Test de Pentiment - RPG archaïque
J'ai testé Pentiment, sorti le 15 novembre dernier. Il est enfin l'heure de livrer un verdict.
Un long Moyen Âge
Pentiment est un jeu de rôle se déroulant dans le petit village de Tassing, dans le Saint-Empire romain germanique, au 16ème siècle. L'ambiance est un des gros points forts du jeu : on se sent vraiment immergé dans cette époque comme peu de jeux savent le faire et il est très appréciable de voir l'évolution des personnages au fil des ans, chaque acte se déroulant après une ellipse temporelle.
Tassing est le théâtre de meurtres, que le personnage incarné par le joueur, Andreas Maler, a pour mission d'élucider. Pour ce faire, en l'absence de tous les outils modernes, il lui faut surtout discuter avec les villageois : en apprendre plus sur les personnes accusées du meurtre, déterminer leur mobile, obtenir une possible arme du crime... Le titre a pour particularité qu'il n'y a pas une solution, mais plusieurs : le joueur peut en définitive accuser plus ou moins qui il le souhaite parmi les suspects, à condition d'avoir réuni assez d'éléments incriminants. Cela peut se justifier au vu de la trame générale du jeu, mais il est assez surprenant d'avoir un jeu centré sur les enquêtes ne disposant pas d'une réelle solution.
Par ailleurs, le mécanisme des enquêtes est très insatisfaisant. En effet, celles-ci doivent être réalisées dans un temps limité. Pour réunir des informations, il faut entreprendre certaines activités qui occupent un temps important, en général une demi-journée ; cela force à choisir les pistes suivies. Si l'intérêt de la démarche peut se concevoir, surtout en partant du principe que chaque accusé est potentiellement coupable : avec du temps, le joueur aurait juste des preuves sur tous les suspects ; il ne serait pas réellement plus avancé. Cependant, cela crée un paradoxe avec un autre aspect du jeu : si les activités prennent du temps, il est à tout moment possible de discuter avec les habitants sans que cela ne fasse avancer l'horloge. Aussi, ce mécanisme incite surtout à arpenter encore et encore le même village à la recherche de personnes ayant de nouvelles choses à nous dire. Pis, l'évolution de la zone est très marginale : l'intégralité du jeu se passe au même endroit. Faire encore et encore les mêmes allers-retours se révèle vite terriblement lassant.
Une technique vieillote
La zone de jeu est divisée en de minuscules cartes, comprenant chacune quelques maisons. Le terrain de jeu est au final très minimaliste, mais il se divise en une trentaine de lieux, voire davantage en comptant les intérieurs, qu'il faut donc visiter trois fois par jour, voire davantage. Heureusement, les temps de chargement sont presque inexistants, mais le problème est ailleurs : il est rapidement désagréable de devoir se déplacer si souvent de zone en zone, surtout que le personnage avance très lentement ; il court en extérieur, mais pas en intérieur et même sa course n'est pas très rapide. Il ne peut en outre pas se balader librement, seulement arpenter les routes créées à cet effet.
En outre, si le jeu dispose d'une direction artistique exceptionnelle, qui lui permet de se démarquer et représente très bien l'époque concernée, il n'en est pas de même pour son habillage sonore, au contraire. En effet, le jeu est extrêmement bavard, ce qui n'est pas un problème pour un jeu de rôle. Ces dialogues ne sont pas doublés, ce qui est acceptable. Ce qui l'est moins, en revanche, c'est que les dialogues ne s'affichent pas immédiatement : ils se dévoilent progressivement, comme s'ils étaient écrits, avec au passage un bruitage qui est acceptable au début, puis devient franchement désagréable après quelques heures.Tout ceci est paramétrable : il est possible de régler les options pour que les dialogues soient instantanément complets, mais il est quand même regrettable de devoir parcourir les options pour avoir une expérience de jeu correcte.
