Test d'Eternal Strands - La perfection au féminin
J'ai pu tester Eternal Strands, que j'avais découvert lors de l'AG French Direct de l'année passée. Avec succès.
Tout allait bien jusqu'à ce que cela n'aille plus
Il y a plusieurs centaines d'années, l'Enclave, une cité-État du monde fictif de Mayda, a découvert la clef d'immenses pouvoirs magiques. Leur exploitation leur a permis de devenir une puissance de premier plan. Seulement voilà : un jour, une tempête magique s'est déclenchée, isolant l'Enclave du reste du monde et confrontant toutes les nations à de nouveaux périls.
Le joueur incarne une membre d'une bande d'explorateurs, des Tisserands, qui parvient à se rendre dans cette Enclave coupée du monde depuis des décennies.
Je pourrais développer, mais j'aurais du mal à le faire bien : l'univers d'Eternal Strands est très développé, mais il ne se découvre que par bribes. En effet, l'ensemble du jeu se déroule dans une unique région, l'Enclave, et si les dialogues sont importants, ils ne constituent pas le cœur du jeu. Cependant, la richesse du lore est clairement un élément à souligner et il est globalement cohérent et intéressant.
L'histoire est parfois assez classique, elle tombe notamment en une occasion dans un manichéisme assez ridicule, mais elle est efficace. De toute façon, l'essentiel est ailleurs.
L'enchanteresse
Premièrement, il se trouve dans le système de combat. Dans un jeu vidéo, je cherche traditionnellement avant tout une bonne histoire, mais je n'ai pas souvenir d'avoir été confronté à un gameplay aussi bien pensé que dans ce jeu.
Eternal Strands est de prime abord un jeu d'action-aventure assez classique. Brynn, le personnage incarné par le joueur, peut attaquer avec l'une des trois armes à sa disposition, faire des roulades pour esquiver, courir... sauf que tout cela, on s'en fiche un peu. L'intérêt se trouve ailleurs.
Brynn dispose également de pouvoirs, au nombre de neuf et se débloquant au fur et à mesure du jeu. Au départ, il est seulement possible de déplacer des objets et de créer un mur de glace.
Or, ce système magique est extrêmement riche. La lévitation permet ainsi de saisir des objets pour les lancer sur les ennemis, mais aussi de se saisir des ennemis eux-mêmes pour les envoyer au loin ou de renvoyer des projectiles à leur expéditeur. De la même manière, le feu, débloqué plus tard, se propage naturellement dans l'environnement, mais peut être stoppé par les murs de glace.
La magie est réellement organique. Elle interagit avec l'environnement et ce dernier interagit avec elle. De même, il est tout à fait possible - et souhaitable - de combiner différents sorts entre eux.
Enfin, la magie est très libre d'utilisation : il n'y a pas de cooldown, seulement une barre de mana qui remonte très vite d'elle-même.
La combinaison de tous ces éléments fait que j'ai rapidement cessé de me servir de mes armes pour combattre les ennemis : je les tuais à distance, en utilisant mes différents sorts. Et c'était vraiment très chouette à chaque instant.
Ce jeu a aspiré mon âme
Les différents sorts se débloquent en tuant les boss, au nombre de neuf. La première fois, il suffit de réduire à zéro les points de vie de l'ennemi pour acquérir un nouveau pouvoir. Ensuite, en revanche, il faut le tuer d'une manière précise pour récupérer un "fragment" permettant d'améliorer ledit pouvoir. Chaque capacité ayant trois niveaux, il faut donc tuer chaque boss trois fois pour améliorer au maximum son pouvoir.
Les boss ont tous comme point commun d'être gigantesques et l'absorption de leur âme demande généralement de monter sur eux et de détruire des parties spécifiques de leur corps. C'est cependant appréciable à chaque fois et le fait de devoir le faire trois fois est équilibré : cela permet de profiter de chacun de ces boss sans que les tuer ne devienne une corvée.
Attends, j'ai entendu quelque chose
Reprenons. Le gameplay centré sur la magie est le premier aspect constituant le cœur de l'intérêt d'Eternal Strands. Il y en a cependant un deuxième : l'exploration.Le jeu de Yellow Brick Games n'est pas un monde ouvert, mais il propose des zones ouvertes. Dans celles-ci, il est, comme je le disais, possible d'interagir avec l'environnement. On peut par exemple détruire des arbres pour récupérer du bois ou des filons pour obtenir du minerai et il y a également de nombreuses caisses contenant des matériaux.
Chaque recoin est explorable : il est possible de grimper n'importe où et il y a souvent des endroits auxquels il est possible d'accéder via un chemin précis, que ce soit en arrachant une porte ou en descendant dans une crevasse.
