Test de Persona 3 Portable : Je confesse que je voulais FES
Sorti sur PlayStation Portable en 2009 en tant que portage du jeu originel sorti sur PlayStation 2 en 2006, Persona 3 Portable revient en version haute définition dans le cadre des 25 ans de la série en compagnie de son petit frère Persona 4 Golden. Développé initialement pour un support portable, cette version était-elle le choix le plus judicieux ? Retour sur un monument du J-RPG.
Pour ceux au fond de la classe, Persona est une licence de J-RPG ayant débuté en 1996 comme spin-off de la très ancienne série des Shin Megami Tensei. Se déroulant toujours dans un Japon contemporain, nous y suivons généralement les aventures de lycéens - à l’exception du second épisode -, aux prises avec des forces maléfiques qu’ils combattent à l’aide de Personae, créatures fantastiques issues des mythologies asiatiques et européennes. Sombre et violente, la série est surtout réputée pour traiter de sujets graves de société comme le viol, la manipulation, le harcèlement, l’homophobie ou encore la pression sociale.
Dans le cadre des 25 ans de la licence Persona, Atlus a lancé une vague de portages de ses épisodes les plus populaires. Ainsi, ce ne sont pas moins de trois épisodes qui débarquent les uns après les autres sur la totalité des supports actuels, de la Switch aux PC en passant par les consoles Xbox et PlayStation, dans des versions techniquement mises à jour et affublées de quelques améliorations appréciables. Et JeuxOnline les a bien entendu testés pour vous !
Sur ce, passons au test de Persona 3 Portable :
Am stram gram
Dans le cadre des 25 ans de la série Persona lancée en 1996 sur PlayStation, Atlus a décidé de porter une partie des jeux sur les supports actuels. Si on a déjà pu profiter de celui de Persona 5 Royal au mois d’octobre dernier, c’était aux tours de Persona 3 et Persona 4 de continuer la danse dans des versions adaptées aux résolutions actuelles et traduites dans différentes langues dont le français. Si le retour de Persona 4 Golden n’était pas surprenant, puisqu’un portage, non traduit, existait déjà et profitera d’ailleurs d’une mise à jour gratuite, celui de Persona 3 est une première ou plutôt, une première dans sa version Portable. Sortie en 2009 sur PlayStation Portable, cette version apportait essentiellement deux grands changements par rapport à la version d’origine : le choix du personnage principal entre un garçon (héros de base) et une fille (la nouveauté), ainsi que la suppression des déplacements hors donjons au profit d’un système plus proche des visual novels à base d’écrans fixes et de balises pour lancer les discussions ou changer de lieu. Le choix du personnage principal modifie assez peu l’expérience et offre avant tout la possibilité aux joueuses et joueurs de parcourir cette aventure à travers les yeux d’un garçon ou d’une fille, avec ce que cela implique comme changements dans les relations sociales. De plus, ce choix ouvre aussi la possibilité de changer un personnage féminin (Elizabeth) en un personnage masculin (Théodore). Toutefois, ce ne sont pas les seules modifications qui ont été apportées, puisque les cinématiques animées ont été purement et simplement supprimées. C’est aussi la seule version de Persona 3 qui permet de contrôler tous les personnages en combat, entraînant d'ailleurs un léger ajustement de l'équilibre, ou encore de profiter des cartes de compétences afin de personnaliser les Personae.
À ce stade, vous êtes déjà en droit de vous demander si le choix de Persona 3 Portable était le plus judicieux, mais ce serait oublier une dernière version : Persona 3 FES. Si cette dernière est un portage stricto sensu du jeu d’origine, elle comprend aussi tout un chapitre supplémentaire appelé The Answer se déroulant après la fin du jeu. Et voilà tout le dilemme avec d’un côté une version portable amputée d’une partie du contenu, mais aux mécaniques les plus à jour et au choix du personnage principal, et de l’autre une version plus complète, mais au gameplay plus archaïque et au héros imposé. Alors, qu’est-ce qui a convaincu Atlus de choisir Persona 3 Portable ? La réponse pourrait très bien se trouver ailleurs, très loin des considérations de contenu ou de gamplay : la facilité de portage. En effet, Persona 3 Portable propose nativement le format 16:9 qu’utilisent aujourd’hui la très grande majorité des écrans et si Persona 4 Golden prenait déjà en charge ce format sur PlayStation 2, ce n’était pas le cas pour Persona 3 et FES dont la conversion aurait forcément pris plus de prendre du temps, tout en augmentant les risques de soucis techniques. Donc nous voilà aujourd’hui face à la mouture haute définition de Persona 3 Portable pour le bonheur des uns et le malheur des autres.
