Test de Payday 3 - Un jeu vieillot
Dix ans après Payday 2, Starbreeze revient avec un nouvel opus de sa franchise phare. Avec succès ?
L'herbe n'est pas forcément plus verte ailleurs
PayDay 2, sorti le 13 août 2013, a eu droit à de très, très, très nombreux DLC et mises à jour gratuites. Le contenu initialement limité a donc été sensiblement enrichi et amélioré au fil des ans. Comparer Payday 3 a son aîné, qui a reçu dix ans de contenu, est donc périlleux. Cela tombe bien, c'est exactement ce que nous allons faire.
Ce nouvel opus propose huit casses. Si ceux-ci sont tous inédits, certains d'entre eux rappellent forcément ceux du jeu précédent, comme l'attaque d'une banque, d'une bijouterie et d'une boîte de nuit ; trois situations de Payday 2, mais complètement refaites et enrichies pour l'occasion.
Ces casses sont désormais entrecoupés de cinématiques. Celles-ci sont intéressantes, mais elles ont généré pour moi une première incompréhension. En effet, n'aurait-il pas été préférable de les réunir aux braquages dans une sorte de grande campagne narrative, accessible seul ou à plusieurs, afin de découvrir le jeu ? En l'état, on les lance une à une, directement depuis le menu du jeu, mais l'immersion en souffre pas mal.
On accède aux casses de la même manière. Là encore, je ne suis pas pleinement convaincu de la formule choisie, tant l'apparition de missions sur crime.net aux débuts de Payday 2, avec des niveaux de difficultés imposés, semblait pertinente pour de nouveaux joueurs.
Abordons d'ailleurs un des points qui a fait couler de l'encre ce dernier mois : la nécessité d'être en ligne même pour jouer en solo. Ce n'est évidemment pas un problème, car de nombreux jeux pensés pour le online font de même sans que ce ne soit un souci. Le réel problème ici est la difficulté de créer sa partie : si on désire jouer seul, il faut lancer une partie en "invités uniquement", n'inviter personne, attendre un moment la création du lobby puis lancer sa partie. On a connu plus simple.
Certes, Payday 3 n'a de véritable intérêt qu'avec d'autres joueurs. On pourrait même dire avec ses amis, car les nouveaux casses sont globalement plus complexes, ce qui signifie qu'une synergie entre les joueurs est essentielle. Sur ce point, le support complet du cross-play proposé par Starbreeze est extrêmement positif. Cependant, on se heurte cette fois à un autre souci connu par le jeu depuis son lancement : il a régulièrement connu des soucis de matchmaking.
La formule convient donc assez peu. Les ambitions narratives des développeurs sont intéressantes, mais elles auraient été mieux mises en valeur dans une réelle campagne jouable seul ou à plusieurs, enchaînant automatiquement missions et cinématiques avec, idéalement, davantage d'encadrement des joueurs.
Z'ai pas compris
J'ai passé 94h sur Payday 2. Je ne suis donc pas un néophyte de la licence, encore moins des FPS en général. Cependant, à de nombreuses reprises, je me suis retrouvé perdu en jeu, ne comprenant pas ce que je devais faire ou comment le faire. Régulièrement, j'ai dû faire des recherches sur internet pour tenter de le comprendre.
Pourtant, le jeu possède un tutoriel, mais celui-ci est extrêmement basique. Il se concentre sur les combats, mais aborde à peine la discrétion ni la gestion des otages.
De la même manière, le système de progression me semble très nettement moins bien pensé que celui de Payday 2. Dans ce dernier, il y avait quatre classes, offrant chacune des améliorations successives : c'était simple à prendre en main et assez agréable. Dans ce nouvel opus, tout est ouvert, mais il faut cliquer sur une zone pour la rechercher et les compétences ne se débloquent que petit à petit, donnant le sentiment de n'avoir pas de contrôle sur la progression. Les dizaines d'arbres proposés rendent en outre le tout plus flou et pousseront certainement les joueurs à suivre des guides en ligne plutôt que de créer leur propre build. Pis, la progression ne se débloque qu'en réussissant des défis, ce qui est de plus en plus frustrant à mesure que l'on monte en niveau, car réussir un casse peut ne plus être synonyme de gain réel.Tous ces éléments font que le plaisir est beaucoup moins immédiat dans Payday 3 que dans Payday 2.
