Test de Hi-Fi Rush – Baston électrique Haute-Fidélité
Microsoft qui sort une exclu - Japonaise qui plus est - sans même l'annoncer à l'avance, en voilà une drôle d'idée! D'autant que le titre de Tango Gameworks - plutôt coutumier des univers effrayants - n'est pas une petite production indé. Beat'em up nerveux et coloré, humoristique et déjanté, à l'incroyable look de bédé, HiFi Rush nous fait incarner Chai, un jeune homme blessé qui se fait greffer un bras cybernétique par la multinationale Vendelay en espérant devenir une rockstar. Hélas, suite à une erreur dans le processus, notre héros doit affronter les dangereux employés mécaniques de la firme pour sauver sa peau et démonter au propre comme au figuré les productions de l'entreprise à grands coups de guitare électrique.
Le rythme dans la peau
Hi-Fi RUSH est présenté comme un mélange de beat'em all et de jeu de rythme. Ce positionnement étonnant pourrait décourager certains joueurs de lui laisser sa chance, alors que nous sommes face à un jeu de combat classique sur lequel se rajoute une couche rythmique qui offre des bonus et participe au scoring. Les bases du combat sont classiques, mais riches, avec une multitude de combos coup fort/coup faible et les traditionnelles esquives, parades et téléportations dans le dos à coup de grappin.
Personnellement, j'avais espéré que le parti-pris du jeu rythmique me guiderait pour prioriser le beau combotage au matraquage maladif de boutons, mais ce n’est pas le cas. Le rythme n'aide pas naturellement à faire les combos, mais on peut s'y synchroniser en plus pour obtenir divers bonus. C'est cependant assez dur pour un profane de trouver le beat à l'oreille, car il est noyé dans énormément de sons. Le visuel tente d'aider avec des décors qui bougent en rythme, mais les combats sont aussi visuellement chargés entre les mouvement des adversaires, les jauges de garde à briser, les débuffs qu'on applique, le timer sur nos alliés, les actions contextuelles et même notre score. Il faut donc voir le rythme comme une surcouche pro-gamer, mais pas comme une voie d'accès pour les joueurs qui galèrent avec les combos et les juggles.
L'aspect rythme dans le cœur des combats est donc totalement facultatif - ce qui est plutôt une bonne chose pour rendre le jeu accessible et appréciable par chacun, tout en proposant un challenge original aux joueurs qui aiment repousser leurs limites. Car au-delà d'une apparente simplicité le système de combat est riche d'éléments permettant aux plus exigeants de s'exprimer. Les combos par exemple nous prennent souvent à revers : certaines se finissent sur un coup à synchroniser pour renforcer leur effet, d'autres rajoutent un coup supplémentaire, et les plus traitres imposent une pause à respecter.
Les ennemis attaquent aussi en rythme, ce qui est très utile pour parer les grosses attaques téléphonées en spammant la parade sur le beat ou pour enchaîner les esquives à condition d'être dans le bon tempo. Certaines grosses attaques adverses figent même l'action pour nous imposer un mini QTE de rythme plutôt sympa : l'ennemi annonce d'abord le tempo de son attaque qu'il faut ensuite parer lors de sa réalisation, ce qui nous donne l'occasion de contre-attaquer. Les QTEs sont implémentés de façon moderne, un échec fait perdre un peu de vie, mais pas le combat (ouf) et en cas de décès, on peut recommencer l'escarmouche dans la foulée sans perdre de temps.
On dispose également d'alliés à invoquer pour effectuer des attaques spéciales, qu’il est nécessaire d'utiliser pour briser certaines défenses. Il faut donc gérer leur temps de rechargement, voire les booster dans le système de progression qui permet de débloquer des affinités, des combos, de l'équipement et des coups spéciaux. Le jeu nous encourage à utiliser ces derniers plutôt qu'à les stocker, ce qui nous fera profiter de leur mise en scène des plus réussie.
Quelques cases en moins
Au-delà du très efficace système de combat, l'univers est également particulièrement abouti. Si vous aimez un peu les bandes-dessinées, comics, mangas ou animes, vous allez en prendre plein les yeux. Bien qu'il s'agisse d'un jeu japonais, la tonalité visuelle s'inspire beaucoup des comics US des années 80, avec des aplats colorés, des lignes à géométrie variable, un dessin des personnages à l'occidentale et même des trames pointillées pour créer les dégradés - tout en gardant un look résolument moderne, un dynamisme typiquement japonais et surtout un brin de loufoquerie des plus réjouissants.
La direction comme la réalisation artistique sont en béton armé et font vibrer sous nos yeux un univers purement BD totalement crédible, renforcé par la présence à l'écran d'onomatopées et de transitions impeccables qui jonglent entre jeu en 3D, animation à l'ancienne et même des crayonnés en cases au début de chaque chapitre. Les animations sont très punchy, les coups portent bien, le jeu est fluide et ne souffre d'aucun bug. Tous les potards du cel shading sont ajustés en position ultime et Hi-Fi Rush est sans doute l'un des titres les plus attrayants que j'ai eu l'occasion de voir ces dernières années. Si le jeu est déjà sublime en HD, il est vraiment incroyable en 4K sur grand écran. La 4K est d'ailleurs très accessible puisque le titre prend en charge toutes les technologies de mise à l'échelle (DLSS, FSR, XeSS) quelle que soit votre marque de carte graphique.
