Test vidéo de Dogurai - Un hot-dog revisité sauce Samouraï

Par un soir aussi triste que pluvieux, j'essayais de tromper l'ennui non pas en m'enfilant des shots dans un bar à hôtesses miteux de Chicago, mais sur le PlayStation Store, au fin fond d'une liste interminable de 2784 jeux indépendants en promotion, aussi méconnus que peu engageants. C'est là, au milieu des hordes de waifus, et d'innombrables add-ons de Fishing Simulator, que je suis tombé Dogurai - un obscur titre au look Game Boy assumé, tout en nuances de vert. Je ne sais plus si c'est son allure décalée ou le fait qu'il s'offre à moins de 1€ qui m'a convaincu de franchir le pas, mais après tout, quitte à tester des jeux, pourquoi ne pas aller gratter un peu au fond du tiroir à promos pour voir ce qui s'y trouve ?

Grand bien m'en a pris ! Dogurai n'est certes pas un titre qui révolutionne le jeu vidéo, mais pour moins de 5€ en temps normal, il propose aussi bien aux nostalgiques de 1990 qu'aux autres de (re)découvrir le jeu sur Game Boy dans une expérience particulièrement bien calibrée, sans la pénibilité associée aux titres de l'époque. Et comme les captures d'écran ne lui font vraiment pas honneur, j'ai même transposé ce test en vidéo.

T'es Pluto Bones Snoopy

Dogurai met en scène Bones, un chien-Samouraï ex-membre des forces spéciales, que n'aurait pas renié Charlie Brown, et qui lutte contre... en fait, on sait pas trop et ce n'est vraiment pas important. Le scénario initial tient sur un Seal of Quality de Nintendo et si des détails sont bien amenés au cours de la partie, on n'est de toute façon pas là pour se raconter des histoires, mais bien pour entrer au cœur de l'action en trois clicks de boutons.

Après un saut du haut d'une grande tour, on prend donc le contrôle de notre chien d'élite avec ses commandes inspirées du tout premier Megaman : un bouton de saut, un bouton d'attaque et une glissade en faisant bas + saut. Ok, en fait c'est quand même plus raffiné que Megaman, déjà parce qu'on a un bouton supplémentaire pour faire la glissade, ensuite parce qu'on a un double-saut dès le début du jeu, qu'on peut également trancher les projectiles des adversaires et finalement parce qu'on peut faire un petit combo de trois coup au katana - et même déclencher un mini QTE de sabrage stylé sur certains ennemis.

Le setup du premier niveau est aussi efficace que classique : après avoir traversé une ville en ruines, on se plonge dans les égouts. On peut le voir comme un manque d'originalité, mais aussi comme un hommage à ces tonnes de jeux Game Boy qui nous ont tous fait le coup des égouts. Traversée en une poignée de minutes, cette première zone ne posera de challenge à personne mais nous permet de bien cerner les contrôles du jeu. C'est au premier boss que les choses se corsent légèrement, avec l'entrée en scène d'un robot mécha-raton qui évoque encore une fois Megaman. Il faudra analyser les patterns de l'ennemi pour réussir à le mettre en difficulté, ce qui donne l'occasion de remarquer que le jeu propose des vies infinies sans aucune interruption de gameplay, ce qui est nettement plus appréciable que les jeux d'époque avec vies et continues à utiliser parcimonieusement.


On met le cap comme...

Une fois ce premier niveau passé, une carte vous proposera quatre régions à explorer. Je vous répète encore que ça s'inspire du petit robot bleu de Capcom ? Bon, c'est promis, j'arrête, d'autant que ces niveaux trouvent justement la bonne formule pour prendre leur indépendance vis-à-vis du modèle. Le fait de devoir affronter les ennemis au corps à corps plutôt que de les canarder à distance nous oblige à être sans cesse en mouvement en utilisant le double saut et la glissade à bon escient. Les adversaires de base sont bien pensés et certains ont même un comportement original nécessitant parfois des mini stratégies. Il faudra pour les moins aguerris savoir revenir sur ses pas pour se mettre à couvert, tandis que les pros du pad auront toute la latitude de trouver le rythme parfait pour virevolter sans coup férir à travers les obstacles. Les déplacements sont très agréables, le personnage est plutôt agile et les contrôles précis - au point qu'on se demande si notre chien-samouraï ne serait pas aussi un peu un chat-ninja.

Les niveaux se construisent autour d'une alternance simple : des passages action-plate-forme dans lesquels on peut trouver quelques secrets ici et là, et un mur de difficulté avec souvent une mécanique spécifique à la zone. Par exemple, dans l'usine de cryogénisation, on doit utiliser le sol gelé pour prendre des élans de malade, tout en gérant des sauts millimétrés entre les gouffres et les souffles glacés qui nous envoient au fond du ravin. Ces mécaniques et concepts classiques, voire un tantinet casse-glaçons, sont ici très bien exploités. Ce sempiternel "monde de la glace" tout aussi glissant que pénible à naviguer cause des déplacements précautionneux qu'il impose, est ici transfiguré, car la mécanique classique a été habilement retournée pour proposer à la place de la vitesse et donc du gameplay rythmé et fun. Bien joué Dogurai!