Plus que les caisses et les ennemis à tuer, chaque zone dipose également de coffres contenant des ressources rares, de fragments de codex enrichissant le lore et de plans pour de nouveaux équipements. Les développeurs auraient pu simplement les indiquer sur la carte ou compter sur les joueurs pour les trouver par hasard. Ils ont trouvé une solution plus intelligente : les coffres, les fragments de codex et les plans émettent un petit son si on passe à proximité. Cela force à jouer au casque, mais il est vraiment appréciable d'entendre soudain un petit bruit et d'essayer de déterminer d'où il provient.
Respawn
De la même manière, les créateurs du jeu ont trouvé une bonne formule pour les ennemis. Lorsqu'on est dans une zone, ceux-ci ne réapparaissent pas. En revanche, si on quitte cette zone et retourne au campement, ils réaparaissent, en même temps que les caisses et les coffres (les fragments et les plans n'ont besoin d'être récupérés qu'une seule fois).
La conséquence est qu'il est possible de passer plusieurs heures à explorer une zone, en tuant et en détruisant tout, en fouillant chaque recoin avec l'aide de nos oreilles, puis d'avoir l'impression d'avoir entièrement fait le tour de la carte. Ce n'est pas tout à fait vrai - je n'ai réussi à trouver tous les fragments du codex d'aucune zone -, mais le sentiment l'est.
Mes meilleurs moments sur Eternal Strands l'ont été lorsque j'ai découvert de nouvelles zones que j'ai méticuleusement explorées dans leurs moindres recoins. En raison de ses interactions avec l'environnement, de la possibilité de grimper n'importe où et de ses indices audio, le jeu incite vraiment à explorer et rend cela agréable. Cependant, en gardant des zones de taille raisonnable et ne ne forçant pas la réapparition des ennemis, il permet de pleinement en profiter en donnant l'impression de pouvoir tout faire en une session.
Prends tout ce qui tient dans ton sac à dos
Je n'ai pas encore abordé la progression du jeu. Ce dernier ne contient ni niveau ni expérience : la progression se fait uniquement par l'équipement, en améliorant les pouvoirs et en développant le camp. Elle constitue probablement le seul seuil un peu compliqué à appréhender du jeu.
Comme je le disais, tout le plaisir est d'explorer une zone de fond en comble. Cependant, au départ, deux éléments empêchent de réellement le faire. Premièrement, l'inventaire est très limité. Il est possible de conserver une quantité illimitée d'exemplaires d'une ressource, mais un nombre limité de ressources différentes. Au départ, cette limite est atteinte très, très vite. Il n'est donc pas possible d'explorer une zone en entier, à moins d'accepter de laisser énormément de choses derrière soi. Toutefois, il est possible d'utiliser les ressources récoltées pour améliorer le camp, augmentant la quantité d'objets qu'il est possible de transporter dans son sac, au point que cette limite n'en est plus du tout une en fin de partie.
Deuxièmement, en cas de mort, tout est perdu, sauf un petit nombre de ressource (augmentant avec l'amélioration du camp, comme la taille de l'inventaire). Il n'est même pas possible de revenir sur son cadavre : tout est définitivement perdu.
C'est frustrant lorsque cela arrive et il est parfois tentant, pendant une exploration, de s'interrompre pour ramener ce que l'on a à la base. Sauf qu'en agissant ainsi, les monstres réparaissent et il faut donc recommencer l'exploration de zéro. Heureusement, là encore, une solution existe : les modes de difficulté.
Difficulté
Je déteste le concept même de la difficulté. Je n'aime pas mourir, ni devoir recommencer une même action plusieurs fois. Aussi, quand un jeu propose plusieurs niveaux de difficulté, je choisis presque toujours le plus bas. En l'occurrence, entre facile, normal et difficile, j'ai opté pour la difficulté facile.La conséquence est que je suis très rarement mort. Cela m'est arrivé quelques fois, mais presque tout le temps parce que j'ai fini dans le vide d'une manière ou une autre. C'était frustrant, mais je suis mort trop peu de fois, et de manière suffisamment éloignée, pour que la déception de perdre tout ce que je transportais soit trop forte.
En effet, Eternal Strands dispose d'un système de fioles de soin, en nombre limité, qu'il est possible d'utiliser pour se soigner. À nouveau, ce nombre augmente en améliorant le camp. En revanche, il n'est pas nécessaire de retourner au camp de base pour se recharger en potion : il est possible d'en trouver en détruisant des caisses présentes sur la carte. En fait, c'est même plus que ça : pendant l'exploration, on est presque toujours au maximum de fioles transportables, en tout cas en facile. Il arrive qu'on en utilise en combattant des ennemis, mais on peut souvent en récupérer par la suite.
Et c'est une excellente chose. Même ainsi, la difficulté est bien dosée, notamment dans les combats de boss. Le jeu ne m'a pas paru trop facile, il ne m'a simplement pas semblé trop punitif. J'imagine que pour ceux cherchant du challenge, les modes normal et difficile seront plus adaptés, mais j'ai eu une expérience parfaitement adaptée à ce que je cherchais.