Minuit une
Dix ans après le tragique accident ayant coûté la vie de ses parents, votre personnage revient dans la ville où s'est déroulé le drame afin de commencer sa nouvelle année scolaire au lycée Gekkoukan. Alors qu’il se dirige vers son dortoir en pleine nuit, il est témoin d’un étrange phénomène, déclenchant le début d’une longue aventure durant laquelle il va découvrir que les pensionnaires du dortoir ne sont pas des êtres comme les autres, que minuit ne sonne pas le début d’une nouvelle journée et que lui-même possède un pouvoir fantastique lui permettant d’invoquer des êtres extraordinaires : les Personae. Embarqué malgré lui dans un combat l’opposant aux Ombres, créatures se nourrissant de certaines âmes humaines, il doit parcourir l’interminable tour du Tartare en compagnie de ses amis pour mettre fin à ce cauchemar éveillé.
Si la série des Persona est aujourd’hui connue pour traiter de sujets graves liés à l’adolescence et au conflit générationnel, comme le harcèlement, le viol, l’homosexualité, la pression sociale ou encore la manipulation, c’est essentiellement grâce à Persona 4 et 5. Avant cela, les sujets étaient plus dilués au lieu de servir de chapitrage pour des mini histoires et donjons dédiés. Ne soyez donc pas étonnés de ne pas voir de boss issus des peurs les plus enfouies de nos chères têtes blondes ou de ne pas avoir d’ennemis clairement identifiés à détester dès le début du jeu. Persona 3 prend son temps pour installer son histoire, présenter ses protagonistes et antagonistes avant de servir son lot de twists pour relancer la tension. Nuls doutes que cela ne plaira pas à tous les fans des deux épisodes suivants, qui pourraient s’attendre à une structure similaire. Toutefois, ne pensez pas que Persona 3 est moins intéressant pour autant. Certes, il se concentre moins sur les pires aspects de notre société et peut sembler plus classique dans le lot des univers fantastiques, mais en aucun cas cela n’entache le charme de ce jeu. Les personnages sont attachants et très bien écrits, le rythme est intelligemment maîtrisé malgré sa lenteur et l’univers est suffisamment captivant et original pour ne pas donner la désagréable impression de déjà-vu. Persona 3 se rapproche plus de ce que pourrait être un épisode de La Quatrième Dimension où un individu lambda découvrirait qu’il existe une 25ème heure cachée nommée « l'Heure Sombre » durant laquelle les humains sont transformés en cercueils. Et puis mince, comment résister à l’adorable Konomaru ?
Clic bête
Comme dit plus haut, c’est Persona 3 Portable que vous avez entre les mains et cela implique quelques changements en comparaison de ce que pourriez avoir l’habitude de jouer. Si pour vous un J-RPG signifie déplacer son personnage dans des décors en 3D ou même 2D pour certains, vous aurez un léger choc dès les premières minutes. Exit les déplacements et bienvenue aux décors fixes ornés de balises à cliquer pour activer un dialogue ou un changement de lieu à la manière d’un visual novel. Si cela peut dérouter durant les premières sessions de jeu, on s’y habitue assez vite et ceux qui pestent des allers et retours incessants seront ravis d’apprendre que ce choix de design vous fait gagner une bonne dizaine d’heures face au Persona 3 original. On pourra tout de même regretter que cela renforce l’impression de faire encore et toujours les mêmes gestes, de faire du clic bête et méchant en attendant l’heure de pénétrer dans la tour du Tartare.
