Test de Blasphemous 2 - Le retour du pénitent

Il y a quatre ans, le studio espagnol The Game Kitchen débarquait avec sa propre vision du metroidvania grâce à Blasphemous. Un jeu exigeant, néanmoins intrigant, qui nous plongeait dans l'histoire religieuse espagnole tout en s'inspirant de l'architecture andalouse, la région où est basé le studio. Quatre ans après, le deuxième titre de la licence débarque, avec une suite directe des évènements du DLC gratuit Wounds of Eventide qui était sorti sur le premier Blasphemous en 2021. 

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Pénitence éternelle

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La fin de Wounds of Eventide nous annonçait le retour du Miracle, un moyen d'annoncer à l'époque le développement d'une suite. Après avoir trouvé le repos éternel - du moins, il l'espérait -, le pénitent est donc contraint dans Blasphemous 2 de battre le fer à nouveau. Plongé une nouvelle fois dans un cycle sans fin, celui d'une mort impossible, lui qui est ressuscité à chaque fois, il découvre une contrée étrange où il doit de nouveau affronter des forces grotesques et contre-nature, tentant de trouver des réponses dans un univers qui en a assez peu. Toujours cryptique, la narration de Blasphemous 2 est à l'image de son aîné, faite de dialogues alambiqués qui référencent le fait religieux, d'un doublage espagnol du plus bel effet et de la promesse de souffrir à chaque instant. Car comme à l'époque, l'univers de Blasphemous est teinté de désespoir, tout rappel la mort, la souffrance et le regret. C'est un chemin pénitent qui semble sans fin, chaque nouvelle zone amenant son lot d'horreurs. Il n'est pourtant pas horrifique et on y trouve même un certain goût de l'ironie, surtout dans certains de ses personnages que l'on croise au fil de l'aventure qui racontent avec beaucoup de sarcasme leur destin cruel. Dans l'ensemble, c'est un monde à part, auquel on adhère pleinement ou que l'on déteste. Pour ma part, j'ai été séduit par sa proposition à l'époque et cette suite m'y fait replonger avec un plaisir certain, parce que Blasphemous 2, au-delà de son désespoir ambiant, s'appuie sur une direction artistique terriblement séduisante. Le style visuel du jeu, bien que moins intéressant sur quelques cinématiques type dessin animé qui manquent de l'élégance du pixel art, repose sur une véritable maîtrise artistique, offrant des salles d'une beauté époustouflante. Il y a ses ennemis, pour la plupart très réussis, mais surtout ses décors, qu'il s'agisse de caves puantes, de bâtiments religieux en ruines ou de tours interminables, tout bénéficie d'une attention du détail qui sublime son pixel art. Et il en est de même pour le choix des couleurs qui varient énormément d'une zone à l'autre, dans un monde interconnecté assez classique pour le genre du metroidvania.

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D'entrée, Blasphemous 2 tente d'insister sur la liberté qui nous est offerte. D'abord par le choix de l'arme de prédilection, une parmi trois, en attendant d'en débloquer d'autres au cours de l'aventure. Et puis, un objectif établi dès le début : trois cibles visibles sur la carte (qui n'est pas encore dévoilée à ce moment-là), donnant les directions vers lesquelles il faut se diriger afin de tuer trois gardiens, soit trois boss afin d'accéder à la suite de la carte. On peut ainsi virtuellement se diriger là où on le souhaite alors que Blasphemous 2 a tout du metroidvania, avec sa carte interconnectée, mais on s'aperçoit vite que ces zones se font dans un ordre précis. La liberté est en effet vite balayée, au profit d'un système assez classique où des zones nécessitent de débloquer des armes ou pouvoirs qui permettent de passer certains obstacles auparavant bloquants. Malgré cela, le sentiment de liberté est très présent, car il est aisé d'aller d'un point à l'autre de la carte, incitant à l'exploration, sachant que l'on n'a que peu de choses à perdre : les morts ne sont pas vraiment punitives, se contentant de simplement réduire la barre de mana, mais il est simple de la rétablir. Au contraire l'exploration permet souvent d'obtenir des objets utiles comme de sortes de statues religieuses qui débloquent des bonus passifs, ainsi que des "points de martyr" en affrontant les ennemis. Ces points servent à débloquer plusieurs choses, notamment les compétences actives qui facilitent grandement la progression. L'exploration est aussi motivée par la possibilité de trouver quelques quêtes secondaires, assez bien écrites (bien que parfois aussi cryptiques que l'histoire principale), mais qui offrent une vision plutôt nécessaire sur ce monde là, sur ses habitants, ses peurs et ses croyances.