Technique
L'interactivité avec l'environnement devait avoir un prix : le jeu n'est vraiment pas très joli. Pour les décors, cela ne se voit pas trop, la direction artistique très colorée dissimulant bien les limites techniques - même si j'imagine que les puristes y trouveront à redire. Cependant, c'est manifeste concernant les personnages, bien que ce soit peut-être davantage lié à un manque de budget qu'à des contraintes techniques.
Les personnages paraissent vraiment basiques, peu détaillés. Le chara design oscille en outre entre le passable et le vraiment raté. La conséquence de cela fait qu'il est difficile de s'attacher aux compagnons, pourtant bavards, qui nous aident en améliorant notre équipement ou nos compétences. On sent que les développeurs ont souhaité leur donner de l'importance - il est même possible d'avoir une romance au cours de l'aventure, parmi trois choix possibles -, mais la conséquence de ces limitations techniques et de leur chara design fait qu'ils paraissent sans vie et pas réellement humains.
Signe à mon sens que c'est davantage lié à un manque de budget qu'à des contraintes techniques, le résultat est pire encore dans certaines cinématiques remplaçant les visuels habituels par un style rappelant les dessins animés. Sauf qu'ils rappellent davantage les dessins animés à petit budget d'il y trente ans qu'Arcane.
Toutefois, si on parle des visuels, il faut aussi parler de l'audio. J'évoquais tantôt l'importance des indices audio, très bien faits, mais il faut ajouter un élément : le jeu est entièrement doublé en français et le doublage est de qualité. À dire vrai, cela en crée même parfois des impressions de dissonance, la voix de certains personnages paraissant ne pas coller avec leur apparence. Néanmoins, cet effort doit être salué, à l'heure où certains éditeurs majeurs décident de ne pas proposer de version française de leurs jeux.
Steam Deck
En outre, que ce soit lié à des contraintes techniques ou financières, la conséquence est que le jeu tourne admirablement bien, sur PC comme sur Steam Deck. C'était nécessaire : il est frustrant de tout perdre en mourant, mais ça aurait été largement pire en cas de crash intempestif. Or, dans les 39 heures que j'ai passées sur le jeu, je n'ai pas eu un seul crash et seulement une toute petite poignée de bugs et de ralentissements passagers, jamais bloquants.
En fait, c'est bien simple : je n'arrive pas à me souvenir d'un jeu fonctionnant aussi bien à sa sortie, que ce soit sur PC ou sur Steam Deck. Les tests de qualité ont visiblement été aussi poussés qu'efficace.
Vaut-il mieux jouer sur PC ou sur Steam Deck ? Les deux, je dirais. Pour les phases d'exploration, il est nécessaire d'avoir du temps devant soi et je dois avouer avoir préféré pouvoir les effectuer sur l'écran de mon PC, avec une manette en main. Néanmoins, cela signifie aussi que l'ordinateur en question est bloqué jusqu'au terme de la session, alors qu'il est possible de mettre en pause le Steam Deck en cas de besoin et de reprendre plus tard. J'ai vraiment alterné entre les deux supports, profitant de jouer en nomade quand je le pouvais, mais aucun ne me paraît intrinsèquement meilleur qu'un autre.
Le meilleur des mondes
Souvent, quand je joue à un jeu, que je l'apprécie ou non, je vois plein de petits points qui pourraient être améliorés. Pas ici. Certes, j'évoquais la qualité - tant technique qu'en termes de direction artistique - des personnages. De même, je n'aurais pas refusé une histoire un poil plus nuancée, surtout concernant le personnage de Kenric Stanilde, que j'ai pourtant essayé d'aimer et de soutenir à chaque fois que j'en avais l'opportunité. Cependant, ce sont des détails. Concernant ce qui fait la force du jeu, à savoir son système de combat et son exploration, je n'ai rien à redire. De même concernant la technique globale, le jeu étant extrêmement fluide et propre.
Eternal Strands m'a mis une claque comme j'en ai rarement eu ces dernières années. Comble de son sens de la maîtrise, il a en outre le talent d'avoir la durée idéale (comme je le disais, il m'a fallu 39h pour faire l'ensemble du jeu, quêtes secondaires incluses) pour sa proposition. Vraiment, le jeu paraît différent ; j'ai l'impression d'avoir à faire dès son lancement à ce qu'on a habituellement après des années de patchs sur des AAA. En encore un peu plus abouti.
J'aurais facilement pu passer à côté d'Eternal Strands, pris dans le flot des sorties de ces dernières années. Je lui ai donné le temps qu'il mérite et en ai été récompensé. En ferez-vous de même ?
Test réalisé par Alandring sur PC grâce à une version fournie par l'éditeur.
Sur le même sujet :
Plateformes | PlayStation 5, Windows, Xbox Series X|S |
---|---|
Genres | Action-aventure, fantasy |
Sortie |
28 janvier 2025 |
Aucun jolien ne joue à ce jeu, aucun n'y a joué.
Réactions
Pas de compte JeuxOnLine ?
Créer un compte