Au-delà de l'aspect visuel, c'est tout un monde loufoque et déjanté qui prend vie sous nos yeux. Si le level design est classique avec des arènes et des phases d'exploration un peu planplan, c'est l’intégration parfaite du jeu et de l’univers qui rend cet univers captivant. Il y a toujours quelque chose à regarder ou lire d'intriguant, d'intéressant ou d'amusant. On est bien guidé vers les secrets secondaires, les balises, les tutos et même les audiologs sont intégrés à la diégèse. Les infos nous parviennent sans nous couper dans notre élan via des annonces vocales ou de la narration environnementale. Notons au passage que la VF audio est nickel.
Silence on Boss !
Hi-Fi Rush est drôle. Vraiment drôle au point de faire réellement rire - ce qui est déjà très rare -, mais il est aussi très intelligent dans son propos - ce qui l'est encore plus. Lutte contre une entreprise robotique mégalomaniaque oblige, on affronte bien sûr tout un tas de robots de Vendelay, mais on rencontre aussi - surtout - toute la faune cybernétique locale qui travaille dans ses bureaux. Les NPCs sont tous géniaux et on apprécie de parler avec toutes les secrétaires robotiques désabusées, les délégués du personnel planqués, les réparateurs vengeurs et autres employés en excès de zèle juste parce que ça fait rire. Leurs petites histoires ne sont pas dépourvues de fond, on pose un véritable regard et une critique intelligente du monde de l'entreprise. Quel plaisir de lire les mails expliquant les plans de vengeance d'un développeur condamné à réparer les machines à café, pour entendre ensuite d'autres NPCs constater les effets de ses actions. Ça donne de la vie à cet univers qui, sous ses aspects déjantés, est vraiment mature dans son propos.
Pour finir les niveaux en beauté, rien de tel que les boss. Là, on arrive carrément au niveau supérieur. Les boss sont génialissimes. Ils sont tous présents au cours de notre périple, on leur parle, on entend leurs menaces, on commente leurs actions, on constate leurs effets sur les employés, on observe leur impact sur le design des niveaux et on explose de rire quand une catcheuse robotique responsable de la qualité nous attaque en criant haut et fort qu'elle ne nous laissera pas saper l'image de l'entreprise. Tout est cohérent et les boss sont la clef de voute qui donne sens et vie à ce monde.
Toutefois, ils ne sont pas qu'une réussite narrative. Si les premiers combats sont plutôt classiques, par la suite le jeu rajoute et invente des mécaniques qui sont à la fois raccord avec la personnalité et le rôle des intervenants, et qui renouvellent l'intérêt pour qu'aucun combat ne se ressemble. Le cast des héros est plus classique, mais reste très agréable. Nos compagnons sont attachants et guident notre héros plutôt stupide pour créer avec humour des situations de jeu sympa. Là encore, tout se tient.
Seul petit bémol, le sound design est particulier. Il se compose d’un fond rythmique (basse et batterie) qui prend vie en fonction de nos actions. Nos attaques font des accords, nos combos font des mélodies etc. L'idée est sympa quand on joue bien, mais le résultat est médiocre quand on n'est pas si bon que ça. La musique tend à devenir mélodique lors des combats ce qui rend la perception rythmique plus complexe, alors que la rythmique pure lors de l'exploration des niveaux peut s’avérer fatigante. Inverser les deux - plus de mélodies en exploration et se concentrer sur la rythmique en combats - aurait été plus judicieux. Reste que l'idée est sympa et cohérente avec l’univers. Ce petit point noir n'a pas vocation à pénaliser une expérience vraiment réussie sur tous les autres plans.
Hi-Fi Rush est une réussite à tous les niveaux. La base du jeu de combat est fun avec quelques mécaniques originales, l'aspect visuel est une tuerie, aussi bien artistique que technique, l'exploration est sympathique et fluide, mais ce qui m’a surtout séduit c’est l’univers du jeu. L'histoire principale est déjantée et les propos secondaires comme le sous-texte sont à la fois matures et soutenus par un humour qui fait mouche.
Sur une base très classique bien maîtrisée et qui ne déçoit pas, Hi-Fi Rush construit son univers d’une grande originalité qui caricature efficacement le monde de l'entreprise, montrant que le jeu vidéo peut être porteur de message sans se prendre au sérieux. Cette excellente thérapie donc est à mettre entre toutes les mains, y compris celle de votre manager acariâtre qui en aurait bien besoin.
Testé par Oulanbator sur PC (R5 5600 / RTX3060 / 16Go) via une version fournie par l'éditeur.
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Plateformes | Windows, Xbox Series X|S |
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Genres | Action, rythme, futuriste / science-fiction |
Sortie |
25 janvier 2023 |
Aucun jolien ne joue à ce jeu, aucun n'y a joué.
Réactions (1)
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