Test de Tamarak Trail - Comme un roguelite-deckbuilder, mais avec des dés

Les roguelites basés sur la construction d'un deck de cartes se sont multipliés ces dernières années et peu nombreux sont ceux qui tentent de changer un peu la formule. Parmi ceux-ci, Tamarak Trail qui vous propose de jouer non pas avec des cartes, mais avec des dés.

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Une première impression trompeuse

Au premier contact, Tamarak Trail ressemble beaucoup à nombre d’autres roguelites-deckbuilders qui ont vu le jour avant lui. Une météorite s’est écrasée dans la région de Tamarak et les monstres qui la peuplent sont devenus agressifs. Notre héros doit donc parcourir le Sentier qui mène à l’origine de ce mal et la détruire. Ce Sentier est classiquement divisé en plusieurs chemins, chacun constitué de plusieurs nœuds abritant combat, évènements aléatoires textuels, trésors et autres camps et marchands. Même la présentation des combats nous plonge en terrain connu. Notre héros est d’un côté, les ennemis sont alignés de l’autre. Le jeu se joue en tour par tour et un petit symbole au-dessus de la tête des ennemis nous annonce leurs intentions pour le tour à venir, avec les dégâts éventuels qu’ils nous infligeront. Classique. L’originalité de Tamarak Trail ne repose donc pas sur sa présentation, mais bien sur ses mécaniques.

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La détermination est la clé de la survie

Commençons par les combats. Vous disposez, comme vos ennemis, d’une réserve de blessures qui est symbolisée par des cœurs sous votre personnage. Vous ne pouvez subir qu’un nombre limité de blessures, vous n’en récupérez qu’à de trop rares feux de camp et si votre réserve tombe à 0, votre expédition sur le Sentier prend fin. Première particularité du jeu, il suffit d’un dégât, peu importe sa valeur, pour infliger une blessure. Mais plusieurs coups successifs détruiront plusieurs cœurs. Ainsi, une attaque qui cause 3x1 point de dégâts est plus dangereuse qu’une attaque qui en inflige 20 sur une attaque unique. Pour survivre plus longtemps, chaque personnage en combat dispose d’une jauge de détermination qui sert de tampon entre les dégâts entrants et votre réserve de blessures. Pour en infliger une, il faut donc d’abord réduire cette jauge à 0. Heureusement, la jauge se recharge à chaque tour de quelques points. Une règle qui valable tant pour vous que pour vos ennemis.

Ca va faire mal...
Ca va faire mal...

Seconde particularité du jeu, cette jauge de détermination n’a pas qu’une fonction défensive. Elle est également consommée par vos capacités. Utiliser vos capacités pour vous défendre ou attaquer affaiblit donc votre jauge alors qu’à l’inverse, ne pas jouer de capacité augmente votre régénération de détermination à la fin du tour. On a donc là un système intéressant qui demande de jongler entre attaque et défense et de toujours bien tenir compte de la consommation de détermination de nos capacités pour en conserver suffisamment pour survivre un tour de plus aux attaques adverses. Mais les bonnes idées mécaniques de Tamarak Trail ne s’arrêtent pas là, puisque le système de deckbuilder est lui aussi assez particulier. Enfin, il serait sans doute plus juste de parler de dicebuilder dans notre cas.

Coup de dés !

En effet, Tamarak Trail a choisi de représenter les capacités du personnage sous la forme de dés à six faces que vous pouvez personnaliser. Chaque capacité, offensive ou défensive, occupe une des faces et votre première action lors de chaque tour est donc de lancer vos dés pour déterminer la main avec laquelle vous allez jouer. Le joueur débute le jeu avec deux dés et chaque boss vaincu en ajoutera un dans votre escarcelle, jusqu'à un maximum de 5. Du côté des capacités, les deux dés de départ sont remplis avec des capacités de base et chaque combat que vous remportez vous permet de choisir une nouvelle capacité parmi trois à ajouter à votre forge de dés. Vous avez accès à cette forge depuis la carte du monde et c'est là que vous pouvez personnaliser les dés. Le jeu vous permet d’affecter un exemplaire des capacités que vous possédez à l’une des faces d’un de vos dés, de les transférer à un autre dé ou de les mettre de côté pour plus tard. Une phase qui est loin d’être anodine. Il arrive en effet que vous ayez plus de capacités disponibles que d’emplacements disponibles sur les dés. Ou au contraire, lors de l’obtention d’un nouveau dé, que vous n’ayez pas suffisamment de capacités pour former un dé complet. On regrette donc un peu l'absence d'une possibilité de combiner des capacités identiques que l'on aurait en multiples exemplaires. Enfin et pour être complet, les dés peuvent être renforcés par un « cœur », un objet spécial que vous pouvez découvrir dans les coffres de la carte. Ceux-ci donnent un effet passif au dé, comme une augmentation des dégâts des capacités d’attaque ou une amélioration de votre régénération de détermination, par exemple.

Personnalisation d'un dé, avec un coeur
Personnalisation d'un dé, avec un coeur
Choix de récompense après un combat
Choix de récompense après un combat

Piper les dés

L’idée de représenter le tirage des capacités jouables à chaque tour aurait pu être un simple gadget, mais l’équipe de Yarrow Games a poussé la logique un peu plus loin. Ainsi, si vous ne pouvez le plus souvent utiliser un dé, et donc une capacité, qu’une seule fois par tour, le jeu possède des capacités qui « tourneront » le dé lorsque vous les utilisez. Ce qui vous permet d’utiliser une autre face du même dé lors du tour, jusqu'à créer des combos surpuissants. De quoi donner encore plus d’importance à la phase de création des dés puisqu’il est possible de prévoir quelle face sera obtenue lorsque le dé sera ainsi tourné par une capacité.

