Test de Nobody Wants to Die – Une enquête au noir

Des décors magnifiques, un monde dystopique intéressant et surtout la possibilité de manipuler le temps afin de découvrir ce qu'il s'est passé sur les lieux du crime, il n'en fallait pas moins pour éveiller notre curiosité. Premier jeu du studio polonais Critical Hit Games, il est temps d'enquêter sur le cas Nobody Wants to Die.

Test de Nobody Wants to Die – Une enquête au noir

L'immortalité. Des siècles que le concept obnubile l'humanité. Et voilà que cela devient possible grâce à l'ichorite qui, à défaut de conserver en l'état le corps biologique, permet de faire perdurer sa conscience. Mais il ne faut pas non plus que la société s'effondre à cause de cette nouveauté, c'est pourquoi il est important de réguler tout ça. Et pourquoi pas instaurer un service d'abonnement obligatoire et prohibitif afin de continuer à profiter de cet avantage, sans quoi le corps serait mis en vente tandis que l'esprit serait conservé dans des banques de stockage ? Qu'est-ce qui pourrait mal se passer ?

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2329, l'écart entre riches et pauvres ne cesse de se creuser. L'exploration spatiale a été un cuisant échec et l'humanité est condamnée à survivre sur une Terre à l'agonie, regroupée dans des mégalopoles qui s'élèvent jusqu'aux cieux. On a bel et bien sombré dans la dystopie.

À New York, l'agent de police James Karra se voit confier une enquête non officielle : une figure politique importante a été retrouvée réellement morte, son ichorite irrécupérable, et il va falloir que notre personnage déploie tous ses talents d'enquêteur afin de comprendre ce qu'il s'est réellement passé.

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CSI: New York

Nobody Wants to Die propose donc toute une enquête afin de découvrir la vérité sur ce décès. L'opération se déroulera en plusieurs phases.

Il y a d'abord les moments d'aventure classiques : vous vous déplacez dans votre environnement (à la première personne) et vous interagissez avec divers éléments du décor. Certains objets peuvent être examinés de plus près afin de trouver un éventuel point d'intérêt dessus.

Il est rare de rencontrer d'autres personnes sur les lieux, mais vous êtes toujours en contact avec un agent de liaison, Sara Kai. De temps en temps, des options de dialogues sont proposées, dont certaines où il faut répondre avant un temps imparti. Selon les précédents choix ou trouvailles, de nouvelles options de dialogues peuvent se débloquer.

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Des outils sont à disposition du personnage. Il y a les classiques détecteur à rayon X et lampe à UV. Le premier permet entre autres de voir à travers les murs tandis que le second permet surtout de révéler les traces de sang. Ils ont d'autres utilités que nous vous laissons découvrir. Le héros dispose également d'un appareil photo pour identifier certaines victimes.

Mais LE gadget le plus important est de très loin le Reconstructeur. Il produit un hologramme très détaillé de ce qu'il s'est passé, petit bout par petit bout. Il propose ensuite d'avancer ou de reculer dans la temporalité afin de voir ce qu'il s'est passé. Son utilisation est très agréable : un mini-jeu (rapide et trivial) pour lancer la reconstruction et il suffit de jouer des gâchettes pour aller et venir dans la séquence. Découvrir les faits par le biais de cet outil s'avère très intéressant : les actes se déroulent devant nos yeux et on peut naviguer aisément pour examiner les choses sous plusieurs angles.

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Plein d'outils, donc. Mais, même si le jeu vous permet de les prendre en main quand vous le désirez, il ne sera pas possible de les utiliser comme bon vous plaira.

Le jeu est narratif. Cela veut dire suivre une grande histoire, mais malheureusement aussi de le faire sur des rails déjà définis. Une fois la reconstruction produite, il faut se rendre sur une tranche surlignée de la temporalité ; là, le personnage fait son petit commentaire où on doit trouver le point d'intérêt dans la scène, ce qui débloque la suite de la progression. À certains moments, Sara annonce "il est temps d'utiliser la lampe à UV" et l'interface affiche un beau "appuyez sur le bouton pour utiliser la lampe à UV". Aucune liberté dans l'approche, il suffit de suivre le chemin balisé.

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Une histoire policière n'en serait pas une sans le tableau qui lie toutes les preuves via des bouts de ficelle. On retrouve le concept ici, mais de manière un peu plus high-tech. Ces séquences permettent de remettre de l'ordre dans les informations collectées lors de l'enquête, mais c'est aussi l'occasion pour Sara de nous fournir de nouveaux éléments. Ne craignez pas de partir sur des fausses pistes : le jeu affiche très vite un symbole de croix rouge quand la théorie mise en avant s'avère fausse.

