Test de Test Drive Unlimited Solar Crown - Fantôme du passé

Après un lancement houleux, la faute à des serveurs qui n'étaient vraisemblablement pas prêts à assumer la charge de joueurs arrivés lors des quelques jours d'accès anticipé réservés aux éditions les plus chères, puis au lancement global quelques jours plus tard, Test Drive Unlimited Solar Crown s'est, d'entrée, taillé une réputation compliquée. Mais maintenant que les choses sont revenues dans l'ordre, qu'en est-il réellement d'un jeu qui a longtemps été attendu par les fans d'une licence qui fleure bon la nostalgie ?

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Hong Kong ou l'art du vide

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Il faut bien qu'on le dise, si notre test de "TDUSC" arrive aussi tard, le jeu étant sorti officiellement le 12 septembre dernier (et quelques jours plus tôt pour les détenteurs des éditions Gold et Silver), ce n'est pas simplement à cause d'un problème d'agenda à notre niveau, c'est avant tout parce qu'il a fallu être patient avant de pouvoir y jouer. Le choix de la connexion obligatoire (pour un titre à parcourir essentiellement en solo) avait déjà suscité quelques critiques auprès des fans qui l'attendaient, mais les choses ont empiré en début de mois quand les personnes qui avaient déboursé entre 80 et 90 euros n'ont pas pu profiter pleinement des jours de jeu anticipés face à des serveurs qui renvoyaient de nombreuses erreurs et empêchaient d'accéder au jeu. Aujourd'hui, les problèmes ont pour l'essentiel disparu. Il reste bien quelques déconnexions ici et là, mais elles se font de plus en plus rares, ce qui n'enlève rien à l'agacement qu'elles suscitent, et en dehors des maintenances annoncées en amont par les développeurs, il n'y a jamais de limite d'accès aux serveurs.

Alors, on a pu se plonger dans le monde qui nous est proposé par ce tant attendu TDUSC. La licence est peut-être obscure pour les plus jeunes, néanmoins elle apparaît dès la fin des années 1980 sur micro-ordinateur, avant de connaître plusieurs itérations au fil des années 1990. Et c'est en 2006 que la série a fait sa mue vers son concept actuel, sous-titré Unlimited, dans lequel les courses habituelles se mêlent à un monde ouvert où l'on peut explorer à loisir l'archipel d'Hawaï. Cinq ans plus tard, l'action partait du côté de Ibiza et puis, plus rien. Jusqu'à ce que la licence revienne sur le devant de la scène, nous menant à ce "Unlimited" troisième du nom, sous-titré à son tour Solar Crown, avec un jeu qui prend désormais place à Hong Kong. On y explore une région plutôt séduisante, aux paysages variés, de la ville garnie de gratte-ciels à des quartiers plus montagneux, d'autres en bord de mer, avec des courses profitant de cette topologie variée pour proposer à la fois des épreuves sur route et d'autres tout-terrain. L'exploration de Hong Kong est un véritable plaisir, le seul, on ne va pas se le cacher, tant l'équipe de développement a bien maîtrisé l'alliance entre la reproduction des spécificités de Hong Kong et l'intérêt ludique ; c'est de cette manière qu'on découvre de longues autoroutes aménagées convenablement pour y réaliser des courses plus excitantes que de longues routes vides ne le laissent initialement présager.  Les zones montagneuses permettent de s'amuser au drift grâce à des routes organisées en ce sens, tandis que les zones résidentielles et plus urbaines profitent de leur ambiance portée sur les néons pour des courses de rue sympathiques bien que clichées.

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Le plaisir a toutefois ses limites. Au-delà de la charmante exploration d'une carte très bien pensée, il faut vite revenir aux fondamentaux d'un tel jeu et cela commence par la conduite. Si elle est plutôt solide, avec le choix d'une approche résolument arcade, à l'image de ses prédécesseurs, elle souffre d'un manque d'équilibre qui en casse rapidement l'intérêt. Cela se voit particulièrement dans le comportement des voitures de l'IA, qui ne souffrent pas des mêmes contraintes que le joueur dans les virages (peu d'inertie, accélération démentielle), mais cela peut aussi s'observer manette en main avec certaines voitures considérablement meilleures que les autres sur une même catégorie. Par exemple, il est pratiquement impossible de perdre une course dans la catégorie Grand Touring si l'on fait le choix savant d'acheter une Porsche Taycan. Forte de son accélération hors norme et de sa tenue de route, elle écrase sans mal toutes les voitures de sa catégorie. Pareil en tout début de jeu sur la catégorie "daily driver", avec une Audi TT qui met la misère à toutes les autres voitures. C'est simple : avec ces voitures, le jeu est trop simple, mais sans elles, gagner une course tient souvent de l'espoir de voir l'IA se planter sur un ou deux virages. Les choses trouvent un peu plus de sens lors des courses rejointes par d'autres joueurs qui utilisent les mêmes voitures (puisque, en théorie, toutes les courses jouées contre l'IA peuvent être rejointes par d'autres joueurs), mais ces cas sont trop rares, même s'il est difficile de dire s'il s'agit d'un problème de matchmaking ou de manque de joueurs.