N'ayez crainte, le jeu ne devient pas ennuyeux pour autant et les nombreuses relations à entretenir vous donneront de bonnes raisons de continuer. Car oui, Persona 3 Portable étant un Persona, il vous faut améliorer vos relations avec différents personnages à travers les S. Link pour accroître la puissance des Personae créées ou invoquées. Ainsi, vous pouvez passer du temps avec Rio, la membre du club de tennis, Junpei, le jeune idiot au grand cœur du dortoir, Maiko, la petite fille angoissée par les disputes de ses parents ou encore un couple de personnes âgées ayant perdu leur fils. C’est tout un panel d’individus aux histoires uniques que vous rencontrez et apprenez à apprécier durant votre aventure. D’autres activités, plus expéditives, vous permettent d’améliorer charme, savoir et courage de votre personnage en étudiant, en participant à des quiz ou encore en accumulant les petits boulots, qui vous gratifient en plus d'un petit peu d'argent. Cependant, toutes ces activités consomment du temps et votre calendrier n’est pas infini, alors vous devez choisir comment occuper vos journées tout au long de votre année scolaire selon vos besoins et affinités.
Plutôt saignant votre steak ?
Tour immense accessible uniquement durant l’Heure Sombre, le Tartare se divise en sections elles-mêmes découpées en étages. À la fin de chaque section, vous vous retrouvez bloqué dans votre progression et seule l’avancée du scénario, qui se fait à des dates précises du calendrier, vous ouvre la section suivante. Au cœur de chaque étage, générés aléatoirement sous forme de mini labyrinthes très courts et visuellement peu inspirés, vous rencontrez les fameuses ombres représentées par des slimes noirs. Une fois entré en contact avec, le combat au tour par tour se lance et pour l'optimiser au mieux, vous devez utiliser vos compétences à bon escient. Comme dans tous les Persona, chaque ennemi est faible face à un type d’attaque et de magie, qui lui infligent davantage de dégâts et le mettent à terre. Quand cela arrive, le personnage utilisé obtient le droit à une nouvelle action et ainsi de suite tant que vous profitez des faiblesses ennemies. Si tous se retrouvent à terre, vous pouvez lancer une attaque spéciale combinée dévastatrice. Mais attention, si les ennemis ont des faiblesses, il en va de même pour vous et vos compagnons, donc mettez un terme aux combats le plus vite possible afin de réduire les risques de vous retrouver en difficulté. Si vous terminez un combat par une attaque combinée ou si votre personnage principal donne le coup de grâce, vous gagnez un tirage de cartes vous offrant la possibilité d’obtenir un bonus d’expérience, un regain de santé, une arme et plus important encore, une Persona. Attention néanmoins, certaines cartes sont maudites. En plus du Tartare, chaque nuit de pleine lune vous entraîne dans une mission spéciale durant laquelle vous devez vaincre une ombre plus redoutable.
Nécessaires à l'utilisation de la magie, les Personae sont des créatures issues des folklores asiatiques et européens, dont certaines très connues comme l'Archange, la Licorne ou encore la Valkyrie. Au nombre de 170, elles possèdent toutes des statistiques propres, une liste de compétences et sont associées à un arcane du tarot, qui correspond à ceux de vos S. Link. Si le tirage de cartes est le moyen le plus simple et courant d’en obtenir, ce n’est pas le seul et la Chambre de velours vous en met rapidement d’autres à disposition. Cette zone, accessible à l’entrée du Tartare ou au fond d’une ruelle en ville, est le repère d’Igor, l’emblématique et mystérieux maître des lieux depuis le tout premier épisode de la licence. Ici, vous pouvez accomplir des quêtes diverses contre des objets, remplir le compendium et surtout fusionner les Personae pour en obtenir de nouvelles. En en sacrifiant deux ou trois, vous pouvez en créer une nouvelle plus puissante héritant d’une partie des compétences des Personae utilisées. Lorsque vous en découvrez ou créez de nouvelles, elles sont automatiquement enregistrées dans le compendium et vous pouvez le mettre à jour à chaque niveau gagné ou compétence obtenue. Ainsi, si jamais vous avez besoin d’une Persona en particulier et si vous avez une place de libre, vous pouvez utiliser le compendium pour l’invoquer contre une certaine somme d’argent. Et c’est un peu là que le bât blesse, car le jeu peut vite se transformer en usine à grind, afin de gagner suffisamment d’argent pour invoquer les Personae nécessaires à certaines fusions et avoir les bons arcanes disponibles pour faciliter la monté en niveaux des S. Link. Et bien entendu, le jeu vous pousse à remplacer régulièrement vos Personae en faisant en sorte qu'elles progressent lentement et que certaines magies ne soient accessibles qu'aux plus puissantes d'entre elles. Et ça, c’est sans parler des cartes de compétences, qu'elles vous offrent lorsqu’elles atteignent un certain niveau. Tout pousse à grind un peu plus à chaque visite du Tartare, sauf que votre groupe n’a pas une endurance infinie et vous allez devoir faire avec leur fatigue, diminuant leurs capacités. De plus, aller trop souvent dans le Tartare signifie perdre du temps pour d’autres activités et là commence le casse-tête de l’optimisation du temps. Une habitude de la licence, mais qui peut s'avérer compliqué à accepter en 2023, surtout sur un jeu qui a bien du mal à cacher son âge.
