Test de The Dark Pictures Anthology: House of Ashes - Une superbe histoire et un gameplay archaïque

Le troisième volet de The Dark Pictures Anthology, House of Ashes, est sorti le 22 octobre 2021. Pour quel résultat ?

On prend les mêmes et on recommence

Si certains dormaient dans une grotte ces deux dernières années, rappelons rapidement le concept de The Dark Pictures Anthology : chaque année, Supermassive Games et Bandai Namco sortent un nouvel opus, racontant une histoire différente, mais avec les mêmes codes. L'histoire est à chaque fois assez courte (environ 4h), mais propose de nombreux embranchements scénaristiques. De plus, elle peut être parcourue seul ou à plusieurs, en ligne ou en local, via deux récits différents et complémentaires. Après Man of Medan en 2019 et Little Hope en 2020, c'est désormais House of Ashes qui s'offre à nous.

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Rythme de sortie annuelle oblige, les changements entre chaque opus sont généralement très faibles. Les jeux reposent beaucoup sur les QTE, marque de fabrique de Supermassive Games, qui les a déclinés en trois versions : les boutons sur lesquels appuyer (potentiellement en les martelant), les jeux de rythme durant les phases de furtivité et les adversaires à cibler, fonctionnalité très présente dans House of Ashes en raison de son contexte militaire. Si cette formule n'a guère évolué depuis Man Of Medan, les développeurs ont quand même apporté plusieurs options d'accessibilité entre temps. En effet, avec Little Hope, il était possible d'appuyer sur une seule touche pour l'ensemble des QTE. House of Ashes intègre quant à lui trois niveaux de difficultés pour ces QTE, qui se remarquent particulièrement pendant les jeux de rythme. Ainsi, en clément, la difficulté la plus basse, ils sont très faciles à exécuter puisque le rythme est régulier et que le bouton ne change pas, alors que la tâche se complique sensiblement dans les deux difficultés supérieures. On apprécie en outre que la difficulté soit paramétrable pour chaque joueur en multijoueur, ce qui permet de s'adapter aux compétences et aux envies de chacun. On espère toujours un mode cinéma qui désactiverait l'ensemble des QTE, mais Supermassive fait quand même de son mieux pour les rendre le moins désagréables possibles.

Si le visuel a très peu évolué, en dépit du passage sur consoles de nouvelles générations, les développeurs ont opéré un changement important concernant les caméras : exit les caméras fixes, remplacées par une caméra placée derrière le personnage et déplaçable avec le stick droit, comme c'est le cas dans la quasi-totalité des jeux à la troisième personne. Ce choix est à double tranchant : il diminue le potentiel de mise en scène dont dispose le studio et la caméra n'est pas toujours idéale, notamment quand elle est trop proche du personnage. Cependant, ce supplément de liberté est appréciable.

De plus depuis Little Hope, les développeurs proposent certaines scènes faisant rapidement changer de personnage. Celles-ci fonctionnent généralement très bien, mais elles étaient gérées de manière étrange en mode soirée télé dans le jeu sur le thème de la sorcellerie puisqu'elles avaient pour conséquence de faire contrôler un autre personnage que le sien. Ce défaut a été corrigé avec House of Ashes. Dans ce dernier, on se passe donc la manette avec frénésie lors de certaines phases, ce qui renforce encore l'impact de ces scènes.

Enfin, attardons-nous un instant sur les succès du jeu. Je ne suis pas un fan absolu de cette mécanique, mais j'ai obtenu l'ensemble des succès de la majorité des jeux narratifs auxquels j'ai joués, incluant notamment Until Dawn ou Detroit. Je ne l'ai en revanche pas fait pour Man of Medan et Little Hope, car ces deux jeux sont les jeux narratifs pour lesquels débloquer 100% des succès est le plus difficile. En effet, certains trophées sont impossibles à obtenir en jouant normalement : pour les débloquer, il faut scrupuleusement suivre un guide pendant au minimum deux ou trois parties. House of Ashes a un peu simplifié les choses ; obtenir tous les succès demeure compliqué, mais il y a moins de trophées absurdes, là uniquement pour forcer le joueur à suivre un guide pendant une partie.

Tous ces changements sont mineurs, mais ils apportent un jeu qui progresse année après année, à défaut de se réinventer. Dommage que le défaut principal de la licence reste présent. Nous en parlerons plus tard, mais avant ça, évoquons sa principale qualité : son histoire.

Une histoire brillante

Supermassive Games a l'ambition de se servir de son anthologie d'horreur pour aborder à chaque fois un sous-genre différent. Pourtant, les deux premiers titres de la série étaient en réalité assez proches : même s'ils abordaient des thèmes différents, ils mettaient tous deux les joueurs aux commandes d'un groupe de jeunes adultes, tout comme Until Dawn en son temps, et avaient une conception assez similaire de l'horreur.

Pour House of Ashes, en revanche, le studio britannique offre un contexte très différent. Exit les jeunes adultes sans expérience, place aux soldats américains en pleine guerre d'Irak. Cela permet un ton différent, plus sérieux, qui change réellement des deux précédents, ce qui est appréciable. Il en est de même pour la gestion du thème de l'horreur, plus monstrueuse et moins psychologique dans House of Ashes que dans les deux opus précédents.