La nostalgie, un peu trop

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Cette approche très stéréotypée de la course automobile, reposant essentiellement sur l'importance de l'accélération en sortie de virage, rend les courses vite lassantes. Et ce n'est pas tous les à-côtés qui compensent cette lassitude : "l'histoire" tient en quelques cinématiques peu inspirées où l'on se contente de nous mettre au défi de devenir le ou la meilleure pilote du "Solar Crown", une compétition organisée entre deux factions de gens qui se défient sur des courses de rue. Vite mise de côté, l'histoire avance ensuite en toile de fond au fil de l'avancée en niveaux du joueur, qui augmente avec l'expérience acquise en réalisant des courses, en découvrant la carte petit à petit, en se faisant flasher par des radars automatiques ou encore en accomplissant quelques objectifs secondaires (qui nous envoient essentiellement faire des courses). Il y avait, dans les précédents "TDU", une certaine composante sur l'évolution de l'avatar avec la gestion de sa collection de voitures, ses vêtements ou encore son appartement. Mais tout cela a été réduit au minimum, avec un garage un peu miteux au sous-sol de la tour où le personnage réside, peu de vêtements et un appartement générique où il n'y a rien à faire. En clair, Solar Crown revient à quelque chose de très centré sur la course, ce qui n'aurait pas été un défaut si on n'en faisait pas aussi vite le tour. Car les courses sont finalement assez peu nombreuses, à tel point qu'il faut en répéter plusieurs pour progresser, que ce soit au niveau des crédits à accumuler pour acheter les voitures des catégories suivantes, que pour le gain d'expérience pour augmenter le niveau du joueur et passer à la suite de l'histoire.

On sent qu'il manque un élément, un liant qui donnerait plus de vie à l'ensemble du jeu, ou peut-être simplement plus de vie dans les rues. Malheureusement, et peut-être limité par un moteur qui a toutes les peines du monde à assumer les ambitions du jeu, on se balade dans un Hong Kong sans vie, sans piétons, avec un tramway à impériale emblématique de la ville qui se fait pourtant très rare, avec des immeubles et des enseignes qui se répètent et des voitures déjà peu nombreuses qui apparaissent et disparaissent sous nos yeux. La faute à une distance d'affichage riquiqui, qui tente de limiter les éléments affichés à l'écran pour faire tenir un jeu qui ne s'empêche pourtant pas de souffrir de nombreux ralentissements (sur PlayStation 5), notamment en course lorsqu'on est au combat avec une ou deux voitures en virage. Et ce ne sont pas ses qualités graphiques qui sont en cause : les ombres sont réduites au minimum, les effets de lumière semblent avoir une génération de retard, les textures des voitures peinent à rester crédible face à n'importe quel jeu du genre sorti ces dernières années. La nuit, habituellement flatteuse dans la plupart des jeux en monde ouvert, n'arrive même pas à apporter un peu de bonheur visuel.

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Dans l'ensemble, le titre souffre d'un manque de finitions. Qu'il s'agisse de son histoire rapidement évacuée, de ses courses trop répétitives aux parcours peu inspirés, de son IA (à difficulté unique, qu'on ne peut pas modifier) dont le comportement est improbable, de son matchmaking hasardeux qui ne parvient pas à mettre en relation les joueurs sur la plupart des courses - alors qu'il s'agit de l'argument principal de la connexion obligatoire ! - ou de sa technique datée, Test Drive Unlimited Solar Crown n'arrive pas à jouer dans la cour des grands. C'est d'autant plus significatif sur le contenu, à l'image des voitures mises à disposition, trop peu nombreuses, trop peu diversifiées (beaucoup, beaucoup de supercars européennes), avec curieusement un nombre extrêmement limité de voitures asiatiques alors même qu'on est à Hong Kong. En effet, les Toyota et Subaru brillent par leur absence, on trouve quand même deux petites Nissan (GT-R de 2009 et 370Z de 2011), mais cela est bien peu. Certes, le jeu tend à émuler la haute société hongkongaise qui aime importer des voitures européennes, mais les courses de rue en Lamborghini et en Porsche ont leurs limites. D'autant plus que ces voitures occidentales sont finalement assez peu nombreuses, avec des modèles parfois très proches, malgré la profusion de concessionnaires à découvrir sur la carte et qui exposent souvent trois ou quatre fois la même voiture dans leur showroom. C'est dommage, d'autant plus que la balade chez le concessionnaire et l'essai de bolides (littéralement, un test drive) en vue d'agrandir notre collection est un des éléments que l'on aime particulièrement dans l'esprit de la licence. Mais quand il y a si peu de choix et que beaucoup ne sont pas viables en courses, ça perd de son intérêt.

Conclusion

Il y a des choses dont il vaut mieux parler au passé, et Test Drive en fait partie. Autrefois synonyme de bonnes idées pour des joueurs qui prenaient plaisir à piloter ses voitures exotiques, la licence faisait encore résonner de nombreux espoirs dans les cœurs des fans. Mais Test Drive Unlimited Solar Crown n'arrive jamais à être à la hauteur des espoirs : au-delà de ses problèmes de serveurs qui ont entaché son lancement, le titre est trop vide, trop avare en contenu et souffrant d'une pauvreté visuelle difficilement acceptable à notre époque. On en retiendra une carte bien pensée et un level design parfaitement adapté à un tel jeu, mais c'est sa seule réussite. Les développeurs ont déjà annoncé une grosse mise à jour à venir pour le titre qui est avant tout pensé comme un jeu service censé vivre sur la durée, mais ils partent de loin.

Test réalisé par Hachim0n sur PlayStation 5 à partir d'une version fournie par l'éditeur.

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