Les étoiles au dessus des dés indiquent les rebonds
Les étoiles au dessus des dés indiquent les rebonds

Plus intéressant encore, le jeu a intégré un principe de collision entre les dés en début de tour. Pour faire simple, chaque fois qu’un de vos dés en touche un autre lors du lancer inaugural du tour (qui peut être manuel ou automatique), il gagne un point de rebond. Certaines capacités gagnent des bonus en fonction du nombre de point de rebond du dé auquel elles appartiennent, en multipliant leurs attaques ou en infligeant un effet secondaire à l’ennemi ciblé. Mais c’est un système à double-tranchant, car les rebonds augmentent également le coût en détermination des dés.

Snake eyes

Mécaniquement, Tamarak Trail a donc tout d’un bon jeu. Le gimmick qui doit le différencier des autres jeux du genre fonctionne bien et le jeu est assez plaisant à jouer, tant les combats s’enchainent rapidement. Pourtant, l’ennui pointe le bout de son nez après quelques heures. On tourne en effet très vite en rond dans Tamarak Trail, tant son système de progression et de déblocage de contenu s’avère péniblement long. Ainsi, la partie persistante du jeu consiste en un chalet, point de départ de nos expéditions que l’on peut retaper pour débloquer divers éléments, comme des nouveaux types de rencontres aléatoires. Problème, le jeu n'explique pas toujours l'utilité des ces éléments. C’est également là que l’on peut débloquer deux nouveaux héros aux mécaniques différentes du personnage de départ. Le tout se fait à l’aide d’une monnaie que l’on gagne sur les boss du jeu ainsi que lors de quelques rencontres aléatoires. Un gain qui se fait à un rythme bien trop lent pour ne pas lasser le joueur.

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Un terrible manque de variété

Cette lenteur se retrouve également dans le déblocage des éléments qui concernent les dés. Les capacités, propres à chaque personnage, se débloquent via un système d’expérience lié à votre run. Or, même durant un run complet qui m’a vu vaincre le boss final, la récompense n’a été que de deux nouvelles capacités. C'est ce que je trouve frustrant : un long run n’est pas mieux récompensé qu’une partie qui n’élimine que le premier boss. Et c’est encore pire pour les cœurs de dés.  Ainsi, en un peu plus de 8 heures (le temps nécessaire pour vaincre le boss final une première fois), je tournais sur une sélection de 5 cœurs. Pas franchement de quoi apporter de la variété dans le jeu. Pourtant, lorsqu’on jette un œil au journal intégré au jeu, il semble y avoir une bonne liste de capacités et de cœurs.

Qui aurait crû que faire saigner une pierre serait si efficace ?
Qui aurait crû que faire saigner une pierre serait si efficace ?
Dommage de ne pas en voir la couleur avant de se lasser du jeu, d’autant qu’il faut recommencer l’opération pour chaque personnage et que je vous avoue n’avoir pas été convaincu par les deux (la magicienne et le traqueur) que l’on peut débloquer. Ce manque de variété frappe également les ennemis et c’est peut-être ce qui est le plus gênant. Tout le long de notre exploration du Sentier, nous traversons 4 zones. Chacune possède ses propres ennemis et des capacités particulières. Mais on s’aperçoit vite que la variété des monstres au sein d’une zone est assez faible, avec une omniprésence de pigeons dans une zone ou de fantômes dans une autre. Le design des créatures est par contre très réussi, tout comme celui de notre personnage.

Peinture fraiche

Il y a un étrange sentiment d’être devant un jeu qui s’apprête à lancer son accès anticipé dans ce Tamarak Trail. Mais c’est surtout du côté de l’interface et de la manière qu’a le jeu de communiquer que l’équipe de développement aurait bien eu besoin du retour des joueurs. Je l’avais déjà signalé lors de notre aperçu vieux de près d’un an et peu de choses ont changé depuis lors. Prenons un simple exemple pour illustrer ce problème de communication avec le joueur. En combat, rien n’indique directement l’effet du dé que vous pouvez utiliser. Dans un jeu de cartes normal, vous voyez la carte et sa description. Au pire, ces informations apparaissent lorsque vous survolez la carte avec la souris. Pas ici. Une information aussi capitale que le coût d’utilisation du dé n’est pas directement visible. Oui, l'information qui varie en fonction des rebonds et qui est la ressource qui vous protège de la mort n'est pas affichée par défaut. C'est idiot. Ici, il faut d’abord sélectionner le dé, d’un clic gauche, pour que s’affiche sa description. On pense aussi à la carte, qui n'indique nulle part la signification des icônes qui la peuplent. Évitez également la VF qui ajoute son lot d'erreurs de traduction au jeu. Il a clairement manqué une phase de polish sur tout ça.

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Conclusion

Les mécaniques de ce Tamarak Trail sont intéressantes et elles auraient pu servir de bases à un bon jeu. C'est le genre de titre que je vous aurais probablement suggéré de le garder à l’œil s’il était en accès anticipé. Mais ce n’est malheureusement pas le cas et le manque de contenu combiné à une interface peu performante dans sa communication avec le joueur lui font rater le coche. Ceci dit, les développeurs semblent à l’écoute et le jeu peut s’améliorer avec le temps. À l’heure actuelle, il me semble toutefois plus sage d’attendre quelques mois pour leur donner l’occasion d’améliorer un titre qui n’est pour l’instant amusant que quelques heures.

Test réalisé par Grim sur PC à l'aide d'une version fournie par l'éditeur.

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