AVS
Ce nouveau système de compétences est un bon exemple des travers de Payday 3 : en tentant de faire différent, il fait souvent moins bien. Il en est de même pour la gestion des otages. Les liens sont désormais illimités (bien !) et il est possible de les utiliser pour repousser le début de l'assaut (bien, mais très anecdotique) ou obtenir des ressources (bien, mais cela ne sert à rien d'avoir 10 sacs de vie). Il est aussi possible de s'en servir comme bouclier humain et c'est là que cela devient compliqué : la touche pour les utiliser ainsi est la même que celle pour les attacher ou les échanger. Il arrive donc régulièrement qu'on se trompe, en tout cas au début. C'est assez désagréable.
De plus, Payday 3 propose un nouveau système de crochetage (sympa deux minutes, ennuyeux ensuite) et d'ouverture de coffres (cool, car assez rare pour ne pas s'en lasser), mais supprime la scie, pourtant un des outils de base de Payday 2. Et... c'est à peu près tout. C'est là qu'est le problème central de cette suite.
Dix ans séparent Payday 2 de Payday 3. Je m'attendais à ce que ce nouveau jeu ait beaucoup moins de contenu, mais j'imaginais que ce serait au prix d'une proposition beaucoup plus moderne, notamment en termes de génération procédurale. Malheureusement, il n'en est rien : il y a certes un peu de génération procédurale, mais elle est minimaliste ; les lieux des casses et leur déroulement sont extrêmement similaires d'une partie à l'autre.
De la même manière, les ennemis sont restés pratiquement intacts. Il y a certes de nouveaux types d'adversaires, mais il s'agit, globalement, toujours d'éponges à balles, à ceci près que ces dernières sont désormais plus rares, ce qui ne rend la situation que plus désagréable. Un casse, même parmi les premiers du jeu et dans les niveaux de difficultés les plus faibles, signifie tuer des centaines - voire des milliers - de policiers génériques si l'alarme est déclenchée. Il aurait été préférable de moderniser la formule.
En outre, les options de furtivité sont terriblement pauvres, surtout si on les compare, par exemple, à la trilogie Hitman sortie pendant ces dix ans d'attente. La dichotomie masque/pas masque est toujours présente ; on peut faire quelques actions supplémentaires sans masque, mais globalement, elle demeure tout aussi absurde : sans masque, il est par exemple impossible de se hisser quelque part. Il est également arrivé que je ne puisse pas faire le code d'un coffre fort sans masque, avant que cette option ne soit possible lors de la partie suivante...Enfin, j'aurais aimé davantage d'interactions possibles, notamment avec les objets, mais Payday 3 est extrêmement radin sur ce plan.
Juste encore une partie
Je dresse là un tableau bien noir. Sommairement, on pourrait dire que Payday 3, c'est Payday 2 avec juste quelques changements mineurs, qui sont en plus rarement bien pensés. Oui, mais Payday 2, c'est un super jeu. C'est ainsi qu'en dépit des difficultés initiales, en dépit du matchmaking frustrant et des limitations absurdes, la magie opère peu à peu. On se retrouve vite à recommencer le casse encore et encore, désirant le faire sans être repéré et avec encore plus de loot.
Payday 3 est un bon jeu. Son lancement est délicat, mais le titre s'améliorera indéniablement avec les années, entre les mises à jour gratuites et les DLC payants. Le plus triste, ce n'est pas ce qu'il est : c'est ce qu'il aurait pu être et ne sera jamais.
Test réalisé sur PC par Alandring grâce à une version fournie par l'éditeur.
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