L’IA est passée par ici, elle repassera par là
Persona 3 Portable étant un jeu PlayStation Portable, il fallait l’adapter aux résolutions bien plus élevées de nos écrans actuels et pour cela, Atlus semble avoir utilisé une méthode de plus en plus populaire : l’intelligence artificielle. Une telle technique, déjà utilisée par d’autres développeurs ainsi que des amateurs, offre l’opportunité de passer rapidement et à moindre frais nos anciens jeux aux standards actuels. Le résultat, s’il est plutôt réussi quand il s’agit des portraits, devient plus discutable quand on regarde les décors en 2D, qui ne manquent pas de petits détails renforçant l’idée qu’aucune main humaine n’a été à l’œuvre. Artefacts, éléments très voire trop nets quand d’autres sont devenus une bouillie illisible, il devient difficile de douter de l’utilisation de l’IA par Atlus. Utilisation limitée à son strict minimum vu qu’aucun effort n’a été entrepris pour justement donner un petit coup polish à ces décors. Et que dire des éléments 3D dont la pauvreté vous saute aux yeux ? Ils auraient eux aussi mérité un petit rajeunissement afin d'arrondir un peu les angles. Rien de tout ça ici et il faut se contenter du minimum syndical, ce qui ne peut que décevoir quand on se souvient que ce portage est censé fêter les 25 ans de la licence.
En dehors de cette légère mise à jour graphique, le jeu n’a subi aucune modification pour offrir l’expérience la plus fidèle possible. En sus et pour faciliter légèrement la vie des joueurs, le studio japonais a tout de même pensé à débloquer tous les modes de difficulté dès la première partie et à ajouter une sauvegarde rapide, qui ne peut être utilisée qu’en quittant le jeu et est supprimée après chargement.
Quant à la bande originale, signée comme toujours par Shoji Meguro, elle est elle aussi identique et c’est tant mieux tant elle s’accorde parfaitement à l’ambiance du jeu.
Conclusion
Après un portage réussi de Persona 5 Royal, plus facile à manœuvrer vu sa relative jeunesse, Atlus lance sa seconde salve de portages avec Persona 4 Golden et Persona 3 Portable. Si le choix de ce dernier au détriment de la version FES, plus complète, ne manquera pas de décevoir certains fans, elle possède suffisamment d’atouts pour mériter un peu de votre temps. Une histoire riche et originale, des personnages bien écrits et attachants, une ambiance sombre et fantastique, des combats faciles à prendre en main et durant lesquels vous contrôlez tout le groupe, de nombreuses Personae à découvrir et un emploi du temps à gérer selon vos envies, vous aurez de quoi vous occuper pendant des dizaines et dizaines d’heures. Malgré tout, ce portage manque cruellement d’ambition et aurait profité d’une couche supplémentaire de travail par des artistes bien humains. Et au-delà même du portage, il faut aussi admettre que Persona 3 Portable a pris un sérieux coup de vieux et ce qui semblait normal à l’époque, dont la tour du Tartare aux étages minuscules et peu inspirés ou encore le grind parfois nécessaire pour l’obtention des Personae ou de certaines compétences, devient plus compliqué à ignorer. Malgré cela, si vous êtes prêt à passer outre ce côté vieillot et un poil austère, vous pourriez vivre une grande aventure comme seul Atlus sait les concevoir.
Le jeu est vendu 19,99€ sur PlayStation 4, Xbox One, Nintendo Switch, Steam et le Windows Store où il est aussi accessible via le Game Pass.
Test réalisé par Lianai à partir d’une version Windows Store fournie par l’éditeur.
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Plateformes | Nintendo Switch, PlayStation 4, Xbox One |
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Genres | J-RPG, jeu de rôle (rpg), asie, japon contemporain |
Sortie |
19 janvier 2023 |
Aucun jolien ne joue à ce jeu, aucun n'y a joué.
Réactions (3)
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