Sans être trop brutale avec le joueur, chaque zone a donc sa petite barrière qui demande de bien jouer. Le titre nous punit si on tente de passer en bourrin, mais les vies infinies et la réapparition au début du passage en question nous permettent de passer en mode die & retry et de progresser à chaque nouvelle tentative, procurant un excellent sentiment de progression. Une fois le niveau maîtrisé, on se rend compte là encore qu'on peut le retraverser en une poignée de minutes, ce qui est à la fois grisant, mais aussi utile si on chercher à collecter les disquettes qui nous permettent de débloquer la vraie fin.

Comme pour les niveaux, les boss sont bien maîtrisés et posent un certain challenge. Il faudra comprendre leur patterns pour esquiver des attaques qui peuvent nous mettre à terre en une poignée de secondes, essayer de trouver la faille à exploiter dans leur mouvement, guetter les moments ou déclencher notre combo QTE, et tenir la distance en leur grapillant des points de vie petit à petit. Là encore, le titre est intransigeant, mais le fait d'avoir des vies infinies et de repartir juste avant le boss donne à la fois un goût de difficulté classique tout en évitant la frustration inhérente aux titres d'antan. De plus, à force d'affronter les boss, vous trouverez de plus en plus de failles dans leur défense à priori impénétrable, et ce sera un véritable plaisir de tomber en 30 secondes des ennemis qui vous ont fait galérer pendant plusieurs minutes. Les experts de Megaman auront remarqué que je ne parle pas des armes qu'on récupère sur les boss et pour cause : il n'y en a pas. Impossible de cheeser les boss du coup, et c'est tant mieux, car ce gameplay est somme toute plus calibré et mieux maîtrisé que les premiers titres de Capcom.


Un titre qui a du chien

Les qualités esthétiques de Dogurai ne laisseront personne indifférent. S'il tente de jouer avec les limitations d'époque - par exemple, on peut utiliser seulement deux boutons comme sur Game Boy - et s'il se débrouille bien pour proposer des graphismes lisibles en quatre nuances de vert comme sur la première portable de Nintendo, le rendu sur un écran 4K nous amènera toute de même a prendre un peu de recul - au propre plus qu'au figuré. Plus que le trait du graphisme, c'est l'animation, simple mais réussie, qui donne vie à un ensemble somme toute mal desservi par les captures d'écran figées.

Les environnements sont classiques, mais variés, et le jeu regorge de plein de petites références des plus sympa, qui amusent sans saouler. Pour apporter un peu de variété, il existe 8 palettes de couleurs prédéfinies qui colorent chaque monde si on le désire, donnant ainsi un rendu Game Boy Color. Pour ma part, je n'ai pas aimé ces thèmes qui rendaient l'écran trop brillant à mon goût, mais j'ai apprécié de pouvoir choisir de colorer ou pas un monde comme je le voulais.

Comme pour les graphismes, la musique se veut aussi d'époque. Les thèmes sont efficaces et le rendu Game Boy authentique est là encore des plus sympa, bien qu'on puisse déplorer une certaine redondance dans quelques boucles un peu courtes, ce qui peut s'avérer légèrement usant quand on refait un passage à la chaine. Fort heureusement, la musique ne reprend pas du début à chaque mort. Une chose est sure, ces mélodies s'inscriront en vous comme celles des jeux de 1990 alors que vous les écouterez pendant beaucoup moins longtemps, le jeu se terminant assez rapidement en une ou deux soirées.

Dogurai signature

Dogurai a tout du titre qu'on ne remarque pas, dont on n'attend rien et qui pourtant s'avère être une excellente surprise. Pour moins de 5€, il propose une expérience qui sent bon les années 90 sans l'arrière-goût daté qui s'incruste dans les titres d'antan. Les deux développeurs du titre ont bien géré leur ressources, misant sur l'authenticité d'un look Game Boy simple et réussi, pour se concentrer sur le gameplay. À l'orientation traditionnelle de ce dernier s'ajoute ce qu'il faut de modernité pour laisser aux oubliettes les galères du passé et profiter de niveaux plutôt sympa.

Si vous avez envie de vous faire un petit shot de nostalgie vite fait bien fait ou si vous voulez découvrir ce qu'était le jeu sur Game Boy, le tout dans de bonnes conditions, Dogurai mérite votre attention. Ce n'est ni une pépite ni une révolution, mais l'expérience est légère et suffisamment bien fichue pour s'avérer plaisante de bout en bout.

Test réalisé sur PlayStation 4 par Oulanbator à partir d'une version commerciale.

Source : Testé par Oulanbator sur PlayStation 4

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