le bon sens pour la série des NFS, mais il manque un petit quelque chose pour véritablement le hisser un peu plus haut que ses prédécesseurs.

Test réalisé par Hachim0n sur PlayStation 5 à partir d'une version fournie par l'éditeur.

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