Le joueur a quand même parfois son mot à dire : c'est à lui de mener les discussions et des choix plus importants sont régulièrement proposés. Cela peut donner des nuances à la narration, mais aussi avoir des impacts un peu plus importants sur le déroulement de l'aventure et de sa fin. Comptez sept heures pour une partie, un peu plus si vous souhaitez suivre les différentes possibilités ou débloquer la totalité des 26 succès.

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Un bon nombre de références paraissent évidentes en jouant à Nobody Wants to Die. Le concept de départ rappelle tout d'abord le monde de Altered Carbon de Richard Morgan (très maladroitement adapté par Netflix) avec ces consciences qui ont la possibilité de changer de corps avec tous les problèmes que cela implique.

Quand viennent les enquêtes, on pense d'abord au film Minority Report avec cette faculté d'aller et venir dans le temps afin d'identifier les acteurs et de comprendre comment les choses se sont passées. Mais la réalisation semble plus pencher du côté de Tacoma (développé par Fullbright, sorti en 2017).

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La ville de New York présentée tout en verticalité avec ses voitures volantes qui sillonnent les rues semble sortie du travail de Mœbius (l'Incal) ou de Jean-Claude Mézières (Valerian), ou encore du film "Le Cinquième Elément" (où les deux auteurs français ont également officiés). Mais à travers un filtre "Blade Runner", avec sa nuit permanente percée par des néons et autres hologrammes gigantesques. Certains lieux rappellent d'ailleurs l'œuvre de Ridley Scott (et à raison, vu le petit easter egg dans l'un d'eux).

Mais le genre qui prédomine est bel et bien le film noir. Toute sa grammaire répond ici présente : la musique aux sonorités jazzy, les environnements art déco, l'enquête qui s'avère mener à de plus amples ramifications, les voitures aux designs proches de ce qu'il se faisait dans les années 50. Le héros même voit tous les potards "hard boiled" poussés au maximum : sa femme est morte, son partenaire est mort, il a été mis sur la touche suite à une affaire qui a mal tourné, il trainait déjà une sale réputation chez ses confrères avant cet événement, il sombre doucement dans l'alcool et la drogue et il aime faire de longs monologues avec un vocabulaire enrichi pendant les écrans de chargement.

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A qui profite le crime ?

Et ce mélange fonctionne, le jeu arrive à créer son identité propre.

Grâce à son écriture, d'abord. Les révélations arrivent les unes après les autres et obligent le joueur à reconsidérer les informations qu'il pensait comme acquises pas longtemps avant. Le tout motive à toujours progresser. Les auteurs auraient peut-être gagné à avoir la main un peu moins lourde sur les ingrédients "film noir". Même si on laisse facilement porter par la narration, certains aspects sont un peu faiblards. Certains revirements de situations sont par exemple un peu trop sujet à de la chance plutôt qu'à l'avancée de l'enquête. Et arrivé à l'une des fins, certains aspects peuvent encore paraitre obscurs.

Visuellement, ensuite, c'est très beau. C'est l'Unreal Engine 5 derrière et le studio en profite avec quelques panoramas à couper le souffle. Les décors sont très réussis. Les différents personnages sont bien modélisés, sans pour autant atteindre le photoréalisme.

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Côté bande sonore, la musique participe grandement à l'immersion. Tous les dialogues sont doublés en anglais (sous-titres français disponibles). Philip Sacramento exagère peut-être un peu sur la grosse voix "film noir" pour le personnage principal, mais les autres doubleurs proposent de bonnes performances. Comme certains dialogues peuvent varier selon les précédents choix, il arrive de noter une étrange différence de ton entre deux répliques (ton normal de la conversation pour une phrase alors que la précédente avait été plus dans la panique, par exemple).

Techniquement, le tout est plutôt propre (un autre avantage de l'UE5). Durant le test, quelques textes restés en anglais ont été croisés. Il peut arriver que le joueur se retrouve bloqué si le Reconstructeur fait apparaitre un personnage pile sur sa position. Mais il suffit de ranger le gadget et de se déplacer un peu pour que tout rentre dans l'ordre.

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Même si l'histoire propose quelques raccourcis un peu trop pratiques, Nobody Wants to Die offre une belle aventure narrative. Il faut par contre insister sur le côté narratif de la chose : malgré tous les beaux jouets à disposition, il faudra globalement suivre l'ordre imposé afin de découvrir le dénouement de l'affaire.

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Test réalisé sur PC par NeoGrifteR à partir d’une version fournie par l’éditeur.

(Joué en 1080p sur AMD Ryzen 5 1600, 16 Go de RAM, GTX 1070)

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