Test - The Rogue Prince of Persia : un retour princier sans couronne

Le dernier né d'Evil Empire mélange habilement parkour et roguelite, mais peine à se démarquer dans un genre saturé malgré ses qualités indéniables.

Après des années dans l'ombre d'Assassin's Creed, la licence Prince of Persia retrouve ses lettres de noblesse avec une approche audacieuse. The Rogue Prince of Persia, développé par Evil Empire (les artisans derrière l'évolution de Dead Cells) et édité par Ubisoft, transpose l'essence acrobatique de la série dans un roguelite 2D. Cette collaboration prometteuse marie l'expertise du studio français en matière de roguelites avec l'ADN légendaire d'une franchise qui a marqué le jeu vidéo depuis 1989.
 
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Le projet, disponible au prix de 24,99 euros, propose de revivre les aventures du Prince sous un angle inédit, où chaque mort devient une opportunité de renaître et d'apprendre. Avec plus d'un an d'accès anticipé derrière lui, le titre sort enfin dans sa version définitive, promettant une expérience peaufinée par les retours de la communauté.

Ce qu'on a aimé

Une direction artistique qui séduit par ses contrastes

The Rogue Prince of Persia nous offre une esthétique "ligne claire" inspirée des bandes dessinées européennes comme Tintin, créant un style visuel particulièrement séduisant. Cette approche graphique génère un mélange d'émotions contradictoires fascinant : le gameplay nous paraît familier grâce aux mécaniques éprouvées du genre, mais l'enrobage visuel apporte une fraîcheur bienvenue qui distingue immédiatement le titre de ses concurrents. Les aquarelles et les arrière-plans luxuriants donnent vie à chaque biome avec une attention remarquable aux détails, des feuilles qui bougent au premier plan du biome Jardin aux sculptures finement ciselées du Temple d'Atar. Cette direction artistique réussit le pari difficile d'être à la fois moderne et intemporelle, créant une identité visuelle forte qui transcende les limitations du pixel art traditionnel des roguelites.

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Une bande-son qui épouse parfaitement l'action

La composition musicale mérite une mention spéciale pour sa capacité à épouser parfaitement le rythme effréné du gameplay. Le mélange de trap persan, combinant instruments traditionnels du Moyen-Orient (setar, daf) avec des beats électroniques modernes, crée une atmosphère unique que nous trouvons particulièrement réussie. Cette approche musicale, signée Danny Asadi, ne se contente pas d'accompagner l'action : elle la sublime en s'adaptant dynamiquement à l'intensité des combats et à la vitesse des déplacements. Lorsque les points de vie d'un boss diminuent de moitié, la musique s'accélère naturellement, créant une montée de tension palpable. Cette bande-son nous donne envie de maintenir un rythme soutenu, transformant chaque course-poursuite contre les tentacules maléfiques en moment d'anthologie musicale.

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Un parkour qui honore l'héritage de la série

Les mécaniques de déplacement constituent indéniablement le point fort du titre, traduisant avec brio l'essence acrobatique de Prince of Persia en 2D. Le wall-run, les enchaînements de sauts et les courses le long des murs créent une fluidité de mouvement exceptionnelle qui rend chaque traversée de niveau jubilatoire. Evil Empire maîtrise parfaitement l'art de concevoir des niveaux qui exploitent chaque centimètre de l'espace disponible, créant des situations où l'on atteint une plateforme au dernier millimètre d'un wall-run. Cette précision dans le level design, couplée à des contrôles réactifs, transforme chaque salle en terrain de jeu acrobatique. Les courses-poursuites contre les tentacules qui enlèvent enfants et chèvres représentent des moments d'adrénaline pure, nous poussant à enchaîner sauts périlleux et courses murales avec un plaisir intact à chaque occurrence.

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Un système de combat exigeant

Le système de combat privilégie la maîtrise technique plutôt que l'accumulation statistique, une approche qui distingue favorablement le titre de nombreux roguelites contemporains. Chaque arme possède ses propres spécificités et attaques chargées, tandis que les mécaniques environnementales comme le kick permettent d'envoyer les ennemis dans les pièges ou de briser les formations. Cette philosophie "git gud" récompense l'apprentissage des patterns ennemis et la maîtrise des combos plutôt que la chance ou la surpuissance temporaire. Les possibilités de combo et d'annulation d'attaque offrent une profondeur tactique appréciable, permettant de jongler avec plusieurs adversaires simultanément. Cette approche exigeante mais gratifiante s'inscrit parfaitement dans l'ADN d'Evil Empire, studio reconnu pour ses jeux demandant précision et persévérance.

Ce qu'on n'est pas sûrs d'avoir aimé

Un système de médaillons aux synergies parfois décevantes

Le système de buffs temporaires manque parfois de cohérence, créant des situations frustrantes où les médaillons récoltés ne correspondent pas au style de jeu adopté lors d'une run. Nous nous retrouvons régulièrement avec des améliorations pour armes à distance quand nous privilégions le corps-à-corps, ou des buffs liés à la résine alors que nous n'avons pas accès à l'arme qui en profite.