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On le sait : Supermassive Games a un vrai talent pour raconter des histoires, créant des personnages attachants et, surtout, plaçant des rebondissements inattendus aux bons endroits. Ce nouveau titre ne fait pas exception, bien au contraire : aucun autre titre de ce développeur n'avait su autant m'embarquer, alors que je les avais tous appréciés, chacun à leur façon.

Tout le paradoxe d'une belle histoire est qu'on veut en dire le moins possible, pour ne pas risquer de spoiler, aussi je ne peux que me répéter : l'histoire de House of Ashes est très prenante, notamment par sa capacité à livrer ses réponses petit à petit, mais toujours au bon moment pour garder le(s) joueur(s) en haleine.

En outre, cette narration tire partie d'une des grandes forces de cette anthologie : ses nombreux chemins possibles. House of Ashes est probablement le jeu avec les choix les plus intéressants, car plusieurs d'entre eux incarnent parfaitement l'adage "le mieux est parfois l'ennemi du bien." Il est très plaisant de voir les conséquences de ses choix, qui font que survivre ou mourir ne dépend plus (uniquement) d'un QTE.

Et un gameplay éblouissant

Il ne manque donc qu'une chose pour que House of Ashes soit un très grand jeu : un gameplay à la hauteur de son histoire. C'est malheureusement raté.

En effet, en dépit des améliorations citées plus haut, le défaut majeur de la licence est toujours présent : il n'est toujours pas possible de passer les cinématiques déjà vues. Opus après opus, ce défaut rend plus compliqué d'apprécier l'expérience. En effet, House of Ashes n'est pas le genre de jeux auxquels on joue une fois avant de l'abandonner, bien au contraire : si la première expérience permet de découvrir l'univers, elle ouvre surtout sur de multiples "et si ?" donnant envie d'explorer chaque possibilité, pour le meilleur et pour le pire. En l'occurrence, en général pour le pire.

Prenons un exemple concret, le mien en l'occurrence. J'ai découvert le jeu en mode soirée télé, le mode coopératif local de la licence. Belle expérience, tout le monde survit sauf un personnage (le mien, tristement). Ce décès est en outre très appréciable puisqu'il ne découle pas d'un QTE raté, mais bel et bien d'un mauvais choix. Je décide donc de le recommencer en solitaire afin de sauver tout le monde et d'en profiter pour explorer d'autres options. Seulement voilà : arrivé à peu près à un tiers du jeu, je fais un nouveau mauvais choix qui coûte la vie du même personnage ; décidément, le sort s'acharne sur lui.

Refaire un tiers d'un jeu en revoyant les mêmes scènes et en refaisant les mêmes actions est assez désagréables, mais c'est encore pire quand le jeu s'en mêle. En effet, en voulant annuler cette mauvaise décision et remettre le métier sur l'ouvrage, j'ai constaté que si le jeu permettait toujours de charger une scène spécifique, il se montre moins généreux sur ce plan en solitaire qu'en multijoueur (à moins que ce soit lié au fait d'avoir fini l'histoire avant de chercher à revenir en arrière ?). Montrons-le en image :

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À gauche, la sélection de la scène en soirée télé. À droite, celle proposée en jouant seul. Comme vous le constatez, en solo, cela passe directement de "Le monde souterrain" à "Le signal" alors que dans l'autre cas, pas moins de six scènes sont intercalées. Pourtant, l'histoire est rigoureusement identique (en tout cas dans cette partie), ce qui se remarque notamment en continuant l'aventure depuis le menu principal puisque les autres chapitres sont alors bel et bien cités. Pourquoi, dès lors, forcer un joueur solitaire à refaire l'intégralité de ce bloc, alors qu'un groupe peut faire preuve de davantage de précision ? Quel plaisir le joueur est-il censé prendre à refaire une séquence de plus d'une heure rigoureusement identique pour modifier un seul et unique choix ?

L'amour dure une partie

Il paraît que l'amour dure trois ans. Dans House of Ashes, en tout cas, il a duré quatre heures, soit la durée d'une partie : le jeu s'est révélé aussi plaisant pendant sa première partie que désagréable pendant la seconde. Il en résulte un sentiment d'amertume : le titre donne vraiment envie de l'explorer dans ses moindres recoins, notamment en proposant des choix qui ne sont vraiment pas évidents, mais punit le joueur s'il essaie de réellement le faire. Cela n'en fait pas un mauvais jeu pour autant, mais l'empêche de réaliser son plein potentiel : j'ai passé une soirée mémorable en compagnie de mes amis et ne peux que vous conseiller de vous en tenir là. Faites une partie, profitez de la grande maîtrise narrative de Supermassive Games, acceptez les conséquences de vos choix puis consacrez le reste de votre temps libre à prier que le prochain titre règle enfin ces problèmes récurrents.

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Test réalisé par Alandring sur PlayStation 5 à partir d'une version fournie par l'éditeur.

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Plateformes PlayStation 4, PlayStation 5, Windows, Xbox One, Xbox Series X|S
Genres Jeu de rôle (RPG), contemporain

Sortie 22 octobre 2021 (Monde) (Xbox Series X|S)
22 octobre 2021 (Monde) (PlayStation 5)
22 octobre 2021 (Monde) (PlayStation 4)
22 octobre 2021 (Monde) (Xbox One)
22 octobre 2021 (Monde) (Windows)

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