L'élégance du combat

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Pour mener à bien la funeste quête du Pénitent, Blasphemous 2 nous donne le choix dès le début entre trois armes. Trois styles différents, plus ou moins vifs et agiles, afin de lancer l'aventure. Mais ce choix n'est pas vraiment définitif étant donné que rapidement au cours de la quête, on récupère les autres armes puisque chacune dispose d'une compétence particulière permettant d'accéder à certaines salles et plateformes initialement inaccessibles. Ces différentes armes jouent aussi un rôle essentiel sur le combat, car elles s'adaptent parfaitement aux différents ennemis et boss grâce à leurs aptitudes différentes. Par exemple, un boulier au bout d'une chaîne permet de frapper fort, mais aussi d'atteindre des ennemis aériens plus lointains, la double rapière permet de frapper vite et de constamment rester en mouvement, tandis que l'épée offre des opportunités de contre dévastateurs. Avec un gameplay qui alterne entre coups, esquive (grâce à un dash) et contre (avec un bouton à actionner au bon moment), Blasphemous 2 ressemble comme deux gouttes d'eau à son prédécesseur, mais arrive à se renouveler grâce à la multitude d'armes et de nouvelles compétences magiques qui offrent une nouvelle manière d'aborder les combats. Surtout que les ennemis se renouvellent plutôt bien, avec la nécessité à chaque fois d'apprendre leurs patterns pour mieux les aborder, en perdant le moins de vie possible. 

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À cela s'ajoute un arbre de compétences qui permet de débloquer de nouveaux coups, des résistances, de quoi équilibrer les débats face à des ennemis toujours plus puissants : il y a moyen, d'ailleurs, de gagner de "l'expérience" (avec les points de martyr donnés aléatoirement par les ennemis) afin de se faciliter la vie en débloquant les bonnes compétences, même si le jeu reste exigeant. Impossible d'aller au bout de l'aventure sans apprendre les patterns des ennemis ou utiliser pleinement les différentes armes, notamment dans certains combats qui obligent à passer d'une arme à l'autre rapidement pour profiter de leurs propriétés de contre et d'esquive (comme la double épée qui permet de se téléporter en tapant sur des miroirs). Plus encore contre les boss, dans des combats toujours succulents, avec des patterns certes simples à apprendre, mais avec un timing parfois si tendu qu'il nécessite que l'on s'y reprenne à quelques fois pour les vaincre. Avec leur mise en scène à fort accent symbolique et religieux, et leur design absolument dément, ces combats restent les meilleurs moments de l'aventure. Chaque découverte d'un nouveau boss impressionne pour l'ingéniosité dont fait preuve le studio, capable à la fois de raconter des choses visuellement (avec les représentations religieuses) et d'offrir un challenge assez similaire aux metroidvania les plus appréciés. Il y a de manière générale une vraie élégance dans le style de Blasphemous 2 : que ce soit pour la beauté de ses décors, l'animation de ses combats ou sa mise en scène, le jeu bénéficie d'une élégance qui tranche avec l'horreur de ses propos, où tout espoir semble abandonné. Et c'est cette beauté trouvée dans l'horreur qui pousse à aller au bout, malgré le fait que le jeu soit assez éprouvant à cause de ses thématiques et de son aventure faite de nombreux obstacles.

Conclusion

Blasphemous 2 est le digne successeur de son aîné. Il en reprend toutes les qualités, et sans bénéficier de l'élément de surprise face à la découverte d'un tel univers, il parvient quand même à séduire en sublimant les qualités déjà décelées à l'époque. Aussi solide pour sa direction artistique que pour sa narration, le jeu offre une balade terriblement accrocheuse dans la quête interminable du Pénitent, celui qui n'arrive même plus à rêver d'un repos éternel qui lui est sans arrêt refusé. C'est un monde intrigant, qui n'avait pas tout dévoilé à l'époque et qui offre encore de bien belles idées pour justifier une suite qui va même plus loin qu'à l'époque sur sa mise en scène, son système de combat qui gagne en agilité et en technicité (grâce à la combinaison des nombreuses armes) et sur la qualité de ses combats de boss.

Test réalisé par Hachim0n sur PC et Steam Deck à partir d'une version fournie par l'éditeur.

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