Cette déconnexion entre les outils proposés et les besoins du moment dilue l'impact des choix stratégiques et peut transformer certaines runs en exercices de frustration plutôt qu'en explorations tactiques. Si certaines combinations fonctionnent brillamment, trop d'autres semblent laissées au hasard, affaiblissant la dimension stratégique que devrait offrir un bon roguelite.

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Une durée de vie qui interroge

Avec environ 15 à 30 heures de contenu selon les objectifs fixés, The Rogue Prince of Persia se montre plus concis que la plupart de ses concurrents dans le genre. Six biomes, deux boss principaux et une douzaine d'armes constituent un arsenal respectable mais qui peut paraître limité face aux standards établis par des titres comme Dead Cells ou Hades. Cette durée contenue peut être perçue comme un avantage pour les joueurs soucieux de ne pas s'enliser dans un jeu service, mais elle soulève également des questions sur la rejouabilité à long terme. Le titre semble conscient de ses limites et préfère ne pas abuser de sa formule, ce qui constitue une approche honorable mais potentiellement problématique pour justifier son prix face à des alternatives plus généreuses en contenu.

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Ce qu'on a moins aimé

Un manque d'originalité dans un marché saturé

The Rogue Prince of Persia souffre d'un déficit d'ambition créative qui l'empêche de se démarquer dans un genre déjà très fourni. Malgré ses qualités techniques indéniables, le titre peine à justifier son existence face à des références comme Hades pour la narration, Dead Cells (bizarrement) pour la variété ou encore FTL pour la rejouabilité. Cette absence d'élément véritablement distinctif transforme l'expérience en exercice compétent mais prévisible, où l'on reconnaît immédiatement les influences sans percevoir la personnalité propre du projet. Les similitudes avec Dead Cells deviennent parfois gênantes, certaines zones et combats de boss semblant directement inspirés du titre précédent d'Evil Empire. Cette proximité excessive avec les œuvres de référence nuit à l'établissement d'une identité propre, reléguant le jeu au statut de variation sur un thème plutôt qu'œuvre originale.

Une méta-progression trop limitée

L'absence de progression permanente significative constitue un frein majeur à l'engagement sur le long terme. Contrairement aux standards du genre, les améliorations entre les runs restent cosmétiques ou n'offrent que des options supplémentaires sans avantage tangible. Cette philosophie "pure skill" peut séduire les puristes mais risque de décourager les joueurs moins expérimentés qui cherchent une sensation de progression constante.

L'absence de niveaux de difficulté aggrave encore cette situation, ne laissant aucune échappatoire aux joueurs en difficulté. Cette approche minimaliste de la méta-progression, bien qu'assumée, limite considérablement l'accessibilité du titre et peut frustrer ceux qui s'attendent aux standards modernes du genre en matière de progression permanente.

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Des éléments narratifs génériques

Les personnages et dialogues peinent à créer un attachement durable, se contentant d'archétypes prévisibles sans profondeur particulière. Contrairement à Hades qui excellait dans la construction de relations interpersonnelles complexes, The Rogue Prince of Persia propose des interactions répétitives qui perdent rapidement leur charme.

Le Prince lui-même, bien qu'amusant dans certaines situations, manque du charisme nécessaire pour porter une narration sur plusieurs dizaines d'heures. Cette faiblesse narrative se ressent particulièrement dans les moments de pause entre les runs, où les conversations avec les PNJ de l'oasis deviennent rapidement redondantes. Le potentiel du concept de boucle temporelle narrative n'est pas pleinement exploité, se contentant d'une utilisation mécanique sans véritable développement dramatique.

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Crache ton p'tit prince, Myrhdin

The Rogue Prince of Persia représente un retour honorable mais sans éclat pour une licence qui méritait mieux. Evil Empire livre une expérience techniquement maîtrisée, visuellement séduisante et musicalement inspirée, mais qui manque cruellement de cette étincelle créative capable de transcender ses influences.

Nous nous retrouvons face à un très bon jeu dans l'absolu, mais un titre moyen dans son contexte concurrentiel, pénalisé par son manque d'ambition et sa trop grande proximité avec les références du genre. Les amateurs de platforming précis et de défis basés sur le skill y trouveront leur compte, mais ceux qui cherchent la prochaine révolution du roguelite devront regarder ailleurs. C'est un projet qui aurait gagné à prendre plus de risques créatifs plutôt que de se contenter d'une exécution sans faille mais prévisible.

Ce test a été réalisé par Myrhdin avec une clé ou un jeu fournis par le constructeur. Sa rédaction n'est le fruit d'aucune transaction financière entre le rédacteur ou JeuxOnLine et le développeur, l'éditeur ou les entreprises les représentant.

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