Surtout, le jeu ne propose pas de sauvegarde manuelle, seulement une sauvegarde automatique extrêmement fréquente. Cela peut se comprendre pour un jeu demandant de faire des choix dans l'utilisation de son temps, mais cela renforce la frustration. En effet, le jeu est déjà terriblement lent, mais en plus il est impossible de tout explorer en une seule partie. Pour réellement voir l'impact des choix et leurs conséquences, il faudrait recommencer deux fois, voire davantage, ce qui paraît inenvisageable au vu de la lassitude que parvient à générer le titre.
Dieu seul le sait
En effet, Pentiment regorge de choix. C'est là aussi un grand paradoxe : la structure principale est extrêmement linéaire, les événements principaux se produisant inévitablement quoi que fasse le joueur. Cela génère de prime abord de la frustration - légitime -, mais on remarque ensuite que le destin d'un grand nombre de personnages dépend des décisions du joueur. C'est le cas des accusés des meurtres, qui peuvent vivre ou mourir, mais aussi de nombreux personnages secondaires, dont la survie dépend de l'accomplissement de quêtes secondaires ou, surtout, des dialogues.
En effet, régulièrement, le jeu nous informe que "cette décision ne sera pas oubliée" après avoir prononcé une phrase lors d'un dialogue. Puis, lorsqu'il est temps de convaincre un personnage, la somme de ces dialogues détermine le résultat. Une bonne idée sur le papier, mais très mal exécutée dans la pratique, pour plusieurs raisons.
Premièrement, très souvent, les choix de dialogue sont très abscons. Il arrive régulièrement que l'on choisisse une option avant de constater que le personnage ne dit pas du tout ce que l'on imaginait ; c'est en cela que la sauvegarde automatique est extrêmement pénalisante. De plus, même quand il dit ce qu'on souhaite lui faire dire, il arrive que la réaction ne soit pas celle que l'on attendait, sans qu'il n'y ait jamais d'explication : une phrase dite quelques heures plus tôt joue un rôle dans une décision, mais on ne comprend pas toujours pourquoi. Troisièmement, dans de nombreux cas, il faut prendre tous les bons choix de dialogue pour réussir à convaincre l'autre... y compris certains choix masqués. Il m'est ainsi arrivé d'échouer à convaincre des personnages parce que je n'avais pas enclenché un événement me permettant de gagner un point, nécessaire pour parvenir à mes fins. J'aurais donc dû ne pas tenter de les convaincre à ce stade, faire cet événement, obtenir le point et revenir ; un élément impossible à savoir sans suivre un guide. Enfin, dans certains cas, les résultats sont absurdes. Ainsi, il m'est arrivé de vouloir convaincre un personnage, mais de ne pas avoir les compétences requises. Il hésitait entre deux options : si je lui conseillais A, cela échouait, donc il choisissait B. Si je lui conseillais B, cela échouait, donc il choisissait A. C'est assez absurde, car en définitive il était possible de faire ce que je voulais, en échouant à le convaincre de ce que je ne voulais pas qu'il fasse.
Les choix pourraient être la plus grande force du jeu ; ils sont sa plus grande faiblesse, à cause de la sauvegarde automatique, de leur obscurité et de ce système extrêmement rigoureux et punitif.
Papy, tu m'ennuies
Pentiment dépeint une époque rarement évoquée dans un jeu vidéo. Il propose une histoire intéressante, des personnages très riches, une direction artistique marquante et de nombreux choix. Il aurait pu constituer une excellente surprise. Cependant, il lui manque le principal : il n'est pas fun. Principalement en raison de sa technique défaillante, de sa lenteur globale et de sa terrible répétitivité, il génère un terrible ennui, contre lequel j'ai dû lutter pour en voir le bout. Un terrible gâchis.
Test réalisé sur PC à partir d'une version fournie par l'éditeur.
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Plateformes | Windows, Xbox One, Xbox Series X|S |
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Genres | Aventure, aventure graphique, médiéval |
Sortie |
15 novembre 2022 |
Aucun jolien ne joue à ce jeu, aucun n'y a joué.
